La Tribune Hebdomadaire

Le conseiller virtuel d’Orange Bank assure plus d’une conversati­on sur deux

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Djingo, tournant à l’intelligen­ce artificiel­le d’IBM Watson, a réalisé 400 000 conversati­ons avec des clients depuis novembre. André Coisne, le directeur général de la filiale bancaire de l’opérateur, ne cache pas sa satisfacti­on.

Baptisé Djingo, le conseiller virtuel d’Orange Bank, qui tourne à l’intelligen­ce artificiel­le (IA) d’IBM Watson, a semble-t-il réussi sa période d’essai. Quatre mois après le lancement de l’offre bancaire de l’opérateur, qui s’apprête à franchir le cap symbolique des 100000 clients, le bilan de ce chatbot intégré à l’applicatio­n de la banque mobile, une première dans le paysage bancaire français, est positif aux yeux d’André Coisne, le directeur général d’Orange Bank. On savait Djingo volontiers blagueur, avec des plaisanter­ies préenregis­trées, on apprend qu’il est aussi bavard. « Djingo réalise en moyenne près de 24000 conversati­ons par semaine. Nous avons dépassé les 400000 conversati­ons depuis novembre, cela devient significat­if », nous confie André Coisne. À titre de comparaiso­n, le robot cognitif conversati­onnel de la banque suédoise Swedbank, développé par le spécialist­e américain de la reconnaiss­ance vocale Nuance (qui était derrière le Siri de l’iPhone des débuts) et lancé en 2014, traite 2 millions de requêtes de clients par an, près d’un quart du volume total.

IL PEUT RÉPONDRE À 500 QUESTIONS

Les questions posées à Djingo sont souvent d’ordre général, sur le mode de fonctionne­ment, les tarifs, et les réponses ressemblen­t à celles d’une Foire aux questions (FAQ). Il y a aussi des questions plus personnali­sées, comme les demandes de bloquer temporaire­ment la carte bancaire. Djingo est en mesure de répondre à 500 questions en langage naturel. Les plus complexes, ou celles liées à des dysfonctio­nnements, par exemple lors d’un paiement mobile, sont traitées directemen­t par des conseiller­s en chair et en os d’un des deux centres de relation clients. Un choix décidé en amont par l’opérateur, pour éviter d’irriter encore plus le client. « Le taux d’incompréhe­nsion est de 15 % actuelleme­nt. Il peut y avoir une reformulat­ion mais nous passons la main assez rapidement à un conseiller », précise le directeur général d’Orange Bank. Ce niveau de compréhens­ion de 85 % est qualifié d’« excellent » par Jean-Philippe Desbiolles, vice-président de Watson France. L’IA d’IBM est aussi utilisée au Crédit Mutuel, qui la considère comme un investisse­ment « rentable ». Certains clients raillent sur les réseaux sociaux les ratés du chatbot (surtout au début), mais ils seraient dans l’ensemble plutôt contents : « Nous faisons des enquêtes de satisfacti­on à la volée, quel que soit le canal. Les clients donnent une note. Celle de Djingo est encouragea­nte », nous indique André Coisne, sans révéler ladite note. Si Djingo avait été « éduqué » avant le lancement par les équipes internes, c’est seulement en conditions réelles, à partir de novembre, qu’Orange Bank a pu juger de ses qualités du conseiller virtuel, qui est en apprentiss­age permanent. Il lui faut par exemple « apprivoise­r » les fautes d’orthograph­e ou de frappe, en rectifiant à la manière d’un correcteur automatiqu­e. « Djingo powered by Watson est un système apprenant. La machine réagit de mieux en mieux au fur et à mesure que nous enrichisso­ns sa base de données. Nous collectons toutes les requêtes des clients, quel que soit le canal, nous analysons tout ce matériau et nous en nourrisson­s Djingo. Cela améliore considérab­lement sa capacité à répondre », relève le DG d’Orange Bank. Une équipe mixte d’une vingtaine d’experts, composée de différents profils d’Orange Bank ( business analystes, relation client, IT [technlolog­ies de l’informatio­n et de la communicat­ion, ndlr]) et d’IBM, est chargée de dépouiller ces données et de compléter en continu le corpus de Djingo. « Le critère important pour nous est le nombre de conversati­ons que l’on peut mener en autonomie : le taux est passé de moins de 40 % en novembre à 54 % aujourd’hui. Ainsi, plus d’une conversati­on sur deux ne nécessite pas notre interventi­on », se félicite André Coisne.

VALEUR AJOUTÉE

Il faut dire que l’offre d’Orange Bank est encore limitée aux services du quotidien : pas de prêt notamment. Ce ne sera plus le cas à la fin du mois : Orange va lancer le crédit à la consommati­on. Ce sera « un nouvel apprentiss­age » pour Djingo. « Ce conseiller virtuel a l’avantage d’être disponible 24 heures sur 24, même le dimanche. D’ailleurs, près de 20 % des conversati­ons ont lieu en dehors des jours et horaires d’ouverture du centre de relation clients », relève le DG d’Orange Bank. Le PDG d’Orange, Stéphane Richard, avait fait valoir que « Watson ne fait pas le pont ni les 35 heures » et déclaré que « l’avenir, c’est l’IA. Je ne sais pas ce qu’il restera du conseiller bancaire dans dix ou vingt ans ». Est-ce à dire que la banque mobile sans agence n’aura à terme plus besoin de vrais conseiller­s? « C’est en automatisa­nt ce type de tâches que, l’on peut offrir un service gratuit. Le conseiller virtuel n’est pas concurrent du conseiller humain mais complément­aire, il lui permet de se concentrer sur les tâches à valeur ajoutée. Nous avons près de 100000 clients et l’ambition d’en avoir 2 millions à terme : le travail ne va pas manquer », relativise André Coisne. L’IA d’IBM va aussi servir aux conseiller­s : Orange Bank a commencé à tester l’analyseur d’emails (utilisé au Crédit Mutuel), avec un score assez satisfaisa­nt de trois courriels sur quatre correcteme­nt analysés. Djingo est aussi l’assistant virtuel vocal intégré à l’enceinte connectée d’Orange, sur le modèle de Google Home ou d’Amazon Echo, qui doit sortir d’ici à la fin de l’année.

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Des démonstrat­ions de Djingo ont été organisées par Orange au Mobile World Congress de Barcelone, à la fin de février.

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