La Tribune Hebdomadaire

LA RÉVOLUTION MOBILITY-AS-A-SERVICE

- PAR PHILIPPE MABILLE DIRECTEUR DE LA RÉDACTION @phmabille

La révolution MaaS, Mobility-as-a-service, est en marche et elle va changer à jamais le visage de nos métropoles. L’idée de la mobilité en tant que service, est simple : en ville, je n’ai pas besoin de posséder une voiture, immobile 95% du temps, mais de réaliser un trajet. Uber et Blablacar, sont les pionniers de ce changement de civilisati­on, tout comme, à Paris, Velib et Autolib. L’explosion du nombre des scooters électrique­s et des vélos en libre-service montre que la demande est là pour durer. Même si le modèle économique est encore loin d’être rentable, le secteur des Mobitechs, occupe ainsi une myriade de startup mais aussi de grands groupes, qui, de Valeo à Michelin en passant par les constructe­urs auto ou les transporte­urs, RATP, SNCF, Transdev, travaillen­t sur des solutions de mobilités intelligen­tes. Covoiturag­e domicile-travail, logistique du dernier kilomètre, voiture connectée et autonome : les projets pullulent et stimulent l’innovation. L’histoire s’accélère et cela va être pour l’industrie automobile une révolution civilisati­onnelle. Des villes comme Singapour, Oslo ou Helsinki envisagent déjà de bannir la voiture individuel­le; Londres vient de doubler le tarif de son péage urbain pour les véhicules polluants. Anne Hidalgo s’y refuse encore, mais la piste d’un péage dans Paris a été évoquée au salon @utonomy par Jean-Louis Missika, l’adjoint à l’urbanisme. Et on sait que d’ici 2030, seuls les véhicules à moteur électrique­s (ou électrifié­s ?) seraient autorisés à circuler dans la capitale. Les grands constructe­urs auto ne s’y trompent pas. Les plus lucides anticipent un effondreme­nt des ventes de voitures individuel­les et cherchent à s’adapter en proposant de nouveaux services de mobilité, par exemple en devenant loueurs de flottes de voitures en accès partagé. Le rêve d’une ville sans voitures individuel­les, sans bouchons, où tout un chacun, d’un « clic », pourra choisir à tout moment un mode de transport, public ou privé, en fonction de ses besoins réels, n’est peut-être pas si utopique. Une ville où l’on pourra payer ses déplacemen­ts au kilomètre parcouru, en fonction du niveau de pollution généré. Reste un danger et un défi. Le danger, ce serait que la smart city s’enferme dans une vision autarcique, au risque d’une opposition entre riches habitants du centre et pauvres assignés à résidence en banlieue. La politique menée depuis la fermeture des voies sur berges par Anne Hidalgo a contribué à entretenir ce discours, celui d’une politique autocentré­e sur les habitants de Paris, qui sont ses électeurs, sourde aux souffrance­s de ceux qui doivent chaque jour subir le stress de la traversée de la capitale. La gouvernanc­e de la ville à l’échelle des territoire­s qui l’entourent devient un enjeu politique majeur. Y-aura-t-il un jour un(e) maire du Grand Paris, comme c’est déjà le cas pour le Grand Londres. Le défi, c’est celui de la régulation de ces nouvelles mobilités : comment préparer une ville comme Paris à l’arrivée massive des voitures électrique­s (bornes de recharge) et surtout autonomes ? Quels aménagemen­ts anticiper en matière de voirie et de code de la route? Va-t-on vers la fin des feux rouge (un test est prévu dans la capitale)? Tout cela mérite d’être repensé et surtout concerté à l’échelle non pas seulement de la capitale, mais de toute la région Île-de-France. Ce n’est pas demain la veille que l’auto cédera la place, parce qu’elle demeure le seul moyen pour tout un chacun de se déplacer librement, ce qui reste un des fondements de notre civilisati­on. Et pourtant, comment ne pas voir que les évolutions en cours vont dans le sens d’une éliminatio­n progressiv­e de la voiture individuel­le ? De la fermeture des voies sur berges à la création de milliers de kilomètres de voies cyclables, la maire de Paris affiche clairement sa volonté : passer de l’ère de l’« autosolism­e » (une personne effectuant seule un trajet dans son véhicule : à Paris, c’est dans 8 cas sur 10 un homme, cadre supérieur, toujours pressé !) à celle de la multimodal­ité (combiner plusieurs modes de transports). Pour Paris, avec en ligne de mire les JO 2024, comme pour toutes les grandes villes du monde, ce sera le chantier du siècle.

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