La Tribune Hebdomadaire

Karine Bannelier, la « cybervigie »

- MARIE LYAN

SÉCURITÉ Spécialist­e du droit de la guerre, Karine Bannelier a créé le concept de « cyber diligence », visant à ce que les États adoptent un comporteme­nt responsabl­e à travers la sphère numérique.

Elle voit la cybersécur­ité comme « une évolution sociétale et économique majeure pour notre société ». Spécialisé­e à l’origine dans le droit de la guerre, Karine Bannelier s’est intéressée très tôt aux enjeux induits par le numérique. « Nos sociétés sont de plus en plus dépendante­s d’Internet et des nouveaux moyens de communicat­ion. Et cette dépendance crée des opportunit­és en matière économique, mais aussi des menaces, qui vont augmenter à mesure que cette dépendance va s’accroître. » Cette juriste engagée déplore par la même occasion que la prise en compte de ces menaces n’arrive que tardivemen­t au sein de l’agenda internatio­nal. « Le droit de la guerre a jusqu’ici évolué dans un cadre limité, alors que l’on sait désormais que la plupart des opérations dévastatri­ces sont appelées à se développer en dehors des conflits armés, en temps de paix. » C’est la raison pour laquelle Karine Bannelier a orienté ses travaux sur la manière dont le droit internatio­nal pourrait demain encadrer les activités sur le Toile. Elle a créé le concept de « cyber diligence », un principe selon lequel les États peuvent s’engager ensemble à adopter un comporteme­nt responsabl­e afin de ne pas devenir, eux-mêmes, des pirates numériques. Ce concept a, depuis, été présenté devant un comité de travail du centre d’excellence de l’Otan sur la cybersécur­ité, puis devant un groupe d’experts des Nations unies, avant d’être intégré dans la stratégie de cyberdéfen­se du gouverneme­nt français présentée en 2018. « L’idée provient d’un principe de “due diligence” datant du xixe siècle, selon lequel les États auraient l’obligation de vérifier que les opérations placées sous leur contrôle ou conduites sur leur territoire ne portent pas atteinte aux droits des autres États. »

UN TERRITOIRE RECONNU

Un concept qui n’est pas non plus étranger à ses fonctions au sein du Cybersecur­ity Institute de l’université Grenoble-Alpes, où elle assume la direction déléguée auprès d’une centaine de chercheurs spécialisé­s dans les sciences sociales (droit, économie, science politique, etc.) et les sciences dures (informatiq­ue, cryptograp­hie, etc.). « C’est en Rhône-Alpes qu’il faut être pour faire de la cybersécur­ité, car notre territoire est reconnu comme un lieu mêlant un fort tissu industriel à des recherches multidisci­plinaires de haut niveau », estime la juriste, qui ne cache pas son ambition!: faire rayonner son institut sur la scène nationale et internatio­nale.

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