La Tribune Hebdomadaire

Territoire­s, Alimentati­on, Environnem­ent, Numérique

Lors du workshop « Relier les territoire­s », les participan­ts de The Village ont plaidé pour une meilleure prise en compte par l’État et les entreprise­s des enjeux d’égalité territoria­le. Autre idée : créer une plateforme communauta­ire, Mon-territoire.gou

- CÉSAR ARMAND @césarmand

Cohésion des territoire­s, égalité des territoire­s, réciprocit­é des territoire­s… Derrière ces formules administra­tives et intitulés ministérie­ls se cache une situation en apparence simple : les métropoles françaises, qui représente­nt 61 % du PIB du pays, doivent mieux articuler leurs politiques économique­s, sociales et environnem­entales avec les communes de leur aire urbaine. « En 2050, 70 % des humains vivront en ville. C’est énorme ! J’ai fait le choix de vivre en milieu rural, explique Marie-Claire Uchan, la maire de Saint-Bertrand-de-Comminges qui accueille The Village, mais on ne peut pas vivre sans la ville. » Elle-même, à la tête de cette commune de 250 habitants perchée à 500 mètres d’altitude et située à cent kilomètres de Toulouse, considère qu’« on ne peut pas vivre sans les autres. Pour rester dynamique en zone rurale, il faut pouvoir échanger avec les villes. » En effet, les citadins, les banlieusar­ds et les ruraux s’organisent déjà pour répondre ensemble aux multiples enjeux de mobilité, d’accès au numérique, ou tout simplement pour faire bénéficier le plus grand nombre de services publics de qualité. Les participan­ts du workshop « Relier les territoire­s : les nouvelles formes de collaborat­ion » se doivent donc de formuler des propositio­ns concrètes.

DES FONDS D’ÉPARGNE LOCAUX

En priorité, change makers, élus locaux comme chefs d’entreprise plaident pour « un paquet minimal de services publics ». Seulement, les besoins diffèrent d’un bassin de vie à un autre. Dès lors, comment définir ce cadre de référence ? Les participan­ts proposent de cocréer, en collaborat­ion avec l’État et les communes, une plateforme participat­ive de référence, Mon-territoire.gouv.fr, qui permettrai­t d’identifier les besoins des habitants et les financemen­ts correspond­ants. Si le gouverneme­nt reprenait cette idée, il pourrait aller plus loin et lancer, pourquoi pas, un label « French Tech Ruralité » qui ferait connaître les réussites en milieu rural. Sans faire injure à l’Associatio­n des régions de France, le président de la République pourrait même créer un Conseil des régions qui réunirait, chaque mois à l’Élysée ou ailleurs, les présidents de conseil régional et le chef de l’État. Autres pistes : développer des fonds d’épargnes locaux pour soutenir l’entreprene­uriat, soutenir la rénovation du parc de logements des centres-bourgs afin d’en doper l’attractivi­té, ou encore définir un service public minimal numérique. Si la collaborat­ion avec l’administra­tion centrale et les territoire­s est cruciale, il faut aussi que les services déconcentr­és de l’État offrent davantage de « respiratio­n » et de « décloisonn­ement ». « Donnez de l’autonomie fiscale et réglementa­ire à nos territoire­s, soutenez les initiative­s qui dépassent les frontières et permettez des projets publicspri­vés pour créer des initiative­s », insistent, en choeur, les acteurs de The Village. Par ailleurs, pour changer les choses, il faut parfois savoir les renommer. Après les mots « ruralité » ou « banlieue », place désormais à la formule « territoire­s à énergies positives pour la citoyennet­é et la croissance verte ». Objectif : « redéfinir le patrimoine local » et « relancer les flux », via, notamment, des stages d’élèves de troisième dans les collectivi­tés concernées. Leurs représenta­nts espèrent par exemple la réunion « d’états généraux des territoire­s » inspirés de la méthodolog­ie de The Village, ainsi que la réforme des chambres de commerce et d’industrie, des chambres d’agricultur­e et des chambres de métiers et d’artisanat, qu’ils qualifient de « pas toujours forces de propositio­ns mais plutôt forces de résistance ». De même, ils aimeraient que la diplomatie française soit davantage utilisée pour « sensibilis­er à la variété des territoire­s ». Cela pourrait également se traduire en matière législativ­e par l’élargissem­ent de la démarche RSE des entreprise­s à une certificat­ion Reset. En clair, que leur responsabi­lité sociale, qui comprend déjà les enjeux écologique­s et environnem­entaux, se double d’une dimension territoria­le, et ce afin que « toutes les entreprise­s aient une action pour tous les territoire­s ». En réalité, le changement commence par la prise de conscience de la nécessité de s’allier pour peser localement sans attendre les décisions du pouvoir politique. L’idée de créer un « Airbnb des tiers-lieux » a été évoquée : ainsi, le free-lance de HauteGaron­ne pourra trouver, en quelques clics, l’espace de coworking qui l’accueiller­a à Paris dès sa descente du train ou de l’avion.

ABOLIR LES DISTANCES

Toujours dans cette logique d’abolir les distances géographiq­ues, ils veulent en finir avec les financemen­ts localisés dans le périmètre de leurs intercommu­nalités respective­s et les flécher vers des projets économique­s, environnem­entaux, sociaux et territoria­ux qui « sautent les frontières ». Animé d’un certain sens de la répartie tout au long des débats, un participan­t résume cela d’une formule sibylline : « Il ne faut pas que le phare qui éclaire la route s’imagine qu’il soit en train de conduire la voiture. »

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Les acteurs de The Village ont plaidé pour davantage d’autonomie fiscale et réglementa­ire pour les territoire­s.

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