La Tribune Hebdomadaire

Natixis s’applique un bonus-malus pour décarboner son bilan

- DELPHINE CUNY

MODÉRATION La banque de financemen­t du groupe BPCE a mis en place le Green Weighting Factor, un mécanisme interne d’allocation du capital modulant la rentabilit­é de chaque prêt en fonction de l’impact attendu sur!le climat.

Tandis que de plus en!plus d’entreprise­s s’appliquent un prix interne du carbone, une banque, Natixis, a décidé d’apporter sa contributi­on à la transition­versunmond­edécarboné en me"ant en place un système de bonus-malus sur les financemen­ts plus ou moins verts qu’elle accorde. Cette filiale cotée en Bourse du groupe BPCE (Banque Populaire Caisse d’Épargne) s’applique un mécanisme appelé le Green Weighting Factor (facteur de pondératio­n verte), qui module la rentabilit­é de chaque financemen­t en fonction de son impact surleclima­t.Depuissept­embre, l’outil a été étendu à l’intégralit­é de son bilan de l’activité de « grande clientèle », soit 127 milliards d’euros. Une première mondiale selon la banque, qui compte partager cet outil, fruit de dix-huit mois de travail, avec d’autres établissem­ents courant 2020.

Pour noter chaque financemen­t, la banque a dû créer sa propre méthodolog­ie sectoriell­e, une échelle à sept niveaux, du brun au vert foncé, qui a servi à élaborer secteur par secteur 46 arbres de décision pour déterminer la couleur d’un financemen­t dédié : le chargé d’affaires doit répondre à une série de cinq à dix questions fermées sur le logiciel de!gestion de la relation client, aboutissan­t à une notation finale. S’il s’agit d’un financemen­t à usage général, la banque analyse la stratégie et la performanc­e climatique­s de l’entreprise, un travail effectué avec l’aide du cabinet Carbone!4. La grille d’analyse étant essentiell­ement climatique, le nucléaire est noté neutre, du fait de l’évitement des émissions de CO2, le gaz entre le brun et le gris neutre.

UNE FORTE INCITATION FINANCIÈRE

Le bonus peut a"eindre 50$% pour un financemen­t très vert

et le malus 24$% : « Nous faisons un calcul interne en allégeant les actifs pondérés par le risque (RWA) si le financemen­t est noté vert ou en augmentant!la charge s’il est noté brun. Cela affecte la rentabilit­é des fonds propres (return on

equity) analytique de chaque financemen­t », détaille Louis Douady, directeur de la responsabi­lité sociétale d’entreprise chez Natixis. « Le Green Weighting Factor est un outil d’incitation interne, de prise de conscience et de pilotage. Ce mécanisme d’allocation du capital influence la prise de décision individuel­le sur les transactio­ns et, a posteriori,

permet de mesurer les progrès à chaque revue trimestrie­lle des métiers », poursuit le directeur de la RSE. « Il s’agit d’un outil exclusivem­ent interne, qui n’a pas d’impact sur le plan prudentiel, sur les actifs pondérés réglementa­ires des finance

ments », précise-t-il.

Les équipes sont incitées à favoriser les financemen­ts verts, à niveau de risque de crédit égal : il n’y a pas aujourd’hui de statistiqu­es suffisante­s pour établir une corrélatio­n entre le caractère vert et la probabilit­é de défaut. « Nous réfléchiss­ons aussi à la mise en place d’une prime pour nos collaborat­eurs en fonction de la note climatique de leur portefeuil­le de financemen­ts », confie Louis Daoudy. La part actuelle du « brun » dans le bilan de Natixis est de 38$% (contre 43$% pour le vert et 19$% en neutre) : en appliquant le Green Weighting Factor, elle grimpe à 50$%. « On se donne un!an d’observatio­n de cet outil pour définir des objectifs à moyen et long termes de décarbonat­ion du bilan en cohérence avec ceux de l’Accord de Paris », indique le directeur de la RSE.!

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France