La Tribune Hebdomadaire

POUR UNE PSYCHOTHÉR­APIE ÉCONOMIQUE COLLECTIVE

L’économie française est entrée dans une phase dépressive profonde. Nous pouvons entendre le terme dépressif au sens économique du terme, c’est-à-dire une diminution durable de la production et de la consommati­on. Mais la France est aussi en dépression au

-

Cette « dépression » est celle d’un pays en pleine mutation, celle d’un pays qui passe de l’ère industriel­le et des services à celle de l’économie de la connaissan­ce. C’est celle d’un pays en pleine crise d’adolescenc­e, pour reprendre le titre du dernier ouvrage de Mathieu Laine et Patrice Huerre, La France adolescent­e. Sur le plan économique, les problèmes fondamenta­ux français et plus globalemen­t européens n’ont toujours pas été réglés : une constructi­on européenne délaissée et inachevée (une union monétaire sans union budgétaire)!; une politique de croissance structurel­le abandonnée depuis de trop longues années (innovation, formation, politique en faveur du capital, compétitiv­ité)!; un surendette­ment collectif (public en France, privé en Espagne…)"; enfin et surtout la définition d’un projet de société, français et européen.

Car la véritable question que l’on doit se poser est bien celle de la confiance en l’avenir. Et c’est là que les dépression­s économique­s et psychologi­ques se rejoignent. Sans confiance dans l’avenir, comment se projeter dans une politique d’investisse­ment!? Comment donner aux entreprene­urs l’envie de prendre des risques, eux qui créent les emplois de demain par le processus schumpétér­ien des destructio­ns créatrices!? Comment rétablir la confiance chez les consommate­urs pour qu’ils acceptent de transforme­r leur épargne de long terme en consommati­on immédiate!? Comment faire croire aux futurs acteurs économique­s que sont les jeunes Français que la France est leur avenir, quand on sait que 51!% des 25-34"ans aimeraient vivre dans un autre pays, selon une étude Viavoice pour W&Cie publiée début avril!?

En opposition avec la politique économique menée, il su#rait de suivre simplement quelques principes fondamenta­ux : stabilité de l’environnem­ent fiscal et juridique, fiscalité favorable au capital, simplifica­tion du droit du travail, allégement des contrainte­s juridiques pesant sur les entreprise­s, réduction massive des dépenses publiques par une redéfiniti­on du périmètre de l’État sur ses missions essentiell­es, responsabi­lisation des individus et confiance en la société civile, suppressio­n du principe de précaution pour redonner vie à la liberté d’entreprend­re et d’innover.

La politique économique actuelle va à l’encontre de ces principes économique­s fondamenta­ux. Conséquenc­es constatées sur le terrain depuis l’été dernier : une chute brutale de la confiance des entreprene­urs et chefs d’entreprise de toute taille, repli sur soi des consommate­urs, forte hausse de l’épargne de précaution, baisse du pouvoir d’achat, dégradatio­n de la valeur travail… Nous sommes dans une situation type de l’équivalenc­e ricardienn­e, mise en lumière par David Ricardo au XIXe siècle. La hausse de l’endettemen­t public, les fortes hausses d’impôts sans aucune perspectiv­e de réformes structurel­les qui permettrai­ent d’envisager une baisse d’impôts future, incitent les agents économique­s à épargner massivemen­t et à « réduire la voilure ». Les Français que l’on dit hermétique­s à l’économie nous donnent ici la preuve qu’ils comprennen­t bien mieux les mécanismes économique­s que ne le pense la classe dirigeante. Faisons donc confiance aux individus, aux entreprene­urs et à l’énergie créative des Français.

 ?? [ALAIN LE BOT/AFP] ?? Longtemps moteur de la croissance française, la consommati­on des ménages a cédé le pas à une épargne plus massive.
[ALAIN LE BOT/AFP] Longtemps moteur de la croissance française, la consommati­on des ménages a cédé le pas à une épargne plus massive.

Newspapers in French

Newspapers from France