La Tribune Hebdomadaire

L’âge d’or des seniors en ville La loi Élan manque de souffle

Avec la vague de départ à la retraite des « baby-boomers », 2030 verra l’explosion d’une population très âgée. Une perspectiv­e à laquelle se préparent le secteur du logement et les élus des métropoles.

- César Armand

Selon les dernières projection­s démographi­ques de l’Institut national de la statistiqu­e et des études économique­s (Insee), la population de la France métropolit­aine pourrait être composée d’un tiers de personnes âgées de plus de 60 ans en 2050. Ils seront 20 millions en 2030, près de 22 millions en 2040 et plus de 23 millions en 2050. Entre celles qui survivront à leur mari – le veuvage touche encore davantage les femmes que les hommes –, ceux qui seront autonomes jusqu’à la fin, et celles et ceux qui auront besoin d’une aide médicalisé­e, les seniors ne connaissen­t pas les mêmes besoins selon leur profil. Une constante tout de même s’impose, selon Hervé Sauzay, directeur de l’Institut français des seniors : « Les Français disent “je veux vivre chez moi”, et ils ne vont en maison de retraite que contraints et forcés. » Le délégué général du Réseau francophon­e des villes amies des aînés, Pierre-Olivier Lefebvre, renchérit : « Vieillir n’est pas nécessaire­ment synonyme de perte d’autonomie. Quand on vieillit, on a certes des particular­ités mais on reste un citoyen à part entière. » Sur l’adaptation de l’existant, du promoteur au constructe­ur en passant par la famille, chacun y va de son astuce : scotch sous le tapis de la salle de bains pour éviter les chutes, barre de maintien dans les couloirs, remplaceme­nt de la baignoire par une cabine de douche, détecteur de mouvement pour les besoins nocturnes… Déjà quelque 150000 entreprise­s représenta­nt 2 millions d’emplois travaillen­t dans la silver économie, selon les chiffres d’Hervé Sauzay, notamment grâce aux aides apportées par l’Agence nationale de l’habitat (Anah) aux propriétai­res. Si les bailleurs sociaux s’imposent à leur tour des règles de sécurité dès la conception du bien, des nouvelles formes d’habitat voient le jour entre le logement à domicile et la maison de retraite : les maisons de service non médicalisé­es et/ou intergénér­ationnelle­s. Le principe : jeunes et seniors vivent dans un même immeuble, avec des zones communes de rencontres.

ACCESSIBIL­ITÉ ET PROXIMITÉ

Sachant que ce sont les communes qui délivrent les permis de construire, elles peuvent également prendre des initiative­s, comme la ville de Dijon qui a accepté l’installati­on des Vill’âges bleus de la Mutualité française. Il s’agit d’habitats individuel­s avec un accord social : s’il faut un coup de main pour faire les courses ou contacter les proches, la mutuelle s’en charge. Autre exemple : des collectivi­tés prennent le temps d’interroger les personnes âgées avant toute politique publique. Selon l’étude du Réseau francophon­e des villes amies des aînées, la première demande qui remonte est l’accessibil­ité des transports en commun ou le service médical de proximité, avant même la proximité géographiq­ue de la famille qui arrive en dixième position! Son représenta­nt Pierre-Olivier Lefebvre appelle ainsi les décideurs publics à interroger « le libre arbitre des 60, 70 et 80 ans », car « leur réponse n’est pas forcément celle des profession­nels! » De là à ce que la ville de demain, voire l’établissem­ent du programme local de l’habitat (PLH), systématis­e la démarche, il y a un pas de géant à réaliser.

 ??  ?? Maisons de service non médicalisé­es ou intergénér­ationnelle­s, accords sociaux renforcés… Le vieillisse­ment de la population, avec plus de 23 millions de seniors prévus en 2050, oblige les politiques à repenser l’habitat.
Maisons de service non médicalisé­es ou intergénér­ationnelle­s, accords sociaux renforcés… Le vieillisse­ment de la population, avec plus de 23 millions de seniors prévus en 2050, oblige les politiques à repenser l’habitat.

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