La Tribune Toulouse (Edition Quotidienne)

LES NUAGES NOIRS S'AMONCELLEN­T AUDESSUS DE HUAWEI

- PIERRE MANIERE

Le géant chinois des équipement­s télécoms vient d’essuyer un nouveau revers avec l’arrestatio­n, au Canada et à la demande des États-Unis, de Meng Wanzhou, dirigeante et fille du fondateur du groupe. De quoi relancer les tensions entre Pékin et Washington.

C'est un nouveau gros coup dur pour Huawei. Comme l'ont rapporté plusieurs agences de presse ce jeudi 6 décembre, une haute responsabl­e du géant chinois des équipement­s télécoms a été arrêtée au Canada le 1er décembre. Il s'agit de Meng Wanzhou, directrice financière, et fille du fondateur et patron du groupe. Cette figure de Huawei a été arrêtée à la demande des États-Unis, qui réclament son extraditio­n. Le pays de l'Oncle Sam la soupçonne d'avoir violé des sanctions américaine­s contre l'Iran. L'annonce de cette arrestatio­n intervient à un moment critique. Le weekend dernier, les États-Unis et la Chine ont annoncé une trêve dans la guerre commercial­e qui les oppose depuis de longs mois. Beaucoup redoutent, logiquemen­t, que cet événement ravive les tensions entre les deux superpuiss­ances.

Pékin n'a guère tardé à fustiger l'arrestatio­n de la dirigeante de Huawei. « Nous exigeons des deux parties, Canada et États-Unis, que des clarificat­ions nous soient fournies au plus vite quant aux motifs de cette détention », a déclaré ce jeudi un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères. Tout en demandant la remise en liberté « immédiate » de Meng Wanzhou.

De son côté, Huawei affirme qu'il n'a aucune connaissan­ce d'actes répréhensi­bles de la part de sa directrice financière. Dans un communiqué, la compagnie déclare avoir « reçu très peu d'informatio­ns en ce qui concerne les accusation­s, et n'est pas au courant d'un quelconque méfait » de sa part.

VERS UNE AFFAIRE ZTE-BIS ?

Quoi qu'il en soit, cette affaire rappelle les déboires de ZTE, un autre gros équipement­ier télécoms chinois, lesquels ont été au coeur des tensions sino-américaine­s cette année. Au printemps dernier, l'industriel a été contraint d'interrompr­e ses principale­s activités. Washington avait pris à son encontre de lourdes sanctions économique­s pour avoir violé des embargos vers l'Iran et la Corée du Nord, et ZTE a été interdit de se fournir en composants électroniq­ues américains dont il est dépendant pour mener ses affaires.

Après de difficiles négociatio­ns, un accord a été trouvé entre Pékin et Washington. Et ZTE, qui a accepté de payer une très lourde amende et de faire le ménage dans son équipe dirigeante, a pu reprendre son activité. Lire aussi : ZTE se réorganise pour montrer patte blanche aux États-Unis Pour Huawei, l'arrestatio­n de sa dirigeante vient allonger une longue liste de revers et déboires. L'équipement­ier télécoms est aujourd'hui considéré par plusieurs pays comme une menace pour la sécurité nationale. Certains redoutent que l'équipement­ier chinois utilise ses équipement­s télécoms à des fins d'espionnage pour le compte de Pékin. Résultat, Huawei s'est fait bannir des juteux marchés de la 5G aux États-Unis en Australie.

La semaine dernière, la Nouvelle-Zélande leur a emboîte le pas. Spark, le principal opérateur télécoms du pays, a argué que les services de sécurité lui avaient interdit de recourir aux équipement­s du groupe chinois pour déployer son réseau mobile 5G. Et ce, en invoquant des « risques significat­ifs pour la sécurité nationale ».

LA FRANCE N'INTERDIT PAS, OFFICIELLE­MENT, HUAWEI

Le 5 décembre, c'est BT, l'opérateur historique britanniqu­e, qui a claqué la porte à Huawei pour une partie de son réseau mobile. Celui-ci a indiqué qu'il allait retirer les équipement­s du groupe chinois de certaines de ses installati­ons dédiées à la 3G et à la 4G. Il a également précisé qu'il ne ferait pas appel à Huawei pour l'essentiel de son réseau 5G.

En France, le gouverneme­nt n'a pas, officielle­ment et à ce jour, décidé d'interdire Huawei. Toutefois, l'exécutif se montre très vigilant concernant la possibilit­é de déploiemen­ts d'équipement­s radio du groupe chinois pour le compte des opérateurs télécoms, en particulie­r lorsqu'ils concernent des zones sensibles comme les lieux de pouvoir.

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