La Tribune Hebdomadaire

Kyriba, une première licorne... francoamér­icaine

SUCCÈS L’écosystème fintech français est foisonnant mais peine à faire émerger des entreprise­s valorisées plus d’un milliard. A l’exception de Kyriba, une américaine aux liens très étroits avec la France.

- DELPHINE CUNY

« Ça y est ! On a notre première licorne": Kyriba"! » Alain Clot, le président de France Fintech, ne cachait pas sa fierté lors de la soirée d’été de l’associatio­n profession­nelles des startups de la finance, mercredi 19 juin. Editrice de logiciels de gestion de trésorerie, la discrète Kyriba a annoncé fin mars un tour de table de 160 millions de dollars ce qui la valorise à 1,2 milliard de dollars, la faisant ainsi entrer dans le club des « licornes ». Mais Kyriba n’est pas tout à fait française!: son siège social se trouve à San Diego, en Californie, et elle possède « des bureaux à New York, Paris, Londres, Tokyo, Dubaï », précise-t-elle dans sa communicat­ion. Ses liens avec l’Hexagone sont multiples!: elle est née en France en 2004 comme un spin off de l’éditeur de logiciels financiers XRT racheté par le britanniqu­e Sage. Son principal centre de R&D est à SaintCloud, près de Paris, où elle emploie environ un tiers de ses 650 collaborat­eurs. Son PDG, Jean-Luc Robert, et une partie des dirigeants sont français, tout comme certains grands clients (Auchan, LVMH, Yoplait). Le fonds français Iris Capital fait partie de ses actionnair­es, et c’est l’équipe française du fonds de private equity Bridgepoin­t qui a mené l’opération de mars dernier. En incluant Kyriba, France Fintech fait valoir que l’écosystème français a levé « plus de 500 millions d’euros au premier semestre 2019 ». Sur la quarantain­e de licornes fintech recensée par CB Insights, cabinet de référence sur les levées de fonds de startups, à la fin du premier trimestre 2019, on trouve une dizaine d’européenne­s, essentiell­ement des britanniqu­es comme OakNorth (prêts aux PME) ou les néobanques Revolut et Monzo, une allemande (N26) et une suédoise (Klarna) mais

aucune française. Kyriba n’y figure pas encore mais CB Insights ne la classe pas comme une fintech française. Si les tickets moyens ont augmenté, et les tours de table de plusieurs dizaines de millions d’euros se font plus fréquents, les startups françaises de la finance n’ont pas décroché de méga-levée à neuf chiffres qui va généraleme­nt de pair avec une valorisati­on milliardai­re. « La fintech française va mieux, en termes de montants de levées de fonds, mais quand on regarde la course à l’armement au niveau mondial, ce que lèvent les Chinois et les Américains, elle reste petite », a constaté Ben Marrel, associé-fondateur du fonds de capital-risque Breega Capital, actionnair­e du fran

« Quand on regarde ce que lèvent les Chinois et les Américains, la fintech française reste petite » BEN MARREL,

ASSOCIÉ-FONDATEUR DE BREEGA CAPITAL

çais Lemon Way et du belge iBanFirst, lors d’une table ronde de Fin&Tech Community le 19 juin. Rien qu’au premier trimestre, l’ensemble des startups de la finance ont levé 6,3 milliards de dollars dans le monde, dont 1,7 milliard en Europe selon CB Insights.

« L’écart sur la taille des tours de table s’explique par un décalage du marché de la fintech française de deux ou trois ans par rapport au marché britanniqu­e. Outre-Manche, les pépites de la finance se sont créées plus tôt, vers 2012, tandis qu’une startup comme Alan est née en 2016 », analyse Mikaël Ptachek, du cabinet KPMG. Il est certain que l’écosystème français peut engendrer une « licorne », soulignant le potentiel des cinq entreprise­s ayant levé plus de 30 millions. Certaines sont déjà des « demi-licornes » (valorisées plus de 500 millions) selon plusieurs sources du secteur.

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[ISTOCK] L’éditrice de logiciels de gestion de trésorerie, née en France et basée à San Diego, est valorisée à 1,2 milliard de dollars.

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