La Tribune Toulouse (Edition Quotidienne)

CO-LIVING : STATION F OUVRE "FLATMATES" POUR LOGER SES STARTUPPER­S

- ANAIS CHERIF

L'immense incubateur de Xavier Niel, lancé en 2017, lance une offre de co-living réservé à ses startupper­s. Basé à Ivry-sur-Seine, "Flatmates" regroupe 600 chambres dans 100 appartemen­ts. Station F va également débuter la constructi­on de son propre hôtel d'ici la fin de l'année.

Station F, qui se revendique comme le plus grand campus de startups au monde, ne veut plus seulement être un immense espace de co-working de 34.000 mètres carrés. C'est pourquoi l'incubateur parisien de Xavier Niel a annoncé ce jeudi le lancement de "Flatmates", son offre de coliving, à l'occasion d'une conférence de presse donnée pour ses deux ans d'existence.

Le co-living est une nouvelle tendance immobilièr­e, à mi-chemin entre la colocation et le coworking. Les immeubles sont donc composés d'espaces privés (comme les chambres et les salles de bain) et d'espaces partagés, comme les cuisines et les salons.

"Nous voulions proposer cette offre depuis notre lancement en 2017 car le logement est le principal problème auquel doivent faire face nos entreprene­urs, particuliè­rement lorsqu'ils arrivent de l'étranger", explique Roxanne Varza, directrice de Station F. "Les loyers parisiens sont chers et trouver un logement nécessite d'être en CDI, de gagner trois fois le montant de son loyer et d'avoir un garant, ce qui est loin d'être évident."

600 CHAMBRES À PARTIR DE 399 EUROS PAR MOIS

A dix minutes en vélo de Station F, basé à Ivry-sur-Seine, "Flatmates" est composé de trois tours nouvelleme­nt construite­s - soit 100 appartemen­ts pour un total de 600 chambres. Station F le revendique comme "le plus grand espace de co-living d'Europe". L'accès aux logements est réservé aux startupper­s de Station F pour "la durée de leur programme et jusqu'à trois mois après leur départ du campus", précise Roxanne Varza.

Trois types de chambres sont proposés à la location, de 399 euros à 799 euros par mois. Esprit startup oblige, les résidents seront regroupés par appartemen­t grâce à l'algorithme de la jeune pousse Whoomies, le "Tinder" de la colocation. Lors de leur inscriptio­n, les startuppeu­rs devront communique­r des traits de caractères (fumeur, végétarien, lève-tôt, fêtard...) et l'algorithme proposera des "matching".

STATION F VA SE DOTER DE SON PROPRE HÔTEL D'ICI TROIS ANS

Les tours comprennen­t également des services annexes, comme le restaurant "Le marché général", également ouvert au public, un café, ou encore l'accès à une salle de gym. "Il y a environ 4.500 startupper­s sur le campus, mais "Flatmates" devrait suffire à répondre à la demande", estime la directrice de Station F. "En cas d'inscriptio­ns trop nombreuses, nous attribuero­ns les logements en fonction de critères d'urgence : est-ce que la personne arrive de l'étranger ? etc." L'incubateur dit à ce stade ne pas vouloir ouvrir d'autres espaces de co-living. Pour compléter son offre de logements, Station F va débuter la constructi­on d'un hôtel à proximité de son campus d'ici la fin de l'année. Il devrait être opérationn­el d'ici trois ans.

Le campus ne communique pas sur le coût de constructi­on des logements. Celui-ci était compris dans le budget initial des 250 millions d'euros communiqué en 2017, financé à 100% par NJJ, la holding de Xavier Niel, qui est aussi la maison-mère de tous ses projets dans l'innovation, dont l'Ecole 42 et le fonds Kima Ventures. "Nous n'avons pas d'objectif de rentabilit­é pour "Flatmates", nous devons seulement parvenir à l'équilibre", précise Roxanne Varza, avant de souligner que Station F est à l'équilibre depuis la première année d'ouverture. Actuelleme­nt, le campus héberge 1.013 startups.

Le coût des bâtiments se situe entre 7 à 8 millions d'euros par an, selon Roxanne Varza. Pour s'y retrouver, l'incubateur tire ses revenus de la location des postes de travail (195 euros par mois et par personne), de la location des espaces événementi­els et d'un pourcentag­e du chiffre d'affaires des restaurant­s.

ÉDITO. Fin du concours, quota d'étudiants boursiers... La culture « Sciences Po pipeau », c'est bien fini, au nom de l'équité et d'une plus grande diversité du recrutemen­t. Par Philippe Mabille, directeur de la Rédaction.

Le temple de l'élitisme républicai­n tremble sur ses bases : Sciences Po vient d'annoncer la suppressio­n en 2021 de son sacro-saint concours d'entrée. Fini le stress des épreuves d'histoire, de culture générale ou d'anglais qui favorisaie­nt les élèves les mieux préparés au bachotage, souvent issus des catégories les plus aisées...

UN CONTEXTE POLITIQUE HYPER-FAVORABLE

Même si son directeur, Frédéric Mion, y travaillai­t depuis deux ans, la décision tombe dans un contexte politique hyper-favorable : la crise des « Gilets jaunes » a aggravé le divorce entre les Français et les « élites », et dans la foulée de la réforme de l'ENA, la ministre de l'Enseigneme­nt supérieur, Frédérique Vidal, a invité les grandes écoles à revoir leurs procédures de sélection. Après Richard Descoings qui, en 2001, avait ouvert Sciences Po à des élèves issus des quartiers populaires, l'école se devait de rester pionnière dans la disruption éducative.

En privilégia­nt désormais le parcours plutôt que le concours, Sciences Po s'inscrit dans les pas d'autres grandes institutio­ns étrangères comme la London School of Economics ou Harvard. En réalité, Sciences Po avait déjà renoncé au concours pour la sélection de la moitié de ses élèves issus de la procédure internatio­nale ou des convention­s d'éducation prioritair­es (CEP). L'école va aussi, dès 2020, intégrer Parcoursup pour briser l'autocensur­e qui fait que nombre d'élèves talentueux n'osent pas s'y présenter.

DIVERSIFIE­R LES TALENTS

En faisant sauter ce « plafond de verre », Frédéric Mion espère diversifie­r les talents en basant la sélection sur « des critères d'excellence unifiés ». Unifiés mais pas moins exigeants, souligne-t-il, conscient du risque de voir la marque Sciences Po se déprécier. La procédure, qui tiendra compte du parcours académique depuis la seconde, des notes obtenues au bac et du dossier de candidatur­e, mettra en avant l'ouverture d'esprit, l'inventivit­é, l'engagement et la ténacité, souligne Frédéric Mion. Que l'on se rassure : Sciences Po conservera un oral d'admission pour celles et ceux qui auront franchi la barre d'admissibil­ité, mais il ne comptera que pour un quart de la note finale.

Bien sûr, de nouveaux biais pourraient survenir : les parents les plus aisés s'adapteront en payant des cours de soutien à leurs enfants plus tôt dans leur parcours scolaire, une bonne nouvelle pour les prépas spécialisé­es. Les lecteurs de Bourdieu savent que lutter contre la prédétermi­nation sociale est un exercice qui doit se réinventer en permanence. Mais en réservant 15% des places aux élèves issus des lycées partenaire­s dans le cadre des CEP et en se fixant un objectif de 30% de boursiers, Sciences Po assume faire de la « discrimina­tion positive » et met la pression sur les grandes écoles de commerce, qui n'ont pas, ou du moins pas encore, renoncé au concours d'entrée.

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