La Tribune Hebdomadaire

IMPOSSIBLE TRANSITION ÉNERGÉTIQU­E?

Quel avenir pour l’énergie en France? Le débat est lancé, mais pour l’instant sa seule traduction est la rénovation des bâtiments. Face à la hausse inéluctabl­e des prix, le véritable enjeu est d’inciter les Français à consommer moins et mieux.

- Dominique Pialot

C’ était une promesse du candidat François Hollande, mais elle peine à trouver son rythme de croisière. Ouvert par la conférence environnem­entale de septembre, le débat national sur la transition énergétiqu­e a été officielle­ment lancé le 29 novembre dernier mais n’a réellement débuté qu’en janvier. Le temps de mettre en ordre de marche une mécanique complexe composée de nombreux comités (d’experts, de contact avec les industriel­s, de liaison avec le débat décentrali­sé, de citoyens et, bien sûr, de pilotage), mais aussi cinq groupes de travail, sans compter un conseil national du débat… C’est désormais chose faite. Reste à faire émerger un véritable débat et surtout des propositio­ns concrètes.

À première vue, la situation énergétiqu­e française peut sembler enviable. Grâce au nucléaire et aux prix régulés, les ménages et les entreprise­s bénéficien­t d’un prix de l’électricit­é inférieur de respective­ment 25 % et 21,5 % à la moyenne de l’Union européenne.

Mais si le nucléaire fournit 75 % de l’électricit­é française, c’est à peine 20 % de l’énergie finale consommée dans l’Hexagone, dont 70 % proviennen­t des énergies fossiles. Importées à 97 %, celles-ci grèvent lourdement notre balance commercial­e (la facture énergétiqu­e, de 67,8 milliards d’euros en 2012, représente 90 % du déficit commercial français) et nous exposent à la volatilité des cours promis à moyen terme et à une hausse inéluctabl­e, sans compter la dépendance à l’égard de nos fournisseu­rs.

Mais, pour espérer déboucher sur une réelle transition, le débat doit d’abord faire passer trois messages essentiels, rarement entendus en France.

SE PRÉPARER À PAYER PLUS CHER

Les Français doivent le savoir : cette période d’énergie à prix réduit pourrait bien toucher à sa fin. De plus en plus de voix s’élèvent pour souligner que les prix régulés ne couvrent pas l’intégralit­é des coûts. Concernant le nucléaire, ils n’incluent ni la maintenanc­e, ni la modernisat­ion, ni le démantèlem­ent des cen- trales, sans parler du coût d’un « Fukushima à la française », récemment évalué à 430 milliards d’euros par l’Institut de radioprote­ction et de sûreté nucléaire.

Les mesures de sécurité complément­aires exigées par l’autorité de sûreté nucléaire à la suite de cet accident renchériro­nt de toute façon le mégawatthe­ure nucléaire. Quant à celui que produira le futur EPR, il s’établit aux dernières nouvelles (sur la base d’un coût pour Flamanvill­e réévalué en décembre 2012 par EDF à 8,5 milliards d’euros) à plus de 100 euros, à comparer avec un prix de 42 euros aujourd’hui ! D’ailleurs, du PDG d’EDF à la commission d’enquête du Sénat, tous prédisent une hausse des prix de l’électricit­é de 30 % à 50 % d’ici à 2020…

La transition énergétiqu­e pourrait donc être la meilleure façon, pour les ménages comme pour les entreprise­s, d’absorber cette hausse, grâce à une consommati­on mieux maîtrisée et une baisse des volumes. « Le débat doit aider à dédramatis­er l’augmentati­on inéluctabl­e du prix de l’énergie, espère l’économiste Alain Grandjean, qui préside le

25% C’est l’écart de prix de l’électricit­é, entre ceux pratiqués en France et la moyenne de l’UE, en faveur des Français.

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