La Tribune Hebdomadaire

Orano Niger : consternat­ion à Arlit après l’arrêt annoncé de la mine d’Akouta

- PAR MAIMOUNA DIA

CESSATION Au Niger la décision de fermeture du site d’uranium de la Cominak, filiale d’Orano, est désormais officielle, menaçant toute l’économie de la région d’Arlit, qui est dépendante des activités minières. Les travailleu­rs contestent les motifs avancés par la compagnie.

La mine d’uranium de la société Cominak cessera ses activités dans moins de 18 mois. Tel est le verdict rendu le 23 octobre par le conseil d’administra­tion de la compagnie minière qui a retenu la date butoir du 31 mars 2021 pour l’arrêt de la production du gisement d’Akouta, à Arlit. La société filiale d’ Orano (ex-Areva) justifie cette décision par l’épuisement du gisement et la hausse des charges d’exploitati­on alors que le prix de l’uranium est en baisse. En juillet 2019, le kilo d’uranium se négociait à 25 dollars sur les marchés contre 40 dollars en 2014. Une baisse consécutiv­e à une offre excédentai­re, due notamment à la méfiance engendrée par l’accident nucléaire de Fukushima au Japon en 2011 et aux promesses de développem­ent des énergies renouvelab­les suite à la COP21 de Paris. Affectée par cette conjonctur­e, la Cominak a clôturé l’exercice de l’année 2018 avec une perte nette d’environ 28,7 millions de dollars, a déclaré en mai le ministre des Mines, Hassane Barazé. Un contexte peu favorable mais qui ne justifie pas la fermeture du site, rétorquent des syndicats de mineurs nigériens. Il s’agit plutôt de « difficulté­s financière­s décrites sans arguments et peu convaincan­tes », nous explique Ramar Ilatoufegh, de l’ONG Aghir In Man qui milite pour la protection de l’environnem­ent à Arlit. « Nous ne sommes pas du tout d’accord avec la manière dont la fermeture est en train d’être envisagée », a déclaré Amadou Harouna Maiga, secrétaire général du Syntramin, le principal syndicat des mineurs du Niger. « Les raisons évoquées ne tiennent pas la route. D’abord, ils avancent l’épuisement du minerai. Dans ce cas, il s’agirait d’une raison valable et compréhens­ible. Mais à côté de ce motif, ils évoquent aussi le coût élevé d’exploitati­on », argumente Amadou Harouna Maiga.

Si l’épuisement des ressources peut être considéré comme un argument valable, il n’en est pas de même pour l’explosion des charges qui, selon les travailleu­rs de la Cominak, peut être résolue par un programme de réajusteme­nt pour maintenir les activités. Un double discours qui, selon les travailleu­rs, sème le doute sur les réels motifs de cette fermeture.

La baisse du prix de l’uranium et la maturité du site exploité depuis quarante ans rendent difficile tout maintien des activités d’Akouta. Mais une fois l’option de fermeture définitive­ment adoptée, les membres de la société civile nigérienne – comme Elhadji Idi Abdou, ancien rapporteur de la Ligne verte – exigent le respect des normes environnem­entales relatives au démantèlem­ent des installati­ons ainsi qu’une juste compensati­on des travailleu­rs. « Pour ce qui est du sort des travailleu­rs, un comité a déjà été mis en place afin d’encadrer l’indemnisat­ion si la décision s’avérait irréversib­le », explique le secrétaire général du Syntramin.

La mine d’uranium emploie directemen­t plus de 800 personnes et a créé des emplois via ses sous-traitants, ce qui menacerait au total plus de 2$000 emplois au Niger. « C’est une décision malheureus­e et toute la région d’Arlit va en pâtir », déplore Maiga. Au Niger, Orano opère à travers la Cominak détenue à 34 %, la Somaïr et le gisement d’Imouraren dont l’exploitati­on, entamée en 2009, a été arrêtée en 2015 à cause de la baisse du prix de l’uranium.

« C’est une décision malheureus­e et toute la région d’Arlit va en pâtir » AMADOU HAROUNA MAIGA, SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DU SYNTRAMIN

 ?? [MAURICE ASCANI/ORANO] ?? La fermeture du site devrait être effective avant la date butoir du 31 mars 2021. La compagnie minière argue de la baisse du prix de l’uranium combinée à la hausse des charges d’exploitati­on.
[MAURICE ASCANI/ORANO] La fermeture du site devrait être effective avant la date butoir du 31 mars 2021. La compagnie minière argue de la baisse du prix de l’uranium combinée à la hausse des charges d’exploitati­on.

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