Pacte de confiance
explique un élu qui était à la réunion avec JeanMarc Ayrault lors du lancement du pacte de confiance États-collectivités, le 12 mars dernier. J’ai peur que les maires réagissent mal : ils ne couperont jamais dans les effectifs, surtout avec des élections municipales l’année prochaine, et pas plus dans les dépenses sociales ou éducatives auxquelles l’électeur est sensible. Ils vont couper dans les subventions aux associations qui souffrent déjà terriblement, en particulier dans la culture depuis le début de l’année ; ils vont économiser 5 % sur leurs frais de gestion, mais surtout, ils risquent de couper dans ce qui ne se voit pas immédiatement, les investissements. C’est le plus facile, le plus tentant. Tout le monde est en fin de mandat, chacun va attendre 2014 sagement en se disant que, dans un an, on verra s’il faut éventuellement relancer les investissements… »
« Le problème est dans le timing »
Et là, comme le dit Jacqueline Gourault, on plonge dans l’ubuesque : « Les économies supplémentaires qu’on nous demande sont faites pour financer le crédit d’impôt aux entreprises. Mais à quoi cela rime-t‑il de financer ce crédit d’impôt en fermant le robinet des investissements ? 75 % de l’investissement public vient des collectivités, mais 80 % de ces 75 % viennent du seul bloc local, il ne faut pas y toucher. »
Michel Destot, député et maire socialiste de Grenoble, va plus loin. « J’ai calculé, explique-t‑il, l’impact sur les investissements si le gouvernement donnait le même coup de rabot sans modulation de la baisse des dotations selon le niveau de collectivité. Près du tiers de la capacité d’autofinancement de la ville de Tourcoing (31,3 %)
Le 12 mars, Jean-Marc Ayrault a lancé « les travaux d’élaboration du pacte de confiance et de responsabilité » entre l’État et les collectivités locales promis par François Hollande à l’automne dernier. Le Premier ministre a annoncé le lancement de six disparaîtrait, la perte serait de près de 15 % des dépenses d’investissement pour la ville de Nancy, ou un montant équivalant à 13 % du rendement de la taxe d’habitation manquerait à la Ville de Paris. Ce serait vraiment stupide, il faut absolument préserver nos capacités d’investissement. Je sais que le calcul peut mériter un peu plus de précisions, mais si le coup de rabot était donné de manière uniforme, on perdrait immédiatement 10 000 emplois dans le bâtiment, alors que les 3 milliards supplémentaires que l’on nous demande doivent stimuler l’emploi. Le souci est dans le timing : l’effort de mutualisation des services lié à l’intercommunalité n’a des effets sur l’emploi que très lentement, mais on nous demande une économie immédiate. On ne peut virer personne dans la fonction publique territoriale et on ne supprimera pas non plus de services à la population à la veille des municipales. Alors il va falloir être fin, prendre l’effort fiscal en compte et bien comprendre que toutes les collectivités ne jouent pas le même jeu, que cela doit être pris en compte pour le calcul du coup de rabot. Il y a par exemple des communes qui investissent et d’autres qui font du résidentiel… La possibilité de recourir à des emprunts à trente ou quarante ans pour financer nos investissements est une très bonne chose, puisque l’on va pouvoir réduire l’impact de ceux-ci immédiatement dans nos budgets. Mais combien de maires vont-ils le faire ? »
Le chantier vital de la péréquation financière
En fait, après la charge au canon de l’ex-ministre du Budget Jérôme Cahuzac, annonçant la baisse non négociable des dotations aux collectivités, devrait succéder une période de broderie à l’ancienne. D’abord avec un gros effort de l’État. Gilles Carrez, le président UMP de la commission des finances de l’Assemblée nationale, a demandé à Jean-Marc Ayrault que « les ministères arrêtent de stimuler la dépense publique locale : depuis vingt ans, ils savent que les collectivités ont des marges et ils vont les trouver pour financer leurs politiques. Mais là, celles-ci n’en peuvent plus ».
Les collectivités sont de moins en moins maîtresses de leurs dépenses et sur chacune d’elles tombent chaque année des normes nouvelles. Les ponctionner encore plus risque de les priver de toute capacité de rebond d’ici deux ans, si jamais une brise de croissance se levait. Mais les élus vont aussi devoir forcer leur nature et, dans les quelques mois qui viennent, beaucoup dépendra de leur capacité à s’entendre sur un chantier vital pour eux, la péréquation financière. Le système actuellement en vigueur prend l’eau de toutes parts, et Jean-Marc Ayrault l’a mis sur la table des négociations.
Le bloc communal est en effet fortement dépendant de ce système car, sous des formes diverses, un peu plus de 9 milliards d’euros lui reviennent actuellement. C’est considérable, mais les maires ruraux ne demandent pas les mêmes critères que les maires urbains : ces derniers sont divisés entre eux en fonction de l’effort fiscal de leurs communes, et les élus ne sont pas forcément unanimes entre les différentes strates. Pas facile. Mais pas autant que la réduction de la masse salariale, sur laquelle le gouvernement ne va pas les lâcher. Dès que les municipales seront passées…