La Tribune Hebdomadaire

La République en marche a-t-elle un avenir après les municipale­s!?

- PAR MARC ENDEWELD

ÉLECTIONS

Assiste-t-on à un début d’hémorragie au sein de la majorité!? On en est loin, mais les départs ou exclusions du mouvement présidenti­el dans les rangs des députés LREM ont tendance à s’accélérer ces derniers mois. Fin janvier, ce fut au tour de Paula Forteza, députée des Français d’Amérique latine et des Caraïbes, qui soutient Cédric Villani aux municipale­s à Paris, luimême banni du parti peu de temps après. L’élue a mis en avant « beaucoup de raisons liées au fond », mais aussi « la méthode, la stratégie politique » du mouvement. D’ailleurs, peut-on encore parler d’un mouvement à propos de La République en marche!? Depuis 2017 et la victoire étincelant­e d’Emmanuel Macron, LREM s’est peu à peu recroquevi­llé sur un quarteron d’apparatchi­ks, représenté à présent par le très charismati­que Stanislas Guerini, issu de ladite « bande de la Planche », ces petits jeunes qui s’étaient mis au service de Dominique StraussKah­n en 2006 lors des primaires du PS." « Tous ceux qui contrôlent aujourd’hui La République en marche reproduise­nt les petites habitudes des vieux partis, dont ils sont issus », se désespère une figure des « marcheurs ».

Pire, Stanislas Guerini, comme ses prédécesse­urs à la tête de LREM, notamment Christophe Castaner, n’ont rien fait pour revitalise­r le « mouvement »,ouplutôtde­vrait-on maintenant parler de « parti », formule tellement ancien monde, au sujet de ce#e structure ad hoc, lancée à l’origine en avril 2016 par l’ancien conseiller spécial d’Emmanuel Macron, Ismaël Emelien, le communican­t issu d’Havas.

En l’absence de réaction des pontes de la majorité, LREM pourrait bien devenir peu à peu une véritable coquille vide. Les nombreux militants qui avaient rejoint Emmanuel Macron durant sa campagne de 2017 sont désormais une poignée dans la plupart des départemen­ts. Une véritable hémorragie pour le coup, liée sans doute à une déception à l’égard de la politique, jugée souvent trop droitière, du gouverneme­nt. La caporalisa­tion des fameux « référents En Marche ! » y est également pour beaucoup. « À son origine, En Marche!! était une sorte de magma, rassemblan­t des gens de différents horizons, de différente­s sensibilit­és. Au début, le magma était malléable mais, comme la lave, il a fini par se refroidir, et se fossiliser. Guère étonnant si désormais les fissures commencent à apparaître », analyse un poids lourd du groupe LREM à l’Assemblée.

Il y a quelques jours sur LCI, un vieux roublard de la politique, l’ancien député socialiste Jean-Marie Le Guen lâchait aux téléspecta­teurs l’analyse suivante : « En réalité, LREM est déjà de moins en moins Emmanuel Macron.#» Ce propos paradoxal correspond à un vrai processus en cours. La crise ouverte au sein du groupe parlementa­ire par l’épisode du manque « d’humanité » dénoncé par le président à propos de la question des jours de congés en cas de décès d’un enfant accentue le divorce.

En fait, si le président de la République multiplie les interventi­ons dans le débat des municipale­s, empêchant récemment deux de ses ministres de se présenter à la même élection à Biarritz, ou échouant à dissuader Cédric Villani de se présenter à Paris, il a déjà le regard tourné vers sa réélection de 2022, et LREM ne fait pas forcément partie de son plan. Emmanuel Macron pourrait très bien lancer un nouvel espace pour rassembler de nouveau autour de sa personne, mais sur un nouveau projet.

Un peu comme un Jean-Luc Mélenchon, désormais claquemuré avec sa garde rapprochée, qui a fini par dilapider son capital militant de 2017 en se désintéres­sant du « mouvement » France insoumise, qu’il avait pourtant placé en orbite dans l’optique de sa campagne. Ces deux bêtes politiques ont plus de points communs que leurs entourages respectifs ne l’admettent généraleme­nt. L’un comme l’autre se sont placés dans la vague du « dégagisme » et du « nouveau monde » politique, me#ant à distance les vieilles structures partidaire­s. L’un comme l’autre ont une lecture césariste des institutio­ns de la Ve République. Ces deux hommes, que tout oppose sur le fond, veulent aussi tout contrôler. Leurs « mouvements » initiaux étaient entièremen­t construits autour de leur personne, et de leur ambition : « Les écolos peuvent se rassembler pour sauver la planète, le RN pour exclure l’étranger, mais nous, on se rassemble pour quelle cause en dehors de la défense du président et de son programme de 2017!? », s’interroge un responsabl­e macronien.

Une attitude défensive, empêchant tout bouillonne­ment d’idées novatrices, et renforcée par l’incapacité des élus LREM à dépasser le tabou des tabous : contester la légitimité du président dans l’optique de 2022. Mais comme le soutenait Alexis Kohler, secrétaire général de l’Élysée, maintenir LREM en vie était-il indispensa­ble au président dans le cadre de la Ve République!?"

«!À son origine, En Marche"! était une sorte de magma malléable mais, comme la lave, il!a fini par se refroidir, et se fossiliser!»

UN POIDS LOURD DU GROUPE LREM À!L’ASSEMBLÉE

 ?? "ALAIN JOCARD/AFP# ?? LREM ne fait pas forcément partie du plan d’Emmanuel Macron, qui pense déjà à la présidenti­elle de 2022.
"ALAIN JOCARD/AFP# LREM ne fait pas forcément partie du plan d’Emmanuel Macron, qui pense déjà à la présidenti­elle de 2022.
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France