La Tribune Hebdomadaire

LA BANQUE DE FRANCE À L’HEURE DE LA RIGUEUR

Le contexte Mi-avril, la direction de la Banque de France présentera aux syndicats le plan définitif de restructur­ation de l’établissem­ent, annoncé en septembre 2012. L’enjeu La direction veut saisir l’opportunit­é des 5 000 départs en retraite, prévus d’

- Christine Lejoux

Ce plan a des conséquenc­es négatives pour les usagers alors que la Banque fait des bénéfices élevés. » Michel Felc e, élu au Conseil général de la banque La Banque se désengage de ses missions de service public. Pour preuve, son absence lors de la réflexion sur la BPI. » Denis Durand secrétaire général de la CGT Banque de France Depuis le redresseme­nt de ses comptes en 2004, la Banque centrale est une poule aux oeufs d’or pour l’État.

L’ambiance n’est pas à la fête à la Banque de France. Mi-avril, les syndicats et la direction de la vénérable institutio­n se retrouvero­nt de nouveau autour d’une table, pour discuter du plan de restructur­ation du réseau, annoncé en septembre 2012 et dont les représenta­nts du personnel ne comprennen­t « ni l’urgence ni le caractère radical ». « Le gouverneur [de la Banque de France, Christian Noyer, ndlr] aura arrêté la liste des fermetures d’implantati­ons territoria­les, dont certaines interviend­ront dès juillet. Nous serons alors définitive­ment fixés sur l’ampleur de la restructur­ation », indique un syndicalis­te. Tout en évoquant de « possibles ajustement­s à la marge », les élus du personnel ne se bercent guère d’illusions.

Le plan qui leur avait été présenté le 21 septembre dernier prévoit la fermeture d’une soixantain­e de bureaux d’accueil et d’informatio­n du public sur les 85 que compte la Banque de France dans l’Hexagone. Parallèlem­ent, le nombre de caisses, où s’effectue le traitement des billets, sera ramené de 72 à 32. L’objectif : réduire de 30 % environ, à 4200 ou 4600, le nombre d’agents qui travaillen­t au sein du réseau. Actuelleme­nt, les 6 300 agents du réseau représente­nt près de la moitié de l’effectif global de la Banque de France, qui comprend quelque 13 000 employés. Le siège social, lui, n’en compte « que » 5 000, l’Autorité de contrôle prudentiel (ACP) – chargée de surveiller les banques et les assureurs –, 1 000, et l’activité de fabricatio­n des billets, 1 000 également.

Ce plan de restructur­ation est jugé « drastique » par l’intersyndi­cale de la Banque de France, et d’autant plus incompréhe­nsible que la vieille dame portée sur les fonts baptismaux par Napoléon Bonaparte en 1800 est en pleine forme. De source syndicale, « la Banque », comme on la nomme en interne, devrait de nouveau publier – jeudi 28 mars – de très bons résultats annuels, après le bénéfice brut de 5,65 milliards d’euros dégagé en 2011, qui avait constitué un record historique pour l’établissem­ent.

Concurrenc­e accrue au sein de l’Eurosystèm­e

« Ce plan de restructur­ation n’obéit qu’à une logique financière consistant à renflouer un État impécunieu­x », gronde un syndicalis­te. Aussi excessif soit-il, le propos contient peut-être une part de vérité. Depuis le redresseme­nt de ses comptes, en 2004, la Banque de France est devenue une poule aux oeufs d’or pour l’État, son actionnair­e à 100 %. En 2011, elle lui a versé pas moins de 3,4 milliards d’euros, dont 2 milliards au titre de l’impôt sur les sociétés et 877 millions d’euros de dividendes. Et, de fait, en présentant le plan de restructur­ation, en septembre dernier, Christian Noyer avait insisté sur la nécessité, pour la Banque de France, « de minimiser les coûts des services rendus, [coûts] qui pèsent sur la collectivi­té nationale ».

Mais c’est avant tout un véritable choc démographi­que qui est à l’origine de ce projet de restructur­ation. D’ici à 2020, la Banque de France verra 5 000 de ses agents partir à la retraite, soit près de 40 % de ses effectifs ! Et, sur ces 5 000 départs, 41 % concernero­nt des agents du réseau. L’occasion ou jamais, en ne remplaçant qu’un départ sur deux, de moderniser une institutio­n bicentenai­re dont le coût de fonctionne­ment est régulièrem­ent pointé du doigt, notamment par la Cour des comptes. Auteur d’un rapport en forme de réquisitoi­re en mars 2005, celle-ci était revenue à la charge en février 2012, estimant que, « malgré une croissance globalemen­t contenue sur la période 2003-2009, les charges d’exploitati­on de la Banque demeurent à un niveau élevé, à un peu plus de 1,9 milliard d’euros en 2010 ». Un montant constitué à plus de 70 % par les charges de personnel. « La Banque de France a restructur­é son réseau entre 2004 et 2006, reconnaiss­ent les sages de la Rue Cambon, mais il n’en est pas moins encore très vaste, car il comprend près d’une succursale par départemen­t, avec une activité et une productivi­té variables selon les implantati­ons. »

Si les charges opérationn­elles de la Banque de France tracassent la Cour des comptes, c’est d’abord en

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[Manuel Cohen/afp] Christian Noyer, gouverneur de la Banque de France, présentera en avril la liste des fermetures d’implantati­ons territoria­les. Dans la ligne de mire, les bureaux visités par moins de 1 000 personnes par an.
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