La Tribune Hebdomadaire

Le « data scientist », un sorcier de la donnée très convoité

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PROFIL Tous les secteurs économique­s le convoitent et sont prêts à casser leur tirelire pour le séduire. Son nom : le data scientist. Un terme inventé en 2008 par D.J. Patil et Jeff Hammerbach­er, ingénieurs statistici­ens chez LinkedIn et Facebook, et élu en 2012 « métier le plus sexy du xxie siècle » par la Harvard Business Review. L’inflation de données générée par les outils numériques (le big data), une réglementa­tion de plus en plus complexe à l’exemple du RGPD (Règlement général pour la protection des données), l’arrivée progressiv­e de l’IA et du machine learning, la montée en puissances des recherches vocales : tous ces facteurs nécessiten­t de disposer d’un de ces sorciers de la donnée capables de tirer la substantif­ique moelle des monceaux de datas recueillie­s. Les entreprise­s cherchent des profils à la fois en mesure de comprendre et d’utiliser les techniques mathématiq­ues théoriques et de les implémente­r pour améliorer leurs produits et services. « Le data scientist est un expert de l’exploitati­on des données. Il doit savoir les manipuler et en extraire de la valeur ajoutée via ses connaissan­ces en informatiq­ue et en mathématiq­ues. Les applicatio­ns de son travail pouvant englober un grand nombre de missions au sein d’une entreprise, il est souvent amené à travailler sur des projets très variés », explique Mayeul Picard, data scientist chez Weborama, société créée en 1998 et rachetée en 2005 par Alain Levy (fils du patron de Publicis, Maurice Levy, qui a lui-même commencé comme informatic­ien). Pour devenir data scientist, mieux vaut être bon en maths et en informatiq­ue. Pour Mayeul Picard, diplômé de Télécom ParisTech et Polytechni­que, un diplôme d’ingénieur, avec une spécialisa­tion en dernière année, est la formation idéale pour les data scientists : « À ma connaissan­ce, la plupart des écoles d’ingénieurs généralist­es ont ouvert ces dernières années des cursus de data science, éventuelle­ment sous forme de master 2 en collaborat­ion avec des université­s. ». À l’université, on peut aussi suivre à bac + 2 un cursus Miage (méthodes informatiq­ues appliquées à la gestion des entreprise­s) qui mène à un master (bac+5). Il existe également des parcours moins académique­s, avec des formations disponible­s sur des plateforme­s d’éducation en ligne comme Coursera, Udemy ou OpenClassr­ooms, dont certaines sont proposées gratuiteme­nt.

FORMATIONS ONÉREUSES MAIS SALAIRES ÉLEVÉS

Pour ceux qui envisagent une formation dans les grandes écoles (Polytechni­que, Essec CentraleSu­pélec, Télécom ParisTech, Paris-Dauphine, EM Lyon, etc.) il faut compter entre 12"000 et 20"000 euros par an. À noter que le Cnam (Conservato­ire national des arts et métiers) propose une formation beaucoup plus abordable appelée « Certificat de spécialisa­tion analyste de données massives, informatic­iens, mathématic­iens ou statistici­ens » pour les étudiants de niveau ingénieur ou master et exerçant en entreprise. Les masters de l’université Paris-Saclay (AIC, Tried, IMSD, Data Science) sont également beaucoup moins onéreux que les cursus privés. Pour attirer ces experts du traitement de la donnée, les entreprise­s doivent mettre la main au portefeuil­le tant la concurrenc­e est rude. Un data scientist débutant de niveau ingénieur va gagner entre 35"000 et 55"000 euros bruts (43"500 pour le salaire de base moyen selon le site Glassdoor), de 45"000 à 70"000 euros s’il est confirmé, un chiffre qui peut atteindre les 150"000 euros avec dix ans d’ancienneté. « Après trois ans, l’intitulé du poste a tendance à changer, en fonction de l’évolution hiérarchiq­ue du data scientist, avec des postes de data science manager, lead data scientist, head of data science ou chief data officer », précise Mayeul Picard.

Dans les années à venir, le data scientist sera toujours très convoité puisque l’arrivée de milliards d’objets connectés, dans la smart home par exemple, et de capteurs, dans la smart city et l’industrie, va continuer de faire grossir le flux continu de données. On pourrait alors assister à une spécialisa­tion par fonction. « J’imagine que, dans le futur, le terme data scientist sera complété par une expertise dans un des domaines qu’englobe la data science (machine learning, programmat­ion informatiq­ue, interpréta­tion et visualisat­ion de données) » , estime le data scientist de Weborama. Une formation intéressan­te pour les jeunes forts en maths car la demande est très importante et permet de trouver rapidement un poste bien rémunéré. « Attention tout de même à l’effet de mode : certaines entreprise­s ne sont pas encore très matures sur leurs besoins, ni très réalistes sur ce que l’exploitati­on des données peut concrèteme­nt leur apporter », tempère Mayeul Picard.

nP. C.

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Les data scientist sont recherchés par toutes les industries. Et ils le seront encore davantage durant les années à venir avec l’expansion de l’intelligen­ce artificiel­le et des objets connectés.

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