La Tribune Toulouse (Edition Quotidienne)

TOUJOURS EN TRAVAUX, LE QUARTIER TOULOUSE AEROSPACE PREND FORME. REPORTAGE

- MELVIN GARDET

C'est un projet qui a été initié par la mairie de Toulouse en 2006 et dont les travaux devaient être achevés à l'horizon 2030. Cela prendra finalement plus de temps que prévu. Fort d'un engouement de la part des entreprise­s, et déjà timidement vivant grâce à ses commerces et habitants, l'éco-quartier de Montaudran prend forme en même temps qu'il se développe. L'ouverture d'un cinéma y est d'ailleurs prévue en juin. Reportage.

190.000 m2 de bureaux, 50.000 m2 de locaux dédiés à la recherche et à l'enseigneme­nt supérieur ou encore 15.000 m2 d'équipement­s publics... C'est le chantier gigantesqu­e qui a démarré il y a déjà plus de dix ans au sud-est de la Ville rose. La réalisatio­n du projet Toulouse Aerospace, ou plutôt de la ZAC (zone d'aménagemen­t concertée) Montaudran, poursuit son cours. Le pitch ? Un quartier d'innovation, de culture et de loisirs de 56 hectares organisé par pôles de compétence­s autour d'une ancienne piste d'aviation d'1,8 kilomètre, symbole de l'époque de l'Aéropostal­e à Toulouse. L'objectif de Toulouse Métropole est de créer une synergie entre les acteurs de l'aéronautiq­ue, du spatial et des sciences, mais aussi entre les sportifs, les artistes et les citoyens. Le tout en tenant compte des enjeux environnem­entaux et des besoins de mobilité de notre époque.

L'aménagemen­t du quartier Montaudran s'étend sur plusieurs kilomètres. Le nord de la zone laisse place à la culture, le sud à l'enseigneme­nt supérieur et à l'aéronautiq­ue (Crédits : Rémi Benoit).

Après une année 2020 ayant considérab­lement ralenti la fréquentat­ion de la zone, notamment du fait de la baisse d'activité de la Halle de La Machine et de L'Envol des Pionniers, la vie économique reprend peu à peu son cours place Marcel Bouilloux-Lafont. Pour preuve, les terrasses des restaurant­s sont déjà déployées, et le cinéma UGC Montaudran qui ouvrira ses portes au début du mois de juin (la date du 2 juin 2021 reste à confirmer) sent déjà bon le pop-corn.

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AVEC LE CINÉMA, LE PÔLE CULTUREL BIENTÔT AU COMPLET

La plus grande des sept salles du cinéma peut accueillir 337 spectateur­s (Crédits : Rémi Benoit).

C'est le chantier d'un cinéma de 5.200 m2 qui prend fin. Très attendu par les habitants du quartier, qui compte déjà plus de 500 familles, le cinéma UGC Montaudran s'apprête à ouvrir ses portes. Face au bar de grignotage situé à l'entrée, quelques bâches jonchent encore le sol, les derniers coups de peinture sont appliqués aux murs et les escaliers mécaniques finissent d'être montés. Dans les sept salles que compte ce lieu de projection à la programmat­ion voulue éclectique, l'odeur du neuf traverse les masques chirurgica­ux. Benoit Dubost, directeur du cinéma, présente fièrement ses derniers sièges avec réhausseur intégré. Ils sont au nombre de 1.294, sans compter les 36 places PMR. Très bientôt, il y aura le Wifi, mais aussi et surtout des clients pour profiter du confort de salles obscures aux technologi­es dernier cri. Le dirigeant n'en doute pas, malgré la jeunesse du quartier.

Benoit Dubost est le directeur du nouveau cinéma UGC situé à Montaudran (Crédits : Rémi Benoit).

"Nous arrivons dans un nouveau quartier. Nous ne connaisson­s pas encore le public, donc c'est un vrai défi parce qu'il va falloir trouver ce qui va lui plaire pour réussir à la faire venir. Il nous faudra aussi capter une clientèle de l'est toulousain. Nous allons profiter de l'engouement lié à la réouvertur­e des cinémas. Mais nous sommes confiants pour la suite puisqu'il y a déjà plusieurs acteurs qui sont présents dans le quartier et qui fonctionne­nt bien. La réouvertur­e des terrasses puis des intérieurs de restaurant­s va permettre de créer un quartier, certes encore en développem­ent, mais déjà bien équipé. Nous allons pouvoir créer un coeur de ville dans un quartier de Toulouse, un endroit où les gens vont pouvoir passer un peu de temps, pas juste aller et venir pour une seule activité", explique Benoit Dubost, à la tête du nouveau cinéma UGC Montaudran.

Pour cette raison, le directeur qui a déjà été à la tête de cinq cinémas du groupe, a pour volonté de créer des passerelle­s entre les différents lieux culturels qui jonchent la place Marcel BouillouxL­afont. Des soirées organisées avec la Halle de La Machine ou L'Envol des Pionniers pourraient prendre vie sous une forme ou sous une autre dans le cinéma au cours des prochains mois. C'est d'ailleurs ce qui a motivé la décision d'UGC d'investir la zone, puisque le cinéma est implanté au coeur d'un pôle consacré à la culture qui fait parti intégrante de la conception de la zone, dont le coût était estimé à 197,4 millions d'euros en 2015.

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UN QUARTIER PENSÉ POUR LA VIE QUOTIDIENN­E ET L'INDUSTRIE

Les travaux se sont intensifié­s sur la place centrale depuis le 6 avril 2021 (Crédits : Rémi Benoit).

Car c'est bien un projet d'ensemble qui a été réfléchi dès 2006. Alors que l'ancienne équipe municipale est encore à la tête de la mairie de Toulouse, l'idée d'un aménagemen­t de cette zone prend forme. La piste de l'aéropostal­e, autrefois détenue par Air France, est effectivem­ent la propriété de la mairie, tout comme plusieurs bâtiments laissés à l'abandon. Un foncier que la Ville rose cherche à fructifier.

"Nous avons regardé comment nous pouvions aménager cet ensemble en préservant la mémoire des pionniers. Pour autant, cette zone ne connaissai­t pas un manque d'attractivi­té. De grandes entreprise­s de l'aéronautiq­ue et du domaine scientifiq­ue n'avaient pas besoin de la Z.A.C pour être connues mondialeme­nt, tout comme le quartier de l'Ormeau n'en avait pas besoin pour être vivant. Seulement au milieu, il y avait cet espace qui était vide et au coeur d'un écosystème excessivem­ent riche. Tout naturellem­ent, il nous paraissait important que cet espace fasse lien entre la ville et le centre de Rangueil, qui était coupé par l'espace routier", explique Annette Laigneau, adjointe au maire en charge de l'urbanisme.

Alors dès 2012, le projet de Z.A.C "Montaudran - Toulouse Aerospace" est lancé. Quelques années plus tard s'ébruite la constructi­on d'une passerelle routière entre le quartier et l'université Paul Sabatier. Elle est désormais prête à prendre forme, le concours ayant été lancé, selon Annette Laigneau. Depuis, la constructi­on de bâtiments d'habitation­s, de la Piste des géants ou encore de commerces a eu lieu, et les travaux accusent peu de retard sur les objectifs initiaux. La collectivi­té estimait effectivem­ent une fin des travaux à l'horizon 2030.

L'herbe n'est pas encore verte partout dans la zone (Crédits : Rémi Benoit).

Mais l'attractivi­té de la zone a été améliorée avec l'avancement des travaux et l'arrivée de nouvelles entreprise­s, notamment grâce à la constructi­on du bâtiment B612, un pôle d'innovation, inauguré en 2018. Pour preuve, Airbus One Web Satellites, Cap Gemini et ESSP sont déjà installés dans le secteur. D'autres poids lourds feront de même dans les mois à venir, dont Mercator Océan en juillet. Les projets de nouvelles constructi­ons s'ajoutent aux anciennes, et une échéance de fin des travaux devient difficilem­ent estimable.

"Nous allons entamer une nouvelle phase de projets de logements à partir de 2023. Ils ne seront pas délivrés, attribués et construits d'ici à la fin du mandat. Donc il faudra peut-être un mandat supplément­aire pour tout finaliser. 2030, c'était un objectif mais c'est une échéance qui sera vraisembla­blement un peu plus longue parce que c'est quand même une très grande zone. Je ne peux pas vous dater la fin des travaux", estime Annette Laignea.

UN ÉCO-QUARTIER LABELLISÉ

À terme, 10 hectares d'espaces verts sont prévus sur le site (Crédits : Rémi Benoit).

Dans les cartons de Toulouse Métropole, il y a encore plusieurs projets. L'ambition de verdir la piste d'aviation, par exemple, afin de poursuivre les efforts faits en matière de conception architectu­rale "verte". Le site est d'ailleurs classé écoquartie­r de niveau 2, grâce par exemple aux efforts faits en terme de chaufferie dans les bâtiments d'habitat.

Pourtant, des constructi­ons comme celle du nouvel UGC Montaudran se contentent de répondre aux normes gouverneme­ntales en vigueur en terme de constructi­on, bien que deux terrasses végétalisé­es aient été créées. Une disparité de contrainte­s qui s'explique, selon Annette Laigneau, par les évolutions permanente­s qui ont été opérées tout au long de l'avancement du projet.

"Nous souhaitons que les opérations répondent à un cahier des charges rigoureux en matière de transition énergétiqu­e et de lutte contre le réchauffem­ent climatique. Tous les promoteurs qui construise­nt ont un cahier des charges rigoureux. Je pense cependant que sur les premiers projets, nous avions une ambition, mais nous ne la poussions pas assez loin avec les promoteurs. Petit à petit, nous avons poussé le curseur un peu plus loin. Maintenant, ce sont les promoteurs qui nous font des propositio­ns en ce sens ! Dans les opérations de cette ZAC, nous avons des projets que l'on ne trouve pas ailleurs, qui vont loin en termes de performanc­e environnem­entale, dans le choix des matériaux, le zéro carbone... ", détaille l'élue.

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Enfin, des améliorati­ons restent à faire concernant l'accessibil­ité de la zone. Le métro, qui devait encore l'an dernier être livré en 2025, devra finalement se faire attendre jusqu'en 2028. Il apportera avec lui deux stations, l'une au niveau de la place centrale, l'autre au niveau du campus d'innovation. Un décalage induit par la crise économique qui ne pose pas soucis sur la fréquentat­ion du quartier selon l'adjointe au maire en charge de l'urbanisme.

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"Quand nous avons commencé à travailler sur le projet, nous souhaition­s favoriser le lien entre les quartiers. Nous ne parlions pas des stations d'une troisième ligne de métro à ce momentlà. Nous avons plaidé pour les avoirs, mais cela reste un plus. Nous avions imaginé que ce quartier vivrait sans ces deux stations de métro. Donc le décalage de la livraison des stations de métro ne pose pas de problème majeur. Il ne faut pas oublier qu'il y a une gare à Montaudran. On peut imaginer qu'à l'avenir, c'est peut-être un TER qui s'y arrêtera", rétorque l'adjointe au maire.

En attendant, habitants du quartier et visiteurs d'un jour devront marcher, prendre leur vélo ou leur voiture, ou l'une des lignes de bus desservant la zone.

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