Élisabeth Ayrault, la capitaine verte
ÉCOLOGIE Depuis 2013, Élisabeth Ayrault préside la Compagnie nationale du Rhône (CNR). À la tête de cette entreprise qui se présente comme le premier producteur d’énergie 100 % renouvelable, elle pilote la production électrique et l’aménagement du Rhône.
Traçant un parallèle avec la place des femmes dans la société – « c’est quand les entreprises se sont emparées du sujet que les choses ont évolué » –, la PDG de la CNR se dit « convaincue que les transformations passent par le monde de
l’entreprise ». Notamment dans la lutte contre le changement climatique. Selon elle, nombreuses sont les entreprises à percevoir la nécessité de s’adapter. Mais beaucoup ne parviennent pas à s’inscrire dans un temps long, accaparées par leurs objectifs et leurs contraintes à court terme. Élisabeth Ayrault se dit, elle, « chanceuse de travailler dans une entreprise qui ne produit que des énergies renouvelables » et qui peut
s’inscrire sur le long terme. Engagée, elle est pleinement impliquée dans sa mission et les valeurs de la structure qu’elle dirige. En regardant quelques années en arrière, elle se rappelle d’ailleurs avoir décliné un poste par souci de cohérence environnementale. « Un patron industriel m’avait proposé de venir travailler à ses côtés comme responsable du développement durable dans un très grand groupe… J’avais refusé en lui répondant que lui-même n’y croyait pas du tout », relate-t-elle.
CHANGER, ET VITE!!
Son rôle de PDG, Élisabeth Ayrault le voit comme celui d’un capitaine montrant le chemin et mobilisant les équipes pour l’atteindre. « Le cap est fixé pour transformer l’entreprise en harmonie avec les mutations
du monde qui nous entoure », résume-t-elle. À la direction de la CNR, Élisabeth Ayrault a développé d’autres énergies renouvelables que les seuls barrages hydroélectriques, tout en renforçant les actions liées à l’usage de l’eau. Certes, ce travail fait partie du contrat de concession avec l’État, mais les travaux sur la biodiversité ont connu un essor depuis quelques années. « Nous gérons
un fleuve vivant, souligne la PDG. Nous ne sommes pas là seulement pour pomper l’énergie qu’il peut offrir. C’est ce qui a été fait au cours du siècle dernier, nous devons aujourd’hui avoir du respect pour ce fleuve. » Cette responsabilité de maintenir le Rhône en vie rend fière Élisabeth Ayrault": elle songe au fleuve américain Colorado qui ne parvient plus à se jeter dans l’océan à certaines périodes de l’année, en raison des pompages intensifs… Le débit du Rhône diminuera dans les prochaines années en raison des changements climatiques. La CNR devra s’adapter à la nouvelle donne imposée par le réchauffement, un défi pour lequel bien des entreprises n’avancent pas assez vite au goût d’Élisabeth Ayrault. « Nous sommes dans une société où les gens n’ont pas envie de changer, précise-t-elle. La gestion du changement est la chose la plus difficile à faire dans une entreprise, alors dans un pays… » De ses échanges avec de nombreux dirigeants, elle tire un constat": ils ne sont pas différents de l’ensemble de la société française. « Ils sentent le problème, mais ils pensent aussi qu’il faudra le traiter plus tard, regrette-t-elle. Or, si cela doit bouger, cela doit se faire par les entreprises, et cela doit se faire maintenant#! »