10 milliards de dollars…
Et pour cause : les ventes de véhicules se sont envolées de 22 % en juin, dépassant les 350 000 unités. Un record dans l’histoire de l’industrie automobile, à peine dépassé en mars et en décembre 2010. L’engouement s’explique par la baisse de l’impôt sur les produits industriels (IPI). Mais l’euphorie compense à peine les résultats du secteur : il boucle le semestre avec 1,72 million d’unités vendues, soit 1 % de moins qu’en 2011 à la même époque. Si l’industrie automobile est scrutée de près par le gouvernement et les économistes, c’est qu’elle est emblématique de la situation économique brésilienne. Le secteur a connu une forte croissance ces dernières années, essentiellement pour alimenter un marché intérieur – 3,63 millions d’unités en 2011 ! – dopé par une meilleure distribution des revenus, héritage des années Lula, mais aussi pour répondre aux exportations, 20 % de la production. Les salariés du secteur ont obtenu de fortes hausses de salaire, acheté une maison et inscrit leurs enfants à l’université. Ils sont représentatifs de cette « nouvelle classe moyenne » qui a propulsé le Brésil au rang de sixième économie mondiale l’année dernière.
Quand l’industrie a commencé à donner des signes de fléchissement, en septembre dernier, c’est aussi l’automobile qui a bénéficié des premiers coups de pouce du gouvernement. Un sentiment d’urgence s’est emparé de Brasilia : 2011 a affiché une croissance décevante, à peine 2,7 %, contre 7,5 % en 2010, et la Banque centrale ne table plus que sur 2,5% cette année. Pour enrayer le ralentissement, conséquence de la crise européenne, le gouvernement a sorti la grosse artillerie. Au-delà des baisses d’impôts et de charges pour l’industrie, il a aussi actionné le levier monétaire. Traditionnellement très prudente, la Banque centrale a changé son fusil d’épaule en août, en entamant une baisse du taux de base, passé de 12,5 à 8,5 %. Objectif : doper la consommation et l’investissement, et, au passage, réduire le service de la dette, ce qui libère des marges de manoeuvre financière pour le gouvernement. Autre impact : rendre moins attractif l’achat d’obligations d’État par des acteurs internes – qui pourraient opter pour l’investissement productif – et surtout par des spéculateurs étrangers, dont les liquidités déversées sur le Brésil ont provoqué, ces dernières années, une dangereuse survalorisation du real, la devise brésilienne. Un « tsunami monétaire » , selon Dilma Rousseff.
L’inquiétude a aujourd’hui un nom : désindustrialisation. Le secteur secondaire, qui représentait 50 % des exportations en 2007, ne pèse plus que 40 % aujourd’hui. La hausse du real a plombé les ventes à l’étranger, alors que les importations explosaient. Le protectionnisme est d’ailleurs un des autres instruments sollicités par le gouvernement. En septembre 2011, il a annoncé la hausse de 30 points de l’imposition sur les véhicules dont la production n’est pas à 65 % effectuée sur le territoire national ou dans le Mercosur – la zone économique du cône sud-américain –, et ce jusqu’à la fin de 2012. Il s’engage aussi à acheter une partie des équipements publics sur le marché local. Parallèlement, le Brésil est le pays le plus actif du monde en terme de plaintes devant l’OMC (80 ces deux dernières années), pour protester contre des mesures anti-dumping, en provenance d’Asie notamment.
Sur le front du crédit, la présidente a entrepris une bataille inédite, en affrontant les banques sur la question des spreads, la différence entre le taux du marché interbancaire et le taux offert aux clients, ainsi que sur les tarifs, très élevés. Les établissements publics (Banco do Brasil et Caixa Economica Federal) ont été chargés d’ouvrir la danse en cassant le marché. Ces plans de relance semblent toutefois impuissants. En mai, la production industrielle était inférieure de 4,3% par rapport à l’année dernière, la neuvième baisse consécutive. Les matières premières agricoles et minières, font aussi pâle mine, déprimées par le ralentissement de l’activité en Chine. Pour couronner le tout, une sécheresse a mis à genoux de nombreuses entreprises du secteur agricole, la production de soja a par exemple chuté de 20% par rapport à l’année dernière.
Une question taraude le gouvernement : en 2008-2009, le cocktail La présidente du Brésil, Dilma Rousseff – dont 77 % des Brésiliens plébiscitent l’action – vient d’annoncer que 10 milliards de dollars, remboursables sur vingt ans seront mis à disposition des états régionaux afin qu’ils investissent dans le secteur des transports.