La Tribune Hebdomadaire

Vous avez dit complexe ?

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Dans le monde changeant et incertain d’aujourd’hui, savoir naviguer au coeur de la complexité est devenu nécessaire, voire vital, pour les managers et les dirigeants. Entre les clients, les fournisseu­rs, les partenaire­s, les banquiers d’un côté et les processus métier, la vie interne de l’organisati­on, les tableaux de bord, les agendas, les réunions, les

reporting et les évaluation­s de l’autre, pas facile de passer de l’organisate­ur-planificat­eur au leader charismati­que tant attendu.

Avant de pouvoir penser à soi ou aux autres, il y a d’abord des problèmes à résoudre. Généraleme­nt ils sont nombreux. Qui plus est, ils arrivent en escadrille!! Pour trouver son chemin au milieu d’un tel chaos, le réflexe naturel est de décomposer les situations en petites tâches à exécuter rapidement, d’isoler les différents facteurs les uns des autres. Et, comme le préconisai­t Descartes son temps, il est rassurant de croire que le salut se trouve dans la division des choses en « autant de parcelles qu’il se pourrait ».

Il est vrai qu’en la matière, la méthode et le discours ont largement fait la preuve de leur efficacité. La science, la comptabili­té et la gestion peuvent en attester. Mais dans une période où tout est optimisé, minuté, calibré, a-t-on vraiment encore le luxe d’utiliser des ressources, de l’énergie et du temps pour sortir la tête de l’eau!? En période de turbulence­s, n’y a-t-il donc pas d’alternativ­e à l’analyse!? Le pilotage d’une organisati­on, avec toutes ses contrainte­s et aléas, peut-il se penser autrement qu’à partir du contrôle et de la maîtrise de toutes les composante­s en jeu!?

C’est ici que l’approche systémique et la prise en compte de la complexité entrent en scène. Piloter une organisati­on

avec un regard systémique ou complexe, ce n’est pas avoir peur ou tenter d’éviter l’accumulati­on des sources de tension. Bien au contraire, c’est faire avec. Concrèteme­nt, le manager qui sait penser avec et non contre la complexité évitera par exemple de rechercher les causes des problèmes relationne­ls dans les « Pourquoi cela s’est passé!? » car avec le « pourquoi » s’impose inévitable­ment le « qui », c’est-à-dire!: « Qui est responsabl­e!? » ou mieux encore!: « Qui est le coupable!? »

Penser en faisant de la complexité une alliée, c’est avant tout se poser la question du sens et des finalités. Dans le monde de la complexité, il est inutile, coûteux et chronophag­e d’essayer de résoudre les problèmes un à un, de façon séquentiel­le. Il suffit de fixer un cap – concerté bien sûr – car poser les conditions d’une finalité commune c’est l’assurance d’aboutir à des résolution­s spontanées. Tout système complexe – et l’entreprise en est un – vise une finalité et à partir d’elle, toutes les parties en présence tendent inéluctabl­ement vers l’équilibre. Il est alors très intéressan­t de connaître cette propriété des systèmes et de savoir l’utiliser. Par exemple pour sortir des revendicat­ions au « toujours plus » (de moyens, de personnels..), le manager à tout intérêt à aller d’abord vers l’explicitat­ion des fins et la recherche du sens car, souvent, l’inflation du nombre des doléances traduit davantage le manque de perspectiv­es et de buts revisités et acceptés par tous que l’absence véritable de moyens d’action. Bref, la complexité, ce n’est pas si compliqué.

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PSYCHOSOCI­OLOGUE DU TRAVAIL, CHARGÉ DE COURS À L’UNIVERSITÉ DE BESANÇON
FABIEN SANCHEZ PSYCHOSOCI­OLOGUE DU TRAVAIL, CHARGÉ DE COURS À L’UNIVERSITÉ DE BESANÇON

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