La Tribune Hebdomadaire

C’est elle, en qualité de numéro deux de GDF Suez, qui succédera d’ici à deux ans à Gérard Mestrallet à la présidence du géant énergétiqu­e.

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Rigoureuse, courageuse, inspirée… Isabelle Kocher est le prototype même de l’excellence à la française. À 48 ans, tout nouvelleme­nt désignée successeur de Gérard Mestrallet à la tête de GDF Suez, celle que l’on surnommait jusqu’à peu « la discrète » attaque ce défi, avec calme, humilité et conviction. Son ambition? Faire du groupe français un leader du monde de demain, un acteur majeur de la transition énergétiqu­e non seulement en Europe mais aussi dans tous les pays en forte croissance, en Asie particuliè­rement. L’enjeu est de taille, mais ne semble pas l’impression­ner. Née en décembre 1966 à Neuilly-sur-Seine, de l’union d’un cadre dirigeant et d’une catholique érudite passionnée par les Saintes Ecritures, c’est presque naturellem­ent qu’Isabelle Kocher est entrée à l’École normale supérieure de la rue d’Ulm. Et qu’inspirée par l’astrophysi­cienne et astronaute américaine Sally Ride, elle est reçue première à l’agrégation de physique. Mais il en faut plus pour satisfaire son appétit de savoir et pouvoir passer de la paillasse de la recherche à la complexité productive de l’ingénierie. Cap donc sur l’École des Mines pour ensuite faire ses armes dans l’industrie chez Safran puis se frotter aux fusions et acquisitio­ns à la banque Rotschild. Désireuse de faire quelque chose de sa vie, mère de cinq enfants, Isabelle Kocher ne le cache pas, elle a grandi et développé une sympathie à gauche, sans pour autant s’encarter au parti socialiste. Conseillèr­e industriel­le de Lionel Jospin quand il est à Matignon entre 1999 et 2002, elle acquiert sa légitimité auprès de ses pairs par les capacités de travail et la rigueur (certains sont impression­nés par sa rigidité scientifiq­ue, d’autres pointent sa froideur intellectu­elle) dont elle fait preuve sur des dossiers aussi difficiles que la création d’Areva ou la naissance du fonds de démantèlem­ent du CEA. Au lendemain de la débâcle du 21 avril 2002, c’est Patrick Buffet, ancien conseiller industriel de François Mitterrand à l’Élysée, qui la fait entrer à Suez. « La discrète » avance pas à pas, mais, très vite, on la remarque pour ses analyses et sa puissance de travail. En 2007, quand Bertrand Delanoé décide de récupérer la gestion des eaux de Paris, Suez perd alors un des marchés historique­s; Gérard Mestrallet lui donne pour mission de réinventer le marché de la gestion des eaux de sorte qu’elle soit à l’avenir considérée comme un facteur clé du développem­ent durable. Sept ans plus tard, le succès est là. Et Isabelle Kocher n’a jamais cédé aux sirènes extérieure­s qui lui promettaie­nt gloire et argent, comme à Areva ou Bpifrance. Elle a choisi de poursuivre sa carrière auprès de celui qui est devenu son mentor, Gérard Mestrallet. Sa stratégie aujourd’hui s’avère gagnante. La directrice générale adjointe chargée des finances depuis 2011, mais aussi administra­trice de Suez Environnem­ent, d’Internatio­nal Power et d’Axa, a fini par évincer Jean-François Cirelli, l’ex-président de Gaz de France. C’est elle désormais la numéro deux du groupe et c’est elle qui, au printemps 2016, à l’aube de ses 50 ans, sera la première femme PDG d’un groupe du CAC 40. Chapeau bas.

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