La fintech française s’envole
LEVÉES Au premier semestre 2019, les startups de la finance ont levé 354 millions d’euros, selon KPMG, presque autant que sur l’ensemble de 2018, une année record. Un exploit qui s’explique par cinq tours de table supérieurs à 30 millions d’euros.
« C’
est un excellent
cru », commente d’emblée Mikaël Ptachek, responsable de la practice Fintech chez KPMG. D’après la dernière étude semestrielle Pulse of Fintech France, publiée mercredi 19 juin à l’occasion de l’événement Fin&Tech Community organisé par le pôle de compétitivité Finance Innovation, les startups tricolores de la finance ont levé 354 millions d’euros au premier semestre (le décompte s’étant arrêté le 10 juin dernier). « Les fintech françaises ont presque levé en un semestre ce qu’elles ont levé en un an en 2018 », résume cet expert. L’année dernière, les jeunes pousses de l’écosystème fintech avaient déjà enregistré un record, en levant 370 millions d’euros. Un montant en hausse de 15 % par rapport à 2017, où elles avaient levé 318 millions d’euros. Le cabinet KPMG n’est pas le seul à observer cet engouement des investisseurs pour les jeunes pousses de la finance. Le cabinet Klein Blue publie également Fintech Horizon, un panorama du secteur dénombrant 816 acteurs et 1,7 milliard d’euros levés en cumulé depuis la naissance de cet écosystème en 2010. « Nous pourrions finir l’année 2019 à 600 millions d’euros levés », projette Salim Echoukry, cofondateur du cabinet.
UNE PREUVE DE LA MATURITÉ DE L’ÉCOSYSTÈME
Ce nouveau record s’explique par cinq levées de fonds majeures, supérieures à 30 millions d’euros. Il s’agit du spécialiste de la digitalisation des points de ventes Wynd (72 millions d’euros), de la plateforme de crédits en ligne Younited Credit (65 millions d’euros), du spécialiste de la détection de la fraude à l’assurance Shift Technology (53 millions d’euros), du néo-assureur Alan (40 millions d’eu
ros) et de Lunchr qui dématérialise les tickets-restaurants (30 millions
d’euros). « Ce top 5 représente 73 % des fonds levés sur le premier semestre »,
souligne Mikaël Ptachek. « Nous assistons à un renforcement du financement de sociétés qui partent à la conquête de l’international. Certaines étaient cependant déjà implantées à l’étranger, comme Younited Credit ou Shift Technology », ajoute-il
« C’est la preuve de la maturité de l’écosystème. Des fintech qui ont d’abord réalisé des levées de fonds en amorçage, puis en série A, réalisent désormais des séries B de taille conséquente. Hormis Ledger [qui a levé 61 millions d’euros en janvier 2018, ndlr], nous n’avions pas vu d’aussi grosses levées de fonds dans la fintech française auparavant »,
commente Salim Echoukry. La startup Wynd, qui monte sur la première marche du podium et qui accueille à son capital Natixis (groupe BPCE), présente toutefois un profil atypique. Elle s’est développée en com
mercialisant une plateforme de prise de commandes adaptée aux différents canaux de ventes. Donc, a priori, loin du secteur de la finance. « À l’origine, c’est une startup qui s’adresse aux acteurs du retail, mais il y a une très forte dimension de paiement au coeur de sa dernière levée de fonds », justifie Salim Echoukry.
UN TICKET MOYEN DE 9,1 MILLIONS D’EUROS
Concrètement, Natixis va ajouter une brique de paiement à la plateforme de gestion de flux logistiques de Wynd qui permettait déjà aux commerçants d’opérer selon de nouveaux schémas de ventes, comme le Click and Collect (commande en ligne et retrait en magasin) ou encore la transformation des magasins en entrepôt pour l’e-commerce. Grâce à ce partenariat, l’entreprise Marie Blachère (600 boulangeries et épiceries) cliente de Wynd, va pouvoir lancer une solution de pré-commande des repas. « Le client pourra régler son repas lors de la pré-commande en ligne. Lorsqu’il viendra le récupérer en boutique, il pourra ajouter d’éventuels produits supplémentaires qui seront automatiquement facturés sur sa carte bancaire sans avoir à repasser en caisse », nous détaillait Ismaël Ould, cofondateur et dirigeant de Wynd. Conséquence de ces levées de fonds significatives, le ticket moyen investi dans les fintech françaises gonfle sensiblement pour atteindre 9,1 millions d’euros, contre 5 millions d’euros au semestre précédent, selon l’étude de KPMG. En parallèle, les investissements en amorçage et en série A se multiplient avec 26 opérations inférieures à 3 millions d’euros, décomptées au cours des six premiers mois de l’année. n