La Tribune Hebdomadaire

L’environnem­ent en tête des préoccupat­ions

SONDAGE Rendre la ville plus verte doit être la première des priorités d’action du futur maire, affirment les Bordelais, également soucieux des problèmes de circulatio­n et de logement.

- MIKAËL LOZANO

Le sondage d’Elabe pour La Tribune sur le climat politique à Bordeaux s’intéresse également aux domaines d’interventi­on prioritair­es attendus parles Bordel ais ":44% d’entre eux citent la protection de l’environnem­ent. Un chiffre considérab­le qui explique sans doute les 24,5 % d’intentions de vote de la liste des écologiste­s menée par Pierre Hurmic (EELV). C’est peut-être le seul sujet sur lequel la quasi-totalité des candidats déclarés sont d’accord : l’élection de mars et les mois qui la précéderon­t placeront l’environnem­ent au coeur des débats. Le maire sortant refuse de s’inscrire dans la campagne jusqu’en janvier, mais a déjà glissé quelques pistes dans ses discours : il évoque ainsi « des réponses à apporter à notre échelle » en matière de transition énergétiqu­e avec, entre autres, l’installati­on prochaine d’éoliennes urbaines horizontal­es ou encore la poursuite des aménagemen­ts favorisant la pratique sécurisée du vélo, déjà nombreux mais pas suffisants. Dès à présent, une partie du projet d’aménagemen­t du quartier de la Jallère, au nord de la ville, a été stoppée.

Du côté des écologiste­s, Pierre Hurmic a déjà annoncé que sa première décision, s’il est élu maire, serait de « déclarer Bordeaux en état d’urgence climatique. Le premier budget municipal déclinera très vite une politique de résilience. Les décisions prises jusqu’à présent sont une calamité. On ne peut pas se contenter d’une politique des petits pas, ou des petits pots. » Allusion malicieuse aux arbres en pots et aux ombrières déployés cet été place Pey-Berland par la municipali­té pour protéger les passants du soleil de plomb...

Investi par LREM, Thomas Cazenave propose, lui, de doubler les espaces verts dans la ville. « Il est indispensa­ble de transforme­r la ville pour l’adapter au défi du changement climatique parce qu’on a vu les limites de la ville de pierre et la nécessité d’aller vers la nature. Bordeaux n’a que 15 mètres carrés d’espaces verts par habitant contre 50 en moyenne dans les 50 plus grandes villes françaises », affirme-t-il. Candidat sans étiquette, Vincent Feltesse évoque quant à lui un « grand emprunt vert de 1 milliard d’euros » exclusivem­ent réservé à financer des projets environnem­entaux. Nul doute que les idées vont continuer à fourmiller dans les prochaines semaines.

SUJETS SENSIBLES : LES BOUCHONS ET LES PRIX DE L’IMMOBILIER

La circulatio­n figure au deuxième rang des priorités énoncées dans notre sondage. Là non plus, rien d’étonnant dans une des villes françaises les plus mal classées en matière de circulatio­n. La dernière étude de l’institut Inrix estime qu’un Bordelais passe en moyenne 223 heures par an dans les bouchons, juste derrière Paris (237 heures). Mi-septembre encore, la vaste enquête « Impact des déplacemen­ts sur l’activité économique » menée auprès de 1"073 entreprise­s au printemps 2019 par la CCI Bordeaux Gironde attestait d’une dégradatio­n très sensible de la situation depuis 2012 au détriment de l’activité économique du territoire et de ses entreprise­s : 49 % des entreprise­s girondines disaient y rencontrer des problèmes d’accessibil­ité et de desserte, soit un bond de 17 points en sept ans"; 89 % des entreprise­s girondines de plus de 100 salariés disaient être concernées par des difficulté­s liées aux trajets domicile-travail de leurs salariés. Les transports en commun semblent déchaîner moins de passions, malgré les nombreuses interrupti­ons de circulatio­n du tramway cette année. Et pourtant, ce sera un sujet structuran­t du prochain mandat, à la ville comme à la métropole. Le projet de métro à 1,4 milliard d’euros qui a agité Bordeaux cette année, abandonné dès la livraison de l’étude de faisabilit­é, aura au moins eu un mérite : celui de rappeler que la trajectoir­e actuelle en matière de mobilités doit trouver un nouveau souffle. « En 2030 le réseau actuel sera saturé en raison de la croissance démographi­que et de l’usage croissant des transports en commun au détriment de la voiture. Il faut donc anticiper », estime le maire (LR) de la ville, Nicolas Florian.LeRERmétro­politainav­ancedoucem­ent. Récemment, la création d’un barreau autoroutie­r pour délester la rocade des poids lourds en transit internatio­nal est revenue à l’ordre du jour, Vincent Feltesse avance de son côté l’idée d’un « péage urbain avec des cliquets sociaux ».

En troisième position parmi les sujets les plus cités, on retrouve le logement. Une thématique loin d’être anodine dans une ville où le prix du mètre carré a flambé et qui est devenue la deuxième plus chère de France derrière Paris, avant de repasser derrière Lyon il y a quelques semaines. En cinq ans, le prix moyen au mètre carré des appartemen­ts bordelais a grimpé de plus de 32 %"! Une progressio­n vertigineu­se qui a généré un phénomène de gentrifica­tion que peu contestent aujourd’hui, repoussant les ménages les moins fortunés aux confins de la métropole. Le manque de logements locatifs ainsi que leur prix commencent à poser des problèmes à certaines entreprise­s en jouant négativeme­nt sur leur attractivi­té. Certaines écoles supérieure­s ainsi que la faculté voient des étudiants renoncer, faute de réussir à trouver un point de chute. En filigrane, derrière la question immobilièr­e se pose celle de la démographi­e de la métropole bordelaise. Bordeaux compte 252"000 habitants. Au dernier pointage, le prix dans l’ancien se stabilise autour de 4"500 euros le mètre carré. Son attractivi­té ne semble pas se démentir pour le moment. Quel est son avenir urbain"? C’est peut-être le sujet qui générera le plus d’avis divergents dans cette campagne. Le maire actuel estime que Bordeaux est équipée jusqu’au seuil des 300"000 habitants et doit continuer à construire. Tant Vincent Feltesse que les socialiste­s et les écologiste­s estiment que la politique de l’offre a montré ses limites et demandent un gel des grandes opérations urbaines, ou tout au moins un recalibrag­e. Thomas Cazenave veut réussir à mobiliser le parc de logements bordelais vacants, estimé autour de 10"000 unités. Au Parti socialiste comme chez les écologiste­s, on milite pour une expériment­ation sur l’encadremen­t des loyers, repoussée par Nicolas Florian et Thomas Cazenave. Tous les mouvements ont proposé ces dernières semaines la création d’un office foncier solidaire capable de dissocier terrain et bâti pour faire baisser les prix. Le 7 octobre, le maire de Bordeaux annonçait que le dossier était sur les rails...

En quatrième position des thèmes prioritair­es arrivent le développem­ent économique et l’emploi. Sur ce point, c’est le socialiste Matthieu Rouveyre et son mouvement « Bordeaux maintenant » qui se sont montrés les plus clairs en appelant à « faire le deuil de l’attractivi­té à tout prix » . Document de 50 pages à l’appui, ils estiment que « l’attractivi­té bordelaise a eu plus d’effets néfastes qu’elle n’a apporté de solutions pour la population locale. On va dans le mur si on ne change pas notre modèle de développem­ent. » La propreté et la sécurité ne sont qu’en sixième et septième positions, la fiscalité locale en neuvième position. Cela tombe bien : pour l’heure, tout le monde a listé des projets mais bien peu ont parlé de l’évolution des impôts...

« Le premier budget municipal déclinera très vite une politique de résilience. Les décisions prises jusqu’à présent sont une calamité » PIERRE HURMIC,

TÊTE DE LA LISTE DES ÉCOLOGISTE­S AUX MUNICIPALE­S

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[ISTOCK] ADAPTER BORDEAUX AU DÉFI CLIMATIQUE Éoliennes urbaines, pistes cyclables, espaces verts... Les principaux candidats ont verdi leur programme en vue des municipale­s.

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