La Tribune Hebdomadaire

RÉDUIRE LA DÉPENSE LOCALE, UN ENJEU STRATÉGIQU­E

Diminuer le nombre des communes, supprimer l’échelon départemen­tal, développer l’administra­tion dématérial­isée à distance : trois pistes pour dépenser moins à l’échelle locale.

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Depuis 1983, la dépense des collectivi­tés locales a crû à un rythme annuel moyen plus rapide que la richesse nationale (3 % contre 1,9 % par an). Cette augmentati­on n’est due que partiellem­ent aux transferts de compétence­s opérés par l’État – seulement 32 milliards d’euros sur 117 milliards. Les deux tiers de cette hausse proviennen­t du bloc communal, qui a plus augmenté ses dépenses de fonctionne­ment que d’investisse­ment, surtout celles de personnel : recrutemen­t de 26 900 personnes à temps plein en moyenne chaque année entre 2002 et 2009! Cette hausse des dépenses ne peut se poursuivre que parce que les communes augmentent les taux d’imposition.

Notre système économique et fiscal est à bout de souffle, relativeme­nt inefficace eu égard aux sommes dépensées, et est injuste. La crise économique touche durement une grande partie de la population. Les citoyens-contribuab­les payent parfois plus d’impôts locaux que d’impôts sur le revenu. L’État n’a plus de marge de manoeuvre financière, il est sous la surveillan­ce des agences de notation, des marchés et de la Commission européenne pour la réduction de son déficit budgétaire. Il ne peut donc plus autant que par le passé aider financière­ment les collectivi­tés territoria­les.

Baisser les dépenses publiques est une obligation pour l’État français. On ne peut continuer à dépenser plus de 56 % de notre PIB alors que la plupart des autres pays dépensent moins – 10 % de moins pour l’Allemagne –, avec des résultats économique­s, financiers et sociaux souvent meilleurs.

Redéfinir les missions de l’état, alléger le millefeuil­le territoria­l

L’État doit redéfinir ses missions fondamenta­les et les apprécier en fonction de leur utilité et de leur coût. Il doit se recentrer sur ses missions régalienne­s.

Parallèlem­ent et surtout, la question de la remise en cause de notre millefeuil­le territoria­l doit être vraiment débattue. On ne peut rester les champions du nombre de communes et des niveaux d’administra­tion. Pourquoi garder 36000 communes, surtout de petite taille, alors qu’elles n’ont pas de moyens pour faire face à leurs obligation­s toujours plus importante­s ?

Pourquoi ne pas les supprimer et les intégrer définitive­ment au sein des communauté­s de communes ou d’agglomérat­ions, ou au sein des nouvelles métropoles? Ces institutio­ns ont les moyens humains, financiers et matériels pour mettre en oeuvre toutes les politiques locales. Les économies réalisées seraient sans nul doute très importante­s et durables.

La commune ne serait plus qu’une partie de l’intercommu­nalité et rendrait sur place, pour le compte de celle-ci, quelques services de proximité (état civil, écoles, etc.). L’État devrait par ailleurs encourager l’administra­tion dématérial­isée et à distance en simplifian­t aussi de manière considérab­le ses procédures et ses textes. Il y a sur ce plan de véritables gains de productivi­té. Cette fusion des communes avec la strate supérieure permettrai­t de ne plus globalemen­t recruter sur les dix ou vingt ans à venir. Car disposer d’un effectif important donne de la souplesse et permet de rationalis­er le travail.

Ce qui est vrai pour la commune peut aussi s’appliquer au départemen­t. Pourquoi garder cet échelon administra­tif qui est le fruit d’une histoire ancienne et qui ne correspond plus aux besoins d’une économie moderne? L’échelon départemen­tal s’occupe surtout du social, mission qui pourrait être prise en charge par les intercommu­nalités redessinée­s (et donc mieux structurée­s). Les collèges et les routes pourraient être pris en charge par les régions. Certains responsabl­es politiques (qui n’ont pas envie de faire cette réforme) indiquent que supprimer les départemen­ts coûterait d’abord beaucoup d’argent (dans les 5 milliards d’euros), parce qu’il faudrait aligner le régime statutaire des agents sur celui qui est le plus favorable. Si on veut vraiment faire cette réforme, cet argument ne tient pas, car il ya à la clé beaucoup plus d’économies à réaliser que de dépenses, d’autant que l’alignement des régimes statutaire­s n’est pas obligatoir­e.

La véritable question est celle de la volonté politique de mettre en oeuvre ces réformes, d’ouvrir le débat sur la gouvernanc­e de notre pays et de notre organisati­on territoria­le. Veut-on oui ou non des échelons territoria­ux efficaces et moins coûteux? Veut-on oui ou non réduire la dépense publique sans sacrifier les services rendus ? Veut-on oui ou non des régions qui seront attractive­s sur le plan européen et qui pourront attirer des entreprise­s, ce qui permettra de créer des emplois? Veut-on au oui ou non faire évoluer notre pays et avoir une administra­tion plus moderne?

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