La Tribune Hebdomadaire

Andrew Yang, candidat des « techies »!?

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Du clip « pour sa campagne de réélection, , utilisé par Ronald Reagan

It’s morning again in America »

au « Yes we can » scandé par Barack Obama en 2008, les candidats américains à la présidenti­elle misent en général sur des messages porteurs d’espoir pour ravir le coeur des électeurs. Mais, devant son public de fans coiffés de casquettes « MATH » (pour «make America think harder » ) qui brandissen­t des pancartes « Yang Gang », Andrew Yang, candidat à l’investitur­e démocrate, emploie une tout autre rhétorique. Un rallye après l’autre, il souligne les risques qu’intelligen­ce artificiel­le et automatisa­tion font peser sur l’emploi, évoquant notamment les 3,5 millions d’Américains qui travaillen­t comme conducteur­s de camions, et que le véhicule autonome pourrait bientôt mettre au chômage.

Un désastre économique et social qui entraînera­it également un cataclysme politique. Yang, qui aime se définir comme « l’opposé de Trump, un Asiatique qui aime les maths », souligne ainsi que les États qui ont permis au président de l’emporter en 2016 sont principale­ment situés dans la « Rust Belt », ancien coeur industriel du pays. Pour éviter que l’automatisa­tion de masse ne conduise à une dystopie politique, il propose la mise en place d’un revenu de base universel (rebaptisé « freedom dividend », terme plus vendeur) de 1#000 dollars par citoyen.

Un discours qui fait écho aux thèses défendues de longue date dans la Silicon Valley,

où le candidat bénéficie d’une certaine popularité. Elon Musk, Jack Dorsey (CEO de Twitter) et Sam Altman (fondateur du Y Combinator) lui ont apporté leur soutien. Un rallye tenu à San Francisco en mars dernier a rassemblé plus de 3#000 supporters enthousias­tes, et de nombreux groupes de fans se sont formés dans la région. Si Andrew Yang y bénéficie d’une certaine aura, c’est parce qu’il colle bien avec l’idéologie californie­nne, définie par Richard Barbrook et Andy Cameron, dans un essai paru en 1995, comme un mélange d’idées de gauche et de droite, au service d’un libéralism­e mâtiné de solutionni­sme technologi­que.

Issu de la société civile et fraîchemen­t débarqué en politique, Andrew Yang défend ainsi plusieurs mesures qui dépassent les clivages traditionn­els. Outre le revenu universel, il soutient la légalisati­on du cannabis et la taxe carbone. Plutôt que de faire vibrer la corde émotionnel­le, il cite des chiffres à la pelle et prône une approche « data oriented » , qui séduit les geeks de la vallée. Le fait que, contrairem­ent aux ténors du parti démocrate, il ne plaide pas pour le démantèlem­ent des GAFA joue aussi en sa faveur. Enfin, son discours sur l’automatisa­tion résonne avec l’idée selon laquelle le progrès technologi­que serait inévitable, ciment de l’idéologie californie­nne. Avec seulement 2#% d’intentions de vote, Yang a peu de chances d’emporter l’investitur­e. Mais celui qui n’était il y a encore un an qu’un illustre inconnu s’est d’ores et déjà imposé comme l’une des surprises des primaires démocrates.

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