LE COMPOSTAGE DES BOUES D’ÉPURATION EN SURSIS
C’est la filière de valorisation la plus vertueuse des boues d’épuration qui est menacée de disparition, dénoncent les collectivités territoriales et les professionnels du recyclage et de l’eau. Transposant une directive européenne, le ministère de la Transition écologique et solidaire remet en effet en cause le mélange de ces boues avec les déchets verts (feuilles d’arbres, branches, fleurs fanées…) pour produire du compost.
Vendue aux agriculteurs pour nourrir leurs sols, cette combinaison est riche en potassium, phosphates, azote et matière organique. Elle permet de réduire l’utilisation d’engrais chimiques et de limiter l’érosion des sols. Problème : les boues d’épuration sont aussi susceptibles de contenir des résidus de médicaments et d’autres polluants. « La fermentation du compost divise par cinq la présence de résidus de médicaments, dont on ne trouve ensuite quasiment aucune trace dans les sols », nuance Sabine Houot, directrice de recherche au sein de l’Institut national de la recherche agronomique (Inra). Chaque année, la France produit 10 millions de tonnes de boues d’épuration, dont 3 millions sont utilisées pour produire du compost. La crainte des collectivités, c’est de « se retrouver avec leurs boues sur les bras » , résume Sylviane Oberlé, chargée de mission prévention des pollutions à l’Association des maires de France (AMF). Ces boues pourraient alors être mélangées à d’autres déchets, comme des résidus de bois ou de la paille. « Mais la qualité du compost issu des boues serait inférieure », souligne Hubert Brunet, président du Syndicat des professionnels du recyclage en agriculture (Syprea). Les boues de stations d’épuration pourraient s’additionner aux 4 millions de tonnes épandues sur les sols. Une pratique interdite dans certains pays. Dernière possibilité : l’incinération, qui en détruit le potentiel organique. À plus long terme, la gazéification hydrothermale pourrait représenter un nouveau débouché.