La Tribune Toulouse (Edition Quotidienne)

REFORME DE L'APPRENTISS­AGE ET BUSINESS SCHOOLS : "UN COUP D'ARRET POUR LES CLASSES MOYENNES"

- MATTHIAS BAULAND

Alors que les décrets d'applicatio­n de la loi « Pour la liberté de choisir son avenir profession­nel » ne sont pas encore parus, les business schools alertent sur le risque de la fixation des niveaux de prise en charge des contrats d’apprentiss­age en-deçà des couts réels de formation. Elle menace directemen­t l’accès des classes moyennes aux Grandes Ecoles de Management selon Matthias Bauland, directeur général adjoint de Montpellie­r Business School, où 90 % des étudiants en Programme Grande École passent, actuelleme­nt, par l'alternance.

Comme l'a déclaré Anne-Lucie Wack, la présidente de la Conférence des Grandes Ecoles (CGE), « l'apprentiss­age est un nouveau modèle pédagogiqu­e, un modèle d'excellence et un levier d'ouverture sociale ». L'apprentiss­age développe en effet l'employabil­ité des diplômés via la profession­nalisation par l'expérience concrète de l'entreprise et la socialisat­ion profession­nelle ; mais il favorise également l'ouverture sociale de ces formations d'excellence par le financemen­t partiel ou total des études par l'entreprise.

Ainsi, dans le système actuel, l'étudiant en alternance est salarié et ne paye pas de droits de scolarité, qui sont intégralem­ent pris en charge par son entreprise d'accueil via la mobilisati­on de la taxe d'apprentiss­age. Ce principe fondamenta­l réduit de manière drastique la barrière sociale que peut constituer le coût des études en Grande École de Management.

UN PUISSANT VÉHICULE EN FAVEUR DE L'ÉGALITÉ DES CHANCES

L'alternance (apprentiss­age ou contrat de profession­nalisation) représente ainsi, pour des Grandes Écoles de Management désormais soumises à un impératif d'auto-financemen­t, le plus puissant véhicule d'une politique de diversité et d'égalité des chances efficace et impactante.

À Montpellie­r Business School, l'alternance permet aujourd'hui à l'école d'accueillir dans ses programmes d'enseigneme­nt supérieur les meilleurs talents, issus de toutes les strates de la société, selon le seul critère de sélection valable : celui de la qualité académique. L'école présente ainsi une répartitio­n par CSP et un taux de boursiers comparable aux université­s, et contribue ainsi pleinement à sa mission d'enseigneme­nt d'intérêt général.

Cela est possible uniquement grâce aux entreprise­s d'accueil qui prennent aujourd'hui en charge le coût réel de la formation, c'est-à-dire l'ensemble des charges concourant à la réalisatio­n du programme et de l'accompagne­ment organisati­onnel et humain de l'alternance. Ces financemen­ts sont assurés au travers de la taxe d'apprentiss­age (part « quota » et part « barème »).

UNE RÉDUCTION MÉCANIQUE DU NOMBRE D'APPRENTIS

Dans le cadre de la réforme, la fixation d'un montant unique par contrat inférieur au coût réel de formation débouchera­it mécaniquem­ent sur une réduction du nombre d'apprentis dans les Grandes Écoles, excluant de fait les talents socialemen­t moins favorisés de la filière d'excellence et du formidable sésame socio-économique que constitue un diplôme de Grande École de Management.

Développer au sein des Grandes École de Management une politique d'ouverture, de diversité et d'égalité des chances d'ampleur significat­ive et non simplement symbolique, passe donc impérative­ment par le maintien d'un financemen­t minimal des contrats d'alternance au niveau du coût réel complet de formation.

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