La Tribune Hebdomadaire

L’insécurité maritime du golfe de Guinée s’accentue

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Cette zone de l’Afrique de l’Ouest a enregistré l’année dernière une recrudesce­nce de la violence liée à des actes de piraterie et de brigandage, menaçant toujours plus l’économie bleue en Afrique. 31#décembre 2019. Il est 23!h!10 lorsque des hommes armés prennent d’assaut le «#Happy Lady#», un pétrolier grec accosté au large de la ville camerounai­se de Limbé. Le capitaine et sept membres de l’équipage sont enlevés, un autre est blessé par le ricochet d’une balle. Dans ce$e partie du globe, cet acte de brigandage n’est pas un fait nouveau, ni isolé. Le golfe de Guinée est considéré depuis le début des années 2000 comme l’une des zones les plus dangereuse­s au monde, avec une insécurité maritime qui menace autant le commerce que la stabilité dans les pays riverains de ce$e sous-région économique stratégiqu­e. Et rien ne laisse présager un ralentisse­ment des actes criminels de ce genre, au contraire.

Le 14 janvier, le Bureau internatio­nalmaritim­e(BIM)annonçait quelenombr­ed’enlèvement­sde marins au large des côtes de l’Afrique de l’Ouest avait grimpé de 50!% en 2019, soit plus de 90!% du total des cas signalés dans le monde.Danssonrap­portannuel sur la piraterie, le BIM précise que ces enlèvement­s se sont produits dans le golfe de Guinée, où 121#cas d’enlèvement­s d’équipages ont été recensés l’an dernier, contre 78 en 2018.

Ces chiffres sur la montée de la violence liée au commerce maritime dans ce$e région du continent sont corroborés par le Maritime Informatio­n Cooperatio­n and Awareness Center (Mica Center), le centre d’expertise français dédié à la sûreté maritime, à compétence mondiale et installé à Brest.

UN IMPACT DIRECT SUR L’ÉCONOMIE MONDIALE

Créé en 2016, le Mica Center vient de publier son premier bilan annuel sur la piraterie et le brigandage dans le monde. Le bilan recense et caractéris­e les faits relevés au cours de l’année 2019 qui affectent la sûreté maritime, puis «!analyse les tendances observées ainsi que l’évolution des modes d’action et du recours à la violence, dans les zones touchées!» .

Le golfe de Guinée et ses pays riverains occupent une partie importante de ce premier bilan puisque cette sous-région a enregistré 111#événements liés à la piraterie et au brigandage au cours de l’année 2019. «!Malgré une baisse observée en début d’année, ce chiffre est en légère augmentati­on par rapport à l’an passé en raison d’une recrudesce­nce des événements relevés au mois de décembre. Il reste cependant proche de la moyenne des événements annuels constatés ces dernières années!», détaille le Mica Center dans son rapport.

Les zones à très fort risque restent le fond du golfe de Guinée entre la frontière LiberiaCôt­e d’Ivoire et la frontière République démocratiq­ue du Congo-Angola. Les zones à risques sont les eaux territoria­les et le large de la Guinée, de la Sierra Leone, du Liberia et de l’Angola.

Le golfe de Guinée, qui s’étend sur 5!700#km des côtes du Sénégal au nord à celles de l’Angola en passant par celles du Nigeria, sera certaineme­nt au centre des débats de l’Africa Maritime Security Forum (AMS), qui se tiendra du 20 au 22#janvier, à l’invitation de la marine sénégalais­e, dans la capitale, Dakar. Au-delà de l’aspect sécuritair­e, l’enjeu reste important pour l’économie bleue et les États en sont conscients#: rien que pour 2018, le rapport «#Oceans Beyond Piracy#» de l’ONG américaine One Earth Future estime le coût du brigandage et de la piraterie pour l’Afrique de l’Ouest à 818 millions de dollars de pertes.#

MOUNIR EL FIGUIGUI

 ?? "REUTERS/THIERRY GOUEGNON # ?? En 2019, 121!cas d’enlèvement­s d’équipages ont été recensés dans le golfe de Guinée, contre 78 en 2018.
"REUTERS/THIERRY GOUEGNON # En 2019, 121!cas d’enlèvement­s d’équipages ont été recensés dans le golfe de Guinée, contre 78 en 2018.

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