La Tribune Hebdomadaire

Marie Ekeland est une pro du capital-risque. Le lancement spectacula­ire et l’entrée en Bourse de Criteo avec Elaïa Partners, c’est elle. Aujourd’hui, cette femme qui n’hésite pas à aller là où on ne l’attend pas, entreprend depuis juillet de créer en solo

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Àl’origine, Marie Ekeland n’a jamais rien fait comme tout le monde : « Je suis entrée à Dauphine en maths et informatiq­ue avant d’intégrer J.P.Morgan pour finalement faire un DEA d’économie à l’EHESS. » Une première expérience chez J.P.Morgan à Paris et à New York, celle dont tous les jeunes économiste­s rêvent, la déçoit, elle veut être au plus près des entreprise­s. L’argent pour l’argent n’est pas sa tasse de thé. Ce qu’elle aime, c’est accompagne­r une entreprise. En 2000, elle rejoint Elaia Partners et, très tôt, elle a le nez pour soutenir une jeune société à l’avenir prometteur : Criteo, la plus belle entrée en Bourse au Nasdaq l’année écoulée. Aujourd’hui, elle siège aux conseils d’administra­tion d’une dizaine de start-up numériques. Mais, depuis juillet, elle a décidé de faire cavalier seul et de monter sa propre société. de croissance sur lequel il faut absolument miser. Le baromètre de la performanc­e des start-up du numérique que l’on publie chaque année démontre que ces entreprise­s enregistre­nt + 40 % de croissance, + 30 % à l’internatio­nal et engagent 25 % d’effectifs en plus tous les ans. Les emplois créés sont des jeunes de 32 ans d’âge moyen, c’est beaucoup moins que la moyenne nationale, à 90 % en CDI, donc d’emplois pérennes. Les modèles d’entreprise­s formées sont à 180 degrés des structures traditionn­elles, puisque, dans leur très grande majorité, ils s’établissen­t sur des partenaria­ts et le partage des risques. L’écart salarial entre les dirigeants et les salariés est de 2,7 %. Et 83 % de ces entreprise­s distribuen­t des stock-options aux tiers de leurs salariés. Il s’agit de projets communs où l’on partage la valeur créée. Ces chiffres nous ont permis d’être très actifs dans le débat public, notamment lors de l’épisode des “pigeons”. » Son deuxième constat ? Il n’y a plus d’ascenseur de croissance en France. Entre les entreprise­s du CAC 40 qui ont 101 ans d’âge moyen et les PME, il n’y a plus de passage entre les unes et les autres qui permettrai­ent à ces petites entreprise­s de devenir des ETI et des grands groupes. « Nous voulons nous attaquer à ces points de friction qui bloquent l’ascenseur économique. Dans notre baromètre, on compte seulement 7 % de femmes entreprene­urs sur 125 start-up. Et 27 % au sein des salariés. Donc, c’est beaucoup moins qu’au niveau national. Cela reflète les 15 % de femmes ingénieurs. Plutôt que de sensibilis­er, il faut donner envie aux femmes d’entreprend­re, de se faire plaisir dans le travail. Cela passe par les exemples emblématiq­ues, les représenta­tions des femmes au sein des médias où l’on retrouve tous les stéréotype­s des actrices et des mannequins. Comment rendre glamour une chef d’entreprise et démontrer que cela ne signifie pas abandonner une vie de famille. Il y a eu des films sur Mark Zuckerberg et Steve Jobs, alors que l’on n’en trouve pas sur des success stories de femmes entreprene­ures. On a besoin d’avoir une exposition différente des femmes dans les médias. Sur le financemen­t, le monde de la finance est très masculin. Aux conseils d’administra­tion des entreprise­s, où je siège, je suis la seule femme. Lorsqu’on a fait la présentati­on pour Criteo, on a reçu 300 investisse­urs et aucune femme. Là aussi on a un vrai problème. »

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