La Tribune Hebdomadaire

Pour bien se former, il faut jouer avec sérieux

PLAISIRS UTILES Les Serious Games, «!SG!» ou « jeux sérieux », ont beaucoup gagné en crédibilit­é dans la formation profession­nelle. Désormais conçus par de véritables studios de production, ils s’adressent aussi aux PME, avec des «!titres!» accessible­s en

- ERICK HAEHNSEN

Peu de chefs d’entreprise ignorent ce précepte : bien former les salariés, intérimair­es et apprentis est stratégiqu­e. Globalemen­t, les entreprise­s ont consacré 13,1 milliards d’euros en 2010 à la formation, selon les données du projet de loi de finances pour 2013.

Or, depuis plusieurs années, les nouvelles technologi­es aidant, ces salariés et stagiaires ont accès à une nouvelle génération de contenus, plus attrayants, de moins en moins coûteux et opérables à distance. Dans le même temps, cette formation profession­nelle a fait sa révolution avec les Serious Games (SG). Des « jeux sérieux » certes, mais des jeux quand même, qui concilient e!cacité pédagogiqu­e et plaisir du jeu vidéo pour capter et mobiliser l’attention de l’apprenant.

« Le Serious Game est un secteur en cours de structurat­ion et d’indus- trialisati­on qui compte en France une bonne centaine de concepteur­s, développeu­rs et éditeurs » , observe l’analyste Laurent Michaud, chef de projet Loisirs Numériques à l’Idate, l’observatoi­re français de l’économie numérique et d’Internet. Le gros de la production porte sur des développem­ents à façon pour les besoins des entreprise­s. Notamment auprès des géants de l’industrie et de la finance comme Allianz, L’Oréal, Renault, Société générale, Total ou Vinci.

À l’instar des jeux vidéo, les créateurs de SG disposent de leur propre studio. C’est notamment le cas du groupe Genious (200"personnes). Son équipe répartie sur Montpellie­r, Rennes et Paris regroupe une quarantain­e de personnes (chefs de projets, ingénieurs pédagogiqu­es, game designer, infographi­stes, sound designer…). « Notre activité se partage à parts égales entre l’esanté et la formation profession­nelle » , décrit Thierry Touré, directeur de production de Genious, qui produit des SG pour former les managers et leurs collaborat­eurs aussi bien dans les secteurs de la banque et des services que de l’industrie.

12!% DES JEUX DÉJÀ DESTINÉS À LA FORMATION PRO

À la di#érence de Genious qui se focalise sur la production de jeux à façon, certains de ses concurrent­s cherchent à toucher un public plus large en proposant des titres «" sur étagère" ». Selon Laurent Michaud, la formation profession­nelle représente un peu plus de 12$% des 1$500"titres de SG parus depuis 2005. Le reste porte notamment sur l’enseigneme­nt, la santé, la défense civile ou la communicat­ion. C’est, on s’en doute, ce marché qui est donc appelé à croître vite.

Succubus Interactiv­e et sa quinzaine de collaborat­eurs en production comptent bien y contribuer. Créée à Nantes en 2002, l’entreprise a produit cette année deux titres qui seront vendus sur étagère par des organismes de formation. « L’un concerne l’anglais des a!aires et l’autre porte sur la formation des commerciau­x à la gestion de portefeuil­les client » , explique Laurent Auneau, le fondateur de Succubus Interactiv­e. Point fort, l’entreprise a développé «"HappyTech"» son propre atelier de génie logiciel qui permet de diviser par deux le temps nécessaire à la production d’un jeu. Grâce à cet atelier, scénariste­s et graphistes intervienn­ent directemen­t dans le logiciel. Facteur de productivi­té, cet outil de développem­ent va être mis à dispositio­n des centres de formation et des services de RH. Lesquels pourront ainsi créer leurs propres Serious Games moyennant un abonnement de 100 euros à 300 euros par mois.

De quoi attiser la compétitio­n avec les pure players de l’édition de SG. À commencer par Daesign. Créée en 1995, cette PME compte une trentaine de collaborat­eurs dont une majorité de développeu­rs, graphistes et concepteur­s pédagogiqu­es. « Nous maîtrisons toute la chaîne de la production et nous faisons appel à des experts métier pour traiter certains sujets comme les TMS (troubles musculosqu­elettiques) ou la diversité », fait valoir Claire Gautier, responsabl­e marketing et communicat­ion. Basée à Annecy, l’entreprise a réalisé 2,4 millions d’euros de chi#re d’a#aires en 2012.

Son catalogue en ligne comporte plus d’une quinzaine de titres sur étagère qui intéressen­t aussi bien les profession­nels du management que ceux de la vente, du droit ou encore du mieux-vivre au travail… Des produits développés avec sa technologi­e propriétai­re «"Ava"» (Acteurs virtuels autonomes). Résultat de six"ans de R&D, cette technologi­e permet de simuler le dialogue humain. Le premier jeu développé par Daesign aide d’ailleurs les managers à s’entraîner à l’entretien annuel d’évaluation. Développé à l’origine pour BNP, puis disponible sur étagère, ce jeu a été vendu à plusieurs milliers d’exemplaire­s sous forme d’abonnement­s annuels illimités.

Son dernier jeu, «" M comme Manager"», est le résultat d’une collaborat­ion entre Daesign, Orange et Natixis qui ont mutualisé leurs e#orts et leurs moyens

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[KTM ADVANCE] KTM Advance (Valencienn­es) développe des «!jeux sérieux!» intégrant la réalité virtuelle.

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