HELLO TOMORROW
DES DÉCOUVERTES QUI VONT CHANGER NOS VIES
Un tissu en fibres de champignon (mycélium), un chargeur de batterie ultrarapide, des caméras pour véhicule autonome boostées par l’intelligence artificielle (IA), de l’eau pure produite à partir d’air et de lumière solaire: cet inventaire à la Prévert recense quelques-unes des innovations exposées lors de l’événement Hello Tomorrow, qui s’est tenu au Centquatre, à Paris, les 26 et 27 octobre. Une conférence qui marie technologies et recherches scientifiques de pointe, ce qu’on appelle aussi la deep tech (voir La Tribune du 26 octobre). « Les projets que l’on présente sont issus de startups qui utilisent des technologies de pointe, avec des temps de développement très longs, et qui ont besoin de beaucoup de financement. Leur seconde caractéristique, c’est leur fort impact à moyen et long terme. Ces jeunes sociétés travaillent sur le monde de demain, dans les secteurs de l’énergie, de l’environnement, de la santé ou de la mobilité », explique Guillaume Vandenesch, directeur général de Hello Tomorrow. Il met aussi en avant le côté très international du Hello Tomorrow Global Summit: « Nous passons trois mois par an à identifier plus de 3000 projets dans le monde et nous en invitons 500 à la conférence. On peut rencontrer ici des startups qu’on n’a pas l’occasion de voir ailleurs, venues de Corée du Sud, de Chine, d’Inde, etc. », ajoute Guillaume Vandenesch.
TEXTILES ET MATÉRIAUX ÉCOLOS
Illustration avec la startup indienne Saathi, vainqueur du Hello Tomorrow Challenge 2017, qui va recevoir 100000 euros de BNP Paribas, partenaire mondial de l’événement, pour ses serviettes hygiéniques biodégradables à base de fibres de banane. Saathi a également remporté l’Impact Awards, soit 5000 euros supplémentaires remis par Sycomore Asset Management, acteur de l’investissement responsable, et le prix « Bien-Être » décerné par L’Oréal. Parmi les nouveaux matériaux qui vont arriver dans nos vies quotidiennes, le mycélium (ou blanc de champignon) est capable de synthétiser des molécules et fabriquer des structures légères, résistantes et écologiques. « Nous avons inventé un nouveau textile bio 100 % en mycélium, que nous ne fabriquons pas dans des usines, mais que nous faisons pousser », explique Eben Bayer d’Ecovative Design, qui arbore un bracelet de montre en mycélium.
IL FAUT BOIRE À LA SOURCE
Des matériaux durables qui pourraient nous aider à réduire notre dépendance aux plastiques et autres substances nocives issues du pétrole. Si la pollution par les molécules pétrochimiques est préoccupante, celle de l’eau l’est encore plus. Pour apporter de l’eau potable partout à un coût raisonnable, la société américaine Zero Mass Water a mis au point un panneau photovoltaïque qui fabrique de l’eau à partir de la lumière solaire. Cet « hydro panneau » nommé Source a été inventé en Arizona, un état semi-désertique souffrant de stress hydrique. Pour Cody Frie- sen, PDG de Zero Mass Water, « Source permet de relever trois défis concernant l’eau : des infrastructures en mauvais état, un manque de transparence sur ce que vous buvez, et un manque de praticité pour le transport et la consommation. Nous voulons transformer fondamentalement la relation de l’homme avec l’eau potable. » Une fois installé sur un toit de maison, le panneau de 2,5 m2 composé de nanostructures procure une pression de 40 PSI ( pound per square inch, livre par pouce carré) suffisante pour produire 30 litres, soit le volume nécessaire à une famille pour boire et faire la cuisine. Le tout pour un prix de 2000 euros, une somme remboursée en deux ans selon Zero Mass Water. « Notre mission est d’apporter une indépendance et une abondance en matière d’eau potable à chaque individu du monde », proclame Cody Friesen. L’accès à l’eau potable est un problème grave qui affecte des centaines de millions de gens. La réduction des gaz à effet de serre (CO2, NOx) et des particules fines relâchées par les moteurs à combustion, qui sont à l’origine de 500000 morts prématurées par an dans l’Union européenne selon l’Agence européenne de l’environnement, est un autre défi à relever. La solution: augmenter le nombre de voitures électriques, qui ne représentent que 1 % des ventes en France. Problème: le temps de recharge des véhicules électriques, entre 30 minutes et 8 heures, rebute les consommateurs. La société anglaise Zap & Go a mis au point un chargeur ultrarapide en utilisant des batteries à carboneion (C-ion), au lieu des traditionnelles batteries lithium-ion, qui présentent des risques d’incendies – comme on l’a vu avec les Galaxy Note 7 de Samsung – et qui réclament beaucoup de puissance lors d’une recharge rapide.
CHARGEURS ULTRARAPIDES ET CAMÉRAS BOOSTÉES À L’IA
Les nouveaux superchargeurs Tesla, par exemple, ont une puissance délivrée de 350 kWh, soit l’équivalent des besoins d’un hôpital. Pas sûr que le réseau électrique puisse supporter beaucoup de ces stations très gourmandes en énergie. « Notre vision est de fabriquer des batteries sûres, recyclables avec une durée de vie plus longue (plus de 100000 cycles de charge) grâce à notre technologie de nano-carbone », explique Simon Harris, directeur marketing et de l’investissement de Zap & Go, une spin-off de l’université d’Oxford. Simon Harris évoque aussi des conteneurs remplis de cellules C-ion mis à disposition dans les stations-service où les automobilistes mettraient leurs véhicules à charger durant la nuit. Zap & Go va commencer la production de ses batteries C-ion cet hiver dans l’usine de son prestataire chinois. L’année dernière, la société israélienne StoreDot avait présenté elle aussi à Hello Tomorrow une technologie alternative au lithium-ion fondée sur des nanodots (matériaux organiques), la FlashBattery. StoreDot a réalisé en mai dernier, lors de la Cube Tech Fair à Berlin, une démonstration de charge d’une batterie de voiture électrique en cinq minutes. Mais la production des FlashBattery, qui devait commencer fin 2016, a été reportée aux « trois prochaines années ». Toujours dans le domaine du transport, la voiture autonome est une autre innovation qui va bouleverser la manière de nous déplacer. La startup hongroise AI Motive utilise des caméras pilotées par l’intelligence artificielle qui reproduisent l’acuité visuelle d’un conducteur humain. « Notre technologie est capable de reconnaître une voiture sous tous les angles possibles, même si celle-ci n’est que partiellement visible. Or, pour qu’un véhicule autonome soit vraiment efficace, il faut que les caméras puissent au minimum reproduire la capacité visuelle humaine, ce que permettent nos logiciels », décrit Niko Aiden, chief operating officier d’AI Motive. La société hongroise, qui a levé 15 M€, teste son système en Hongrie, Finlande et aux États-Unis, ainsi qu’en France, avec deux Citroën équipées grâce à sa collaboration avec PSA. « Tous les constructeurs automobiles sont intéressés par notre technologie », se réjouit Niko Aiden. AI Motive est donc un challenger pour le leader des systèmes de reconnaissance Mobileye, société israélienne récemment rachetée par Intel. Des innovations de rupture que Hello Tomorrow compte bien continuer à présenter dans le monde entier grâce à ses ambassadeurs en Turquie, au Brésil, en Corée du Sud, en Inde ou au Pérou. Sans oublier la France « qui nous soutient beaucoup, notamment à l’international avec le ministère des Affaires étrangères, la French Tech et Bpifrance. Il y a une vraie synergie de l’écosystème de l’innovation français », se félicite Guillaume Vendenesch.
Nous passons trois mois par an à identifier plus de 3000 projets dans le monde