La Tribune Hebdomadaire

« Il y a un “produit du bonheur brut dans les villages” à inventer »

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RURALITÉ

La voix des villages de France livre son regard sur les « gilets jaunes » et les municipale­s 2020.

LA TRIBUNE – Quel message souhaitez-vous faire passer aux maires dans la perspectiv­e des municipale­s de 2020"?

STÉPHANE BERN – Il faut faire comprendre aux maires que le patrimoine n’est pas un luxe mais une nécessité. Ce n’est pas un coût mais un investisse­ment pour le développem­ent touristiqu­e de leur village. S’ils veulent doper l’économie de leur commune et développer l’attractivi­té du territoire pour les entreprise­s et pour l’emploi, il est important de défendre le patrimoine. De plus, le patrimoine est aussi créateur de richesses et d’emplois. Les pierres nourrissen­t les hommes et les femmes.

Êtes-vous davantage concerné par la fracture entre Paris et les territoire­s ruraux depuis les « gilets jaunes »"?

Oui, je suis très frappé par cette fracture. Mais je n’ai pas attendu la crise des « gilets jaunes » pour m’en préoccuper. J’ai le sentiment que lorsque je suis à Paris, on considère que j’ai un cerveau et dès que j’arrive dans le Perche, je suis sensibleme­nt moins bien traité : je ne peux plus téléphoner car je n’ai plus de réseau mobile, et je suis obligé de prendre ma voiture. Tout devient ridicule. J’ai aussi l’impression que ce que je mange est moins bon. J’ai pris conscience de ce fossé qui s’est creusé entre la ville et la campagne, alors que je me sens plus heureux dans cette dernière. Il faut peut-être arrêter d’envoyer les gens dans les périphérie­s des grandes villes où ils seront malheureux. Il serait peut-être judicieux de les inciter à comprendre que l’on peut aussi créer de la richesse, du bonheur et du bienêtre à la campagne… Il y a un « produit du bonheur brut dans les villages » à inventer. On se sent mieux à la campagne.

Les offres d’emplois sont pourtant moindres, que répondez-vous aux jeunes en recherche de travail"?

Le travail ne manque pas. Il y a beaucoup d’emplois qui sont en train de se créer mais on n’a pas encore les formations et les compétence­s. Or il y a l’argent pour former les gens. Il faut donc accepter de se former mais aussi d’embrasser la mobilité. C’est pour cela que j’incite les gens à acheter des longères à retaper plutôt que des lotissemen­ts qui ne vaudront plus rien dans quelques années. On revend beaucoup mieux une longère située dans les centres-bourgs.

nPROPOS RECUEILLIS PAR JEANNE DUSSUEIL

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