La connectivité, planche de salut pour les constructeurs!?
Les Gafa vont-ils faire main basse surl’automobile!? L’arrivée de la connectivité dans l’universautomobileinquiète les constructeurs, obligés de s’allier avec ces géants du numérique et de la data. L’émergence de tout un écosystème de services dans l’automobile pourrait sérieusement redistribuer la chaîne de valeur de l’automobile. Si l’électrification est le défi des cinq prochaines années, elle se fera surtout sous la pression de l’opinion publique et des réglementations. La connectivité, elle, représente un enjeu plus stratégique. Qui des Gafa (entendu au sens large, c’est-àdire toutes les sociétés numériques liées aux contenus tels que Netflix, Spotify, ou d’autres fournisseurs de services Internet) ou des constructeurs s’imposera dans ce domaine.
UN ÉCOSYSTÈME PRESQUE UTOPIQUE
Pour l’heure, les premiers ont marqué plusieurs points. GoogleetAppleontdéjàconquis l’interface de la plupart des constructeurs à travers Android Auto pour le premier et CarPlay pour le second. À travers cette interface, les deux géants de l’informatique et de l’Internet ont fait de l’automobile le prolongement naturel de leur smartphone (ou de leur système d’exploitation dans le cas de Google). Répertoire téléphonique, musique, messagerie, cartographie… Chez certains constructeurs, on retrouve même des assistants vocaux comme chez BMW où Alexa d’Amazon est désormais intégré dans certaines gammes. Dès lors, les Gafa ont posé les fondations d’un écosystème de services de connectivité dans Le temps passé par les Français au volant devrait être consacré à consommer des services si la voiture devenait totalement autonome. les véhicules du futur. Pour beaucoup, cet écosystème pourrait devenir la première source de valeur de la voiture de demain. Et si les Gafa remportent la guerre, ils risquent de reléguer les constructeurs à la condition de simples assembleurs à l’image de Foxconn, le fabricant taïwanais d’iPhone pour le compte d’Apple. Dans ce dernier exemple, c’est bien Apple qui dégage de la valeur, et pas Foxconn…
Les Gafa qui avaient tenté de réinventer eux-mêmes l’automobile en préparant les plans d’une Google Car ou d’une Apple CarPlay se sont vite rendus compte que le process industriel d’une voiture est infiniment plus complexe que celui d’un téléphone, et qu’ils ne disposent pas de cette expertise. En réalité, l’écosystème de services imaginé par les Gafa est très ambitieux, presque utopique. Les chercheurs de la Silicon Valley veulent mettre la main sur le temps passé dans une voiture pour vendre des contenus. Ils parient sur l’émergence de la voiture autonome pour faire de la voiture le réceptacle de tous leurs contenus. Regarder une série, envoyer des mails, une visioconférence. Tous ces services pourraient être « consommés » durant un trajet en voiture : plus de sept heures par semaine en France, selon une étude Ipsos/ Boston Consulting Group publiée en avril 2017. Mais pour récupérer ce précieux temps de trajet, il faut passer en mode totalement autonome…
Or, de plus en plus d’acteurs s’interrogent sur la réalité d’un tel scénario. En avril dernier, Anne-Marie Idrac, haute représentantepourledéveloppement des véhicules autonomes, avait averti dans nos colonnes : « l’hypothèse d’une voiture totalement autonome, en toutes circonstances, par tous les temps, ne verra probablement jamais le jour [...] Arrêtons de rêver de technologies hors-sol » ( La Tribune du 26 avril). Du coup, les Gafa pourraient être nettement moins intéressés… Mais il reste encore toute la partie data à préempter, et là aussi, c’est la course folle. Les constructeurs tentent de se positionner sur ce segment. Ils ont inventé des services dédiés et espèrent monétiser cette précieuse ressource, notamment à travers des services non pas de contenus cette fois, mais de mobilités. BMW et Daimler semblent avoir pris une l ongueur d’avance en fusionnant leurs filiales respectives consacrées aux mobilités. Chez PSA, on cherche aussi la bonne formule à travers Free2Move qui s’est désormais installé dans la voiture en libre-service dans plusieurs grosses agglomérations comme Paris, Wuhan ou même Washington. De son côté, Renault tente de s’imposer dans les VTC avec plusieurs solutions. Mais le modèle semble encore précaire, selon les observateurs, tant il semble encore difficile de gagner de l’argent sur ces services. « Si quelqu’un a la réponse du modèle de demain, je veux bien le rencontrer », déclarait, il y a peu encore, un grand industriel automobile...
« Si quelqu’un a la réponse du modèle de demain, je veux bien le rencontrer »
UN GRAND INDUSTRIEL AUTOMOBILE NABIL BOURASSI « Bernard Favre : “La voiture autonome n’arrivera pas avant 2040” »
« Voiture autonome : la stratégie de la France tient-elle la route ? »
« Anne-Marie Idrac : “Arrêtons de rêver de technologies hors-sol” »
« Recharge par induction, l’avenir de la voiture électrique ? »
« Avec AEX, Renault prépare la riposte aux Gafa sur les contenus embarqués »
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