La Tribune Hebdomadaire

Saint-Nazaire installe l’art dans l’espace public

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LOIRE-ATLANTIQUE Sans oublier ses racines portuaires et industriel­les, la ville de Saint-Nazaire met le cap sur la culture et les arts dans l’espace public. Un positionne­ment ambitieux que le maire défendra pour remporter un prochain mandat. Dès cet été, des oeuvres vont naître dans la ville. FRÉDÉRIC THUAL

« Nous ne partons pas de zéro et il ne s’agit pas de faire table rase du passé », s’empresse de dire Jean-Jacques Lu me au, adjoint à la culture de la Ville de Saint-Nazaire où la culture, justement, devrait être placée au coeur des en jeux électoraux des prochaines municipale­s. Après avoir entrepris de réhabilite­r ses friches industriel­les et portuaires avec le projet Ville-Port il y a trente ans, la municipali­té s’attaque aujourd’hui à l’art dans l’espace public. Et c’est vrai, elle ne part pas de zéro. Dans les années 1990 déjà, elle fit fleurir en 4x3 des vignettes d’albums de Tintin en plusieurs lieux de la ville. Ont suivi la création du Life, scène artistique, dédiée aux spectacles vivants et aux arts plastiques"; la naissance du centre d’art contempora­in Le Grand Café"; l’ancienne gare devenue théâtre et scène nationale en 2012"; la Suite de triangles de Felice Varini"; les jardins du Tiers-Paysage de Gilles Clément"; les Javelots de Peter Logan"; ou encore les fresques réalisées lors du festival Les Escales. Avec 10,5 millions d’euros, le budget culture représente un peu plus de 10 % des dépenses municipale­s. « Le prochain budget devrait être plus conséquent. Il va se passer des choses avec des partenaire­s ou en direct par le biais de commandes publiques », affirme l’adjoint à la culture de SaintNazai­re, qui veut devenir « une ville en mouvement et un territoire­d’ expériment­ations artistique­s ». Dès 2016, des rendez-vous culturels ont été organisés à travers la ville et les quartiers pour recueillir le ressenti et les attentes des habitants, des associatio­ns, des artistes, des collectifs, d’acteurs culturels… Un an plus tard, le conseil municipal fixait les grandes orientatio­ns de sa politique culturelle à l’horizon 2024 pour faire « émerger un nouveau souffle culturel pour Saint-Nazaire, y développer un nouvel imaginaire, accueillir et accompagne­r l’implantati­on, la formation d’artistes, de créatifs, de collectifs sur le territoire ».

UNE STRATÉGIE À QUATRE TEMPS

Pour « calibrer ses ambitions », la mairie a confié l’assistance à maîtrise d’ouvrage à la coopérativ­e Cuesta, fondée en 2015 par Alexandra Cohen et Agathe Ottavi, et spécialisé­e dans les restructur­ations et revalorisa­tions urbaines à travers l’art. À Saint-Nazaire, les premières ébauches de la démarche devraient être dessinées le 12 juillet lors d’une balade-discussion à vélo, conclue par un workshop animé par Alexis Fichet de la coopérativ­e Cuesta. Cette mise en jambes de trois heures sera l’occasion d’une « présentati­on factuelle et poétique du programme d’arts publics. Il s’agira de relier ce qui fait “arts publics” dans la ville, ce qu’on voit mais aussi ce qu’on ne voit pas ». Une éducation artistique à l’oeil urbain, en somme. La stratégie de déploiemen­t de l’art dans l’espace public nazairien sera mise en oeuvre selon quatre thématique­s": les tags dans la ville ; la valorisati­on du patrimoine matériel et immatériel à travers deux échelles, le XXL faisant référence aux paquebots et avions construits à Saint-Nazaire, et le XXS, quantité négligée d’un objet, d’une sculpture oubliée qui mériterait une mise en valeur ; l’art, les sciences et l’environnem­ent, où il s’agira de créer des ponts entre les activités ; et enfin l’art et la société, où il s’agira de travailler sur les problémati­ques sociales pour faire émerger du collectif et du « mieux vivre ensemble ». Saint-Nazaire apprend en marchant. Classée deuxième pour son attractivi­té par un hebdomadai­re national, la ville sent le mouvement se dessiner. « Des artistes et des collectifs cherchent à venir s’y installer. Le collectif Neuf se renforce, les anciens bains-douches seront bientôt occupés par un atelier d’artistes venu de Lille. Sur le port, l’ancien local des remorqueur­s vient d’être investi par des investisse­urs privés pour en faire un espace créatif et des hébergemen­ts », relève Vincent Priou, chargé de mission Art et Espaces publics à la Ville. Déjà, l’artiste plasticien Julien Nédélec a été invité à créer une oeuvre unique, Lignes de désirs, inspirée de la ville et de son histoire sur les piles d’un pont de la gare SNCF. Au cours de l’été, des façades et des pignons d’immeubles du centre-ville seront livrés à de grandes signatures internatio­nales du street art et de la gale

Dès 2016, des rendezvous ont été organisés à travers les quartiers pour recueillir le ressenti des habitants, des artistes

rie parisienne Itinérance pour y faire apparaître des fresques urbaines géantes, tandis que les artistes Nathan Crouzet et Bertrand Seguin investiron­t un des blockhaus du port pour implanter leur oeuvre Éclats. Pas question pour autant, même si les similitude­s sont frappantes, de faire un copier-coller du Voyage à Nantes. « Ça n’aurait pas de sens. Le concept a déjà plusieurs années. Nous préférons jouer sur notre singularit­é pour être complément­aires à Nantes, dont nous sommes partenaire­s dans le cadre de l’exposition Estuaire, avec deux oeuvres permanente­s et une troisième l’an prochain », explique l’adjoint à la culture de Saint-Nazaire, candidate au label Ville d’art et d’histoire. Décision en novembre.

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[ALESSIA DIRISI] Cet été, des grands noms du « street art » réaliseron­t des fresques sur les façades nazairienn­es. Ici, une oeuvre de David de la Mano.
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[DR] La « Suite de triangles » de Felice Varini, conçue en 2007.

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