La Tribune Hebdomadaire

L’industrie française se réveille enfin

Tournée vers le numérique et l’export, arborant fièrement le coq bleu de la French Fab, l’industrie hexagonale revient dans la compétitio­n européenne.

- LAURENCE BOTTERO

L’industrie revient de loin. Difficile de chasser les images d’Épinal, celles d’usines crachant des fumées noires, de travail difficile et harassant, d’ouvriers malmenés et mal payés… Mais ça c’était avant. Avant l’arrivée du numérique, des startups et surtout du besoin de reconquête. Car, oui, l’industrie s’est retrouvée confrontée à des enjeux de compétitiv­ité nationaux et internatio­naux et pour ne pas se laisser dépasser, il a bien fallu embrasser cette industrie du futur. C’est exactement ce à quoi exhorte l’Alliance industrie du futur, présidée par Bruno Grandjean (lire l’entretien ci-contre). Sa mission#: inciter, accompagne­r, rassurer, encourager les PME industriel­les à ne pas regarder passer le train de l’innovation. En clair, le numérique c’est fantastiqu­e, le durable aussi, et le tout crée une dynamique permettant de grignoter de nouvelles parts de marché. Afin de mettre en avant des exemples concrets, les Vitrines industrie du futur ont été créées. Ce label estampille celles ayant remis à plat leur modèle et qui ont su aller vers ce futur prometteur. Elles sont 70 actuelleme­nt à s’en prévaloir dans l’Hexagone, comme autant de pépites brillant ici et là, un encouragem­ent concret pour celles qui hésiteraie­nt encore. Autre initiative, pilotée par Bpifrance, la French Fab, lancée en 2017, reprend les codes du coq tricolore, habillé de bleu, une nouvelle arme pour être visible à l’internatio­nal. D’ailleurs, son tour très remarqué au Consumer Electronic­s Show de Las Vegas en 2018, était bien là pour montrer l’ambition de faire connaître l’industrie nationale au-delà de l’Hexagone.

UN EFFET D’ENTRAÎNEME­NT

Et ce coq bleu, il plaît bien.

D’abord aux industriel­s euxmêmes qui décident d’en revendique­r l’appartenan­ce. Et l’effet d’entraîneme­nt voulu est bien là. Le French Fab Tour, qui a parcouru les routes de France et de Navarre dès janvier 2019 a permis d’en mesurer l’impact visible sur le terrain. « L’industrie aujourd’hui, c’est une multitude de métiers, certains que l’on ne trouvait que dans les grands groupes, d’autres novateurs. C’est du numérique, de la RSE. C’est la sécurité de l’emploi aussi », plaide Marcel Ragni, ambassadeu­r French Fab pour la Côte d’Azur et patron d’une PME de près de 100 salariés. Qui rappelle le rôle qu’a aussi l’industrie en matière de cohésion territoria­le, « faisant vivre les villes et les villages, maintenant une économie locale, un quotidien ». Et ça, c’est aussi le rôle de Territoire­s d’industrie, le dernier dispositif en date, bien plus prometteur qu’il n’y paraît. L’industrie du futur a aussi un avantage, c’est qu’elle représente un défi pour toutes les entreprise­s. Certes, les plus grandes d’entre elles bénéficien­t de moyens financiers et techniques, de ressources… Mais les plus petites tirent parti de leur agilité, de leur souplesse, et de leur capacité à pivoter. Chez Thales par exemple, l’industrie du futur se déploie avec les star tups. En confiance, dans une sorte d’intelligen­ce commune, explique Vincent Clot, chargé de l’Open Innovation et des Ventures au sein du Cluster Innovation. C’est la vague Newspace, l’industrie spatiale d’initiative privée, incarnée par Elon Musk et Space X, qui a mené la société à développer son approche innovation en s’appuyant sur cet écosystème et des moyens tels que des fab labs, hackathons et consorts.

Surtout, il existe tout un pan de la nouvelle économie spatiale, où l’apport de Thales Alenia Space sert les industries terrestres comme celles de l’alimentair­e ou du pharmaceut­ique. Le digital twin ou jumeau numérique est totalement stratégiqu­e. « Nous développon­s systématiq­uement une image digitale qui nous permet de comprendre le comporteme­nt d’un engin spatial dès sa conception », explique Vincent Clot, ne cachant pas que la robotique spatiale constitue le prochain défi pour étendre la flexibilit­é vers la dimension matérielle. Chez Engie, c’est le projet Darwin – le contrôle centralisé des parcs d’énergie verte et l’exploitati­on des données pour optimiser leur rendement – qui a été labellisé Vitrine du futur. Mais l’une des plus belles opérations communicat­ion s’appelle l’Usine extraordin­aire. Rien que l’intitulé fait rêver. L’idée de recréer une usine, en vrai et grandeur nature, illustre parfaiteme­nt les discours. La première édition, au Grand Palais, l’an dernier, a fait la preuve du concept. Comme dirait un célèbre slogan, aujourd’hui, c’est déjà demain…

« Développer une image digitale nous permet de comprendre le comporteme­nt d’un engin spatial dès sa conception » VINCENT CLOT,

CHARGÉ DE L’OPEN INNOVATION CHEZ THALES ALENIA SPACE

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Un atelier de Thales Alenia Space, à Cannes. Après des années de décrochage, grandes entreprise­s et PME digitalise­nt à tout-va et rattrapent leur retard.
[BRUNO BEBERT/SIPA] UN MODÈLE INDUSTRIEL REMIS À PLAT Un atelier de Thales Alenia Space, à Cannes. Après des années de décrochage, grandes entreprise­s et PME digitalise­nt à tout-va et rattrapent leur retard.

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