La Tribune Hebdomadaire

Les startuppeu­rs français ont deux amours : New York et Paris

ÉCHANGES Parisiens mais New-Yorkais d’adoption, ils créent une fertilisat­ion croisée des deux côtés de l’Atlantique : investir dans l’écosystème devient tendance ici, tandis que French Touch et avantages sociaux s’acclimaten­t là-bas.

- IRÈNE FRAT, ENVOYÉE SPÉCIALE À NEW YORK

Il habite à Brooklyn depuis 2012. Il y a acheté une maison et ses enfants vont à l’école sur place. Mais il travaille… à Paris. « Je me cale sur les horaires français et je suis en France la moitié de mon temps », explique Pierre-Nicolas Hurstel, PDG d’Arianee, qui met la blockchain et ses avantages en matière de traçabilit­é numérique au service d’entreprise­s commercial­isant des produits de valeur. Il n’est pas le seul, au sein de la communauté des entreprene­urs français à New York, à avoir un pied sur chaque continent. « Cela fait à peu près cinq ans que les choses ont changé », indique Benoît Buridant, le cofondateu­r du club FrenchFoun­ders, qui réunit les créateurs d’entreprise­s de l’Hexagone à New York. Plus question, désormais, de choisir entre les deux villes-monde, Paris ou New York. Ce sera les deux. Et plus question non plus de dénigrer la France sous prétexte qu’on l’a qui!ée, ni d’embrasser les yeux fermés le système américain parce qu’on y vit. « On aime la France!! », disent en choeur les startuppeu­rs français sur place.

LA FUSION DES CULTURES

De fait, une nouvelle génération d’entreprene­urs, sans complexes et évidemment rompue aux outils de communicat­ion, a remplacé les JeanLouis Gassée (devenu cadre dirigeant chez Apple dans les années"1980) et les Loïc Le Meur (parti à San Francisco en 2007 pour fonder Seesmic). Et elle fait fureur à New York. La ville est devenue le nouveau pôle d’attraction technologi­que. « Les qualités françaises, que ce soit dans la tech ou la gestion, sont désormais reconnues aux ÉtatsUnis », se félicite Benoît Buridant, en parlant de ses compatriot­es spécialisé­s dans l’intelligen­ce artificiel­le au sein de Facebook ou de Samsung, mais aussi dans la gestion chez Kroger (grande distributi­on) ou à la tête de Ralph Lauren. Et puis, ajoute-t-il, « New York, c’est pratique pour tout le monde. Tous les

Dans la high-tech, l’IA, la gestion ou la mode, une nouvelle génération d’entreprene­urs français fait fureur à New York, devenu un nouveau pôle d’attraction technologi­que. grands dirigeants y passent et c’est proche de la France » … Cette nouvelle fluidité, faite d’allers et retours entre Paris et New York, permet aux startuppeu­rs nouvelle génération de bénéficier aussi bien des avantages français qu’américains. Souvent, la recherche et développem­ent de même que les aspects liés à la gestion des données sont basés en France, du fait de la pléthore de talents français, mais aussi d’une plus grande facilité à les retenir sans dépenser des fortunes comme à New York. Le marketing et le lancement sur le marché, en revanche, se font fréquemmen­t depuis la Grosse Pomme. Quant aux levées de fonds, elles sont de plus en plus mixtes. Ainsi, selon l’habitude américaine qui veut que, lorsqu’un entreprene­ur vend son affaire et réussit son « exit », il réinvestis­se dans l’écosystème entreprene­urial local, « Frédéric Montagnon et Julien Romane"o, deux Français qui ont vendu OverBlog et Teads, ont investi dans Prose », souligne Arnaud Plas, ancien vice-président chez L’Oréal qui a choisi New York pour lancer, en janvier 2018, Prose, une marque de beauté personnali­sée qui utilise l’intelligen­ce artificiel­le et l’automatisa­tion.

Depuis sa première levée de fonds, en juillet 2017, Prose a récolté 25 millions de dollars et convaincu Forerunner et Insight, des fonds américains prestigieu­x, mais aussi séduit Paul Strachman, représenta­nt d’ISAI (le fonds d’investisse­ment des entreprene­urs Internet confondé par Pierre Kosciusko-Morizet) à New York. Et une partie des montants (3 millions de dollars) est venue directemen­t de France.

IMPOSER SES CONCEPTS

L’idée de produits personnali­sés s’est imposée à Arnaud Plas il y a déjà un certain temps, alors qu’il faisait ses classes chez L’Oréal, en étudiant les"linéaires dans les grandes surfaces. « Le marché est hyper-segmenté et les consommatr­ices doivent choisir entre des dizaines et des dizaines de shampoings… » , dit-il. Il décide d’offrir, via le digital, une consultati­on puis un produit sur mesure, en fonction des caractéris­tiques du cheveu. Pourquoi lancer Prose à New York$? « Ici, le marché comporte tous les profils, cela nous permet de mieux entraîner nos algorithme­s », explique le nouveau chef d’entreprise. À partir du mois de mars prochain, sa petite usine de Brooklyn sera totalement automatisé­e et les clientes recevront leur produit encore plus vite, en moins de cinq jours. « Mais c’est un partenaire en Normandie qui nous a fabriqué la machine, sans oublier le nez qui compose les parfums pour les formules, basé en France, de même que la R&D », souligne-t-il. Arnaud Plas a également imposé certains concepts fran

« Les qualités françaises, que ce soit dans la tech ou la gestion, sont désormais reconnues aux États-Unis »

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"DR# BIG APPLE, LA VILLE!MONDE PRÉFÉRÉE DES "#FRENCHIES#$

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