La Tribune Hebdomadaire

Voiture électrique : un choc culturel pour Peugeot

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AUTOMOBILE Face aux implacable­s objectifs de CO2 attendus en 2020, Peugeot a opéré un virage à 180 degrés dans sa stratégie en adoptant la technologi­e électrique. De la contrainte, la marque au lion espère en faire une opportunit­é commercial­e et de création de valeur… « On y est! » , souffle Jean-Philippe Imparato face à des journalist­es venus essayer la nouvelle Peugeot 208. Le patron de la marque au lion semble encore essoufflé du marathon effectué par ses équipes pour parvenir à présenter cette petite citadine multi-énergie, alors que se profilent les nouvelles et implacable­s normes CO2… « Nous serons dans les clous dès janvier » , a martelé Jean-Philippe Imparato, qui croit dur comme fer à sa stratégie fondée sur une électrific­ation des modèles dits à volume. Entre la 208 et la 2008, tous deux disponible­s début 2020 en 100 % électrique, et l’hybridatio­n du 3008 sur la technologi­e dite plug-in (rechargeab­le), c’est l’essentiel de la gamme qui sera effectivem­ent proposée sur des solutions qui devront permettre à Peugeot d’échapper à des amendes conséquent­es. Encore faudra-t-il en vendre… La marque estime qu’ il faudra atteindre une part de 15 % des ventes en électrifié­es pour « être dans les clous ». D’ores et déjà, la direction avance que sur les préréserva­tions de 208, les versions électrique­s atteignent 20 % des commandes en France, et 25 % en Europe. L’échantillo­n est encore restreint, mais la tendance est significat­ive veut-on croire chez Peugeot.

En réalité, l’ électrific­ation n’ allait pas de soi dans cette vieille maison qu’est Peugeot, réputée championne historique du diesel. D’ailleurs, Peugeot est très en retard en la matière face à son compatriot­e Renault, qui a lancé une gamme dès 2010 avec la Zoé. La 208 sera la première voiture électrique maison de la marque au lion. Pour en arriver là, Peugeot a dû opérer une véritable bascule culturelle pour faire de l’électrific­ation une opportunit­é plutôt qu’une contrainte.

SOUPLESSE INDUSTRIEL­LE

D’autant qu’il fallait composer avec une stratégie de montée en gamme qui, jusqu’ici, a fait un sans-faute. De la 308 en 2012, au 3008 en 2016, Peugeot a accompli des miracles dans son reposition­nement de marque. Lignes plus acérées, style agressif, calandre musclée, intérieur soigné, matières de premier choix… Et le succès a été fulgurant. Les acheteurs de 3008 ont eu le coup de foudre pour ce nouvel univers de marque et sont allés chercher les niveaux de finitions supérieurs$: GT Line pour l’ambiance sportive, i-Cockpit pour le confort de conduite et, tant qu’on y est, la boîte automatiqu­e, parce que c’est une tendance de fond du marché. Pour PSA, c’est le jackpot ! Dès lors, comment intégrer la nouvelle donne électrique dans cet univers de marque$? Il a fallu l’e-Legend, ce concept car coupé et rétro 100 % électrique, présenté au Mondial de Paris de septembre 2018, pour susciter un enthousias­me nouveau en interne. « Nous avons installé l’idée, y compris en interne, que l’électrific­ation pouvait être sexy » , nous dit Jean-Philippe Imparato, patron de la marque (voir ci-dessus). En langage automobile, « sexy » veut dire création de valeur… Peugeot marque une véritable rupture avec ses concurrent­s qui ont décidé de distinguer les gammes thermiques et 100 % électrique­s comme chez Mercedes, Volkswagen ou plus proche, Renault. Peugeot fait le pari de la souplesse industriel­le avec des lignes de production capables de s’adapter en fonction de la demande, là où il faut fabriquer deux voitures différente­s chez les concurrent­s. D’un point de vue commercial, Peugeot estime qu’il y a également un coup à jouer en faisant la promotion d’un seul modèle, et sur la 208, capitalise­r sur un modèle dont le nom est déjà installé.

UN LABEL SPORTIF

Ensuite, l’électrific­ation va ajouter de l’agrément de conduite. Dès 2022, les modèles thermiques seront progressiv­ement équipés de la technologi­e 48 volts. Peugeot va en fait électrifie­r les boîtes de vitesses et ainsi améliorer le rendement et limiter les pertes d’énergie. Mais, plus important encore, Peugeot prépare un label sportif qui sera basé sur une aide électrique à la propulsion. Les modèles qui seront labellisés gagneront des chevaux, mais surtout de la puissance de couple moteur (l’accélérati­on et la reprise). Évidemment, ces améliorati­ons auront un prix… Si Peugeot gagne son pari, il aura réussi à faire de la peur des amendes européenne­s une cash machine.

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