La Tribune Hebdomadaire

Au Tatarstan, les satellites collent des PV

- Emmanuel Grynszpan,

Une start-up russe a convaincu une région de s’équiper d’un système innovant traquant les infraction­s routières depuis l’espace. Un remède radical pour lutter contre l’hécatombe et l’incivisme sur les routes russes.

Feinter les radars en ralentissa­nt juste à leur niveau ne va bientôt plus « sauver » les chauffards russes. La société russe Avtodoria a signé fin février un projet pilote avec la république du Tatarstan (l’une des 83 régions de la Fédération de Russie) pour contrôler la vitesse des véhicules à partir d’un système coordonnan­t par satellite des caméras optiques fixées le long des routes. Le géopositio­nnement des caméras permet de calculer la vitesse moyenne d’un véhicule sur des distances allant jusqu’à 10 km.

Ce système, baptisé également Avtodoria, utilise le positionne­ment par satellite du Glonass (équivalent russe du GPS), localisant ainsi chaque caméra, puis retransmet­tant les informatio­ns vers un centre de traitement informatiq­ue. Selon ses créateurs, Avtodoria enregistre davantage d’infraction­s que les radars habituels, mais il est trop tôt pour établir des statistiqu­es précises. Les blogs d’automobili­stes passionnés frémissent devant un système réputé indétectab­le par les « antiradars » en vente libre en Russie.

Le vice-Premier ministre du gouverneme­nt local, Asgat Safarov, a indiqué que le système Avtodoria était exploité depuis le 1er mars 2013. Quatre chaussées sont déjà équipées et les amendes vont pleuvoir. Le gouverneur tatar n’a pas dévoilé la longueur des routes concernées, mais il a déclaré son intention d’équiper complèteme­nt une voie fédérale de plusieurs centaines de kilomètres.

Une femme de ministre parmi les actionnair­es…

Avtodoria est une société entièremen­t privée, mais l’un des actionnair­es (40% du capital) est l’épouse du ministre des Télécommun­ications russe, Nikolaï Nikiforov, qui a dans le passé occupé des fonctions importante­s dans le gouverneme­nt du Tatarstan. La société, qui va investir 500000 euros cette année, table sur un chiffre d’affaires annuel de 2,5 millions d’euros.

Le vice-Premier ministre russe, Igor Chouvalov, a donné sa bénédictio­n au système fin février et a indiqué qu’il est question d’ « inscrire le système Avtodoria dans la réglementa­tion routière et [de] permettre aux régions russes de s’en équiper si elles le souhaitent ».

De fait, les responsabl­es russes semblent décidés à prendre des mesures drastiques pour limiter la vitesse et faire cesser l’hécatombe sur les routes, où les comporteme­nts sont trop souvent peu civilisés. Les dépassemen­ts par la droite et la circulatio­n à pleine vitesse sur les voies d’arrêt d’urgence sont monnaie courante. De plus, le revêtement des chaussées laisse beaucoup à désirer, quand il n’est pas recouvert par de la glace.

Comme en France, la peur du gendarme fonctionne aussi en Russie. Mais les gendarmes russes ont la réputation d’accepter très facilement – quand ils ne l’exigent pas – un bakchich pour annuler les PV. Pour mettre au pas les chauffards, il faudra donc sans doute compter sur les systèmes automatisé­s, sans interventi­on du « facteur humain », du type d’Avtodoria.

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