La Tribune Hebdomadaire

Le business prometteur de la « viande sans viande »

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JÉRÔME MARIN

Dans l’assiette, difficile de voir la différence. Pas plus que de la constater au goût. Pourtant, ce hamburger ne contient pas un steak de boeuf, mais une galette fabriquée avec des protéines végétales (pois, pommes de terre, huile de coco…). Et qui « saigne » même quand on la coupe. Cette « viande sans viande », comme l’appellent les Américains, est considérée comme un marché d’avenir. À tel point qu’elle intéresse les géants de l’agroalimen­taire et les grandes chaînes de restaurati­on rapide.

Si le concept n’est pas nouveau, il a connu une importante mutation sous l’impulsion notamment de deux entreprise­s californie­nnes, Beyond Meat et Impossible Food. L’objectif est désormais de ressembler le plus possible au produit imité. Car la principale cible a changé. Exit les végétarien­s et les végans, place aux flexitarie­ns, ces consommate­urs qui veulent manger moins de viande, en raison de l’impact de l’élevage sur la planète. « Ils aiment la viande, donc nous devons recréer tous ses aspects : son apparence, son goût, son odeur, sa texture », explique Will Schafer, vice-président chargé du marketing à Beyond Meat. Selon l’Organisati­on des Nations unies pour l’alimentati­on et l’agricultur­e (FAO), l’agricultur­e animale est en effet responsabl­e de 14,5%% des émissions de gaz à effet de serre dans le monde. Un chiffre que les spécialist­es de la viande végétale reprennent dans leur discours marketing. Avec succès : 62%% des consommate­urs américains disent vouloir manger moins de viande pour des motifs environnem­entaux, d’après une étude menée par le cabinet Nielsen. « En Europe, ce pourcentag­e oscille entre 30 % et 40 % », assure Will Schafer. Le potentiel commercial n’est donc plus simplement limité aux végétarien­s et aux végans, qui représente­nt moins de

», souligne le responsabl­e de Beyond Meat. Les analystes de Barclays prédisent que les ventes pourraient atteindre 140 milliards de dollars au cours des dix prochaines années, soit 10%% du marché de la viande.

Pas étonnant donc que le secteur affûte ses armes. Au Canada, McDonald’s vient de conduire une phase de tests de trois mois proposant un burger « plante, laitue, tomate » conçu avec Beyond Meat. Cet été, Burger King, associé à Impossible Food, a vendu un sandwich à base végétale dans l’ensemble de ses restaurant­s américains. Les chaînes White Castle, Carl’s Jr. et TGI Fridays ont aussi mené des programmes pilotes. Tout comme KFC, qui a vendu des nuggets de poulet sans poulet. Face aux succès de Beyond Meat et d’Impossible Food, les géantsdel’agroalimen­tairecomme­ncent aussi à réagir. En Europe, Nestlé a lancé au printemps un burger sans viande qui devrait bientôt être disponible aux ÉtatsUnis. Tyson Foods, le premier producteur américain de viande, commercial­ise depuis peu des substituts végétaux. Et Kellogg’s a récemment modifié sa recette afin que son steak végétal « saigne ».

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[IMPOSSIBLE FOOD] Le steak végétal n’est pas réservé aux végétarien­s et aux végans.

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