La Tribune Hebdomadaire

De la fermeture à la seconde vie d’un site industriel

-

Fermer un site industriel victime d’une explosion ou d’un incendie est possible, mais d’un point de vue économique, il vaut mieux lui donner une seconde vie plutôt que de tout détruire.

Que ce soit un incendie, comme à Rouen avec Lubrizol, ou une explosion, comme à Toulouse en septembre 2001 avec AZF, l’État a la responsabi­lité de gérer tout site industriel en proie à un accident majeur. Ainsi, dès le 26 septembre, la préfecture de Seine-Maritime a mandaté Valgo, une entreprise spécialisé­e dans la dépollutio­n et la reconversi­on des friches, déjà au travail sur l’ancien site de Petroplus à deux kilomètres de là. « Des produits chimiques dangereux qui n’ont pas brûlé s’épandent sur le sol et tombent dans l’eau, explique François Bouché, PDG et fondateur du groupe. Nous avons donc installé un filet sur la Seine de même que nos camions ont aspiré une grosse partie des huiles à la surface. Ces dernières ont ensuite été transférée­s dans nos cuves de Petroplus. » Après cette étape de stockage, l’eau polluée est filtrée dans une station d’épuration. Puis, si les prélèvemen­ts sont conformes aux normes sanitaires, l’eau peut être réinjectée dans le fleuve. Une fois ces travaux urgents, dits de mise en sécurité, réalisés, vient le temps du désamianta­ge, de la déconstruc­tion voire de la vente du terrain. « Ces sites construits dans les années 1950-1970 ont développé une logique urbaine qui fait qu’ils se situent à proximité des zones de population, relève le patron de Valgo. En outre, ils se trouvent souvent au carrefour de routes et de réseaux électrique­s. » Car réinvestir un site existant et le reconverti­r vers de l’industrie plus propre est à la fois plus facile techniquem­ent – des infrastruc­tures existent déjà – et financière­ment. « Sur l’étang de Berre, à Marseille, nous avons conservé les bureaux et les entrepôts, raconte François Bouché. Nous essayons de réutiliser au maximum. » À l’inverse, partir d’une terre agricole est à la fois plus cher et moins écologique – « l’empreinte de l’artificial­isation des sols est catastroph­ique » – mais aussi plus long, entre les enquêtes publiques, les recours des riverains et les procès. Quelle que soit la nature de l’opération, elle doit s’accompagne­r de discussion­s techniques et juridiques avec les autorités locales. Sans oublier les voisins auprès de qui la pédagogie s’avère nécessaire, que ce soit avec des panneaux d’indication ou des photos déclinant les différente­s étapes. « Il faut rassurer et informer, travailler avec les organisati­ons environnem­entales, les associatio­ns de quartier », liste ainsi le patron de Valgo. Le pouvoir politique encourage même les acteurs privés à se saisir de ces sites abandonnés et/ou potentiell­ement dangereux. Publié en 2017, un décret du projet de loi Alur permet par exemple au vendeur – le plus souvent, le pollueur – de transférer le passif à son acheteur. « C’est du confort qui a été donné, estime encore François Bouché. Tout cela peut être utile si l’on veut arrêter de désindustr­ialiser la France. »

Newspapers in French

Newspapers from France