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SÉCHERESSE Face à l’épuisement des ressources hydriques, acteurs publics comme privés se mobilisent pour trouver des solutions de stockage et surtout pour réduire la consommation. Les agriculteurs sont les premiers concernés.
En plus d’être le titre d’un roman de science-fiction datant de 1989, « l’or bleu » est une expression qui devrait prendre de plus en plus de sens au fil du temps pour évoquer la raréfaction de l’eau liée au réchauffement climatique… De fait, le bassin Adour-Garonne (territoire du SudOuest français) affiche déjà un déficit annuel de 250 millions de mètres cubes en eau. « En 2018, nous avons reversé dans la Garonne environ 51 millions de mètres cubes d’eau provenant de nos réserves hydroélectriques. À l’heure actuelle, nous lâchons pas moins de 10 mètres cubes par seconde, qui passent dans le fleuve » , commente Jean-Michel Fabre, vice-président du conseil départemental de Haute-Garonne chargé de l’Environnement. D’ici à 2050, ce déficit est même estimé à 1,2 milliard de mètres cubes si rien n’est fait pour préserver cette ressource. Et le rapport Climator, réalisé par l’Agence nationale de la recherche et l’Institut national de la recherche agronomique (Inra), prévoit des baisses sensibles et croissantes de l’humidité des sols dès les années 2020.
Preuve de l’importance de cette question, les Régions Occitanie et Nouvelle-Aquitaine, la préfecture d’Occitanie et le Comité de bassin Adour-Garonne ont instauré en avril 2018 un « G4 » autour de l’eau. En plus des acteurs cités, cette mission de préservation de l’or bleu et de son économie concerne aussi la filière agroalimentaire à sa base, à savoir les agriculteurs.
ASSOCIER LES PRODUCTEURS LOCAUX
En Occitanie, une exploitation sur quatre a recours à l’irrigation, selon la direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (Draaf), ce qui représente environ 17%000 structures. Parmi elles, plus de 10%000 exploitations sont dépendantes économiquement des disponibilités en eau pour sécuriser leur production. Le Département de Haute-Garonne a donc souhaité associer les producteurs locaux dans le cadre de sa mission « Garonne Amont ». « À travers cette appellation, on se situe dans une démarche de projet de territoire, où nous nous posons la question de ce qu’on pourrait faire pour notre département dans les décennies à venir concernant la ressource en eau. Les retenues d’eau sont une hypothèse parmi d’autres » , explique Jean-Michel Fabre. En déplacement dans la région le 27 août, la secrétaire d’État auprès de la ministre chargée de la Transition écologique et solidaire, Emmanuelle Wargon, a d’ailleurs précisé qu’une douzaine de lieux étaient étudiés en Occitanie, dans lesquels il serait possible de réaliser une retenue d’eau. Pour étudier cette possibilité ainsi que d’autres dans l’optique d’économiser l’eau, le conseil départemental a réuni un panel citoyen de 30 personnes. Ce groupe de travail vient de rendre son rapport, qui sera présenté officiellement à la mi-octobre. « L’un des points majeurs de leur approche est que,
« En Occitanie, plus de 10"000 exploitations sont dépendantes économiquement des disponibilités en eau pour sécuriser leur production »
les agriculteurs à faire mieux que leurs voisins en termes de consommation d’eau », explique Arnaud Reynaud, directeur de recherche au sein de l’Inra, qui a piloté ce projet. Ce dernier a mobilisé environ 200 agriculteurs, tous basés autour des bassins de la réserve de Neste, contre un financement d’un peu plus de 200%000 euros apportés totalement par la Région Occitanie, pour des résultats prometteurs. « En moyenne, nous n’avons pas réussi à modifier les habitudes d’irrigation de ces agriculteurs. Néanmoins, pour ce qui est des gros consommateurs, nous avons constaté une diminution de quelques pourcents de leur consommation. De plus, ces compteurs communicants ont permis de détecter des fuites importantes dans le système de distribution », décrypte le chercheur. Un sondage est actuellement mené au niveau national pour savoir si les agriculteurs sont prêts à s’équiper d’un tel dispositif et si oui, quel financement ils sont prêts à y consacrer. Pour le moment, quelques centaines d’exemplaires de Calypso à peine sont en service.
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