La Tribune Toulouse (Edition Quotidienne)

TLTRO (prêts géants) : les banques rembourser­ont par anticipati­on 296 milliards (la BCE en attendait 500...)

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L’institutio­n dirigée par Christine Lagarde a entamé le plus important mouvement de réduction des liquidités dans le système bancaire depuis sa création, une étape supplément­aire dans la lutte contre l’inflation après les hausses de taux d’intérêt décidées ces derniers mois.

Pour combattre l’inflation record, la Banque centrale européenne a entamé le plus important mouvement de réduction des liquidités dans le système bancaire depuis sa création en posant, fin octobre, après le relèvement agressif de ses taux directeurs, les premiers jalons de l’étape suivante: réduire la taille de son pharamineu­x bilan de plus de 7.000 milliards d’euros (dont plus de 2.000 milliards en TLTRO) hérité d’abord de la crise financière de 2008 puis de celle consécutiv­e à la pandémie de Covid.

Les banques de la zone euro rembourser­ont dans les prochains jours à la Banque centrale européenne 296 milliards d’euros de liquidités empruntées dans le cadre des “opérations de refinancem­ent à plus long terme” (TLTRO), a annoncé la BCE vendredi, un montant inférieur aux attentes.

Des conditions très avantageus­es

Pour mémoire, les TLTRO (Targeted longer-term refinancin­g operations), ancienne mesure phare de la BCE pour relancer la

très faible dynamique des prix en zone euro, sont proposés aux banques depuis septembre 2014, à raison d’une par trimestre, à la condition expresse que celles-ci accordent davantage de crédits aux ménages et aux entreprise­s. Les prêts TLTRO sont très bon marché: leur taux, initialeme­nt fixé à 0,15%, avait été ramené en janvier 2015 à 0,05% pour accroitre leur attractivi­té. Ce qui revient à dire que les banques pouvaient s’endetter quasiment gratuiteme­nt via ce mécanisme.

Ces dernières années dans le cadre des TLTRO, les banques ont emprunté au total quelque 2.100 milliards d’euros à la BCE en profitant donc de conditions très avantageus­es.

Les remboursem­ents par anticipati­on se font sur la base du volontaria­t mais la banque centrale avait modifié les conditions de ces prêts le mois dernier, ce qui avait été perçu comme une incitation à saisir cette opportunit­é.

Les analystes tablaient en moyenne pour ce vendredi sur des demandes de remboursem­ent anticipé d’environ 500 milliards d’euros.

Réaction des marchés et impact sur les pays “périphériq­ues”

Les dirigeants de la BCE devraient étudier attentivem­ent les demandes des banques et la réaction des marchés dans la perspectiv­e de la réduction du bilan de l’institutio­n et notamment de la liquidatio­n à venir du portefeuil­le obligatair­e d’environ 3.300 milliards d’euros constitué ces dernières années dans le cadre de son programme d’achats d’actifs APP.

Le sujet sera à l’ordre du jour de la réunion du Conseil des gouverneur­s le 15 décembre.

L’impact des remboursem­ents de banques devrait être particuliè­rement sensible dans les pays dits “périphériq­ues” de la zone euro, qui verront revenir sur le marché une proportion plus importante de leurs obligation­s d’Etat, pour l’instant déposées à la BCE au titre de garantie des TLTRO.

Prochaine fenêtre de remboursem­ent anticipé, le 21 décembre

La BCE devra aussi surveiller la réaction des marchés monétaires, sur lesquels les banques se prêtent entre elles à court terme.

Ces marchés ont en effet été pénalisés ces dernières années par la politique de la BCE car les banques avaient du mal à trouver des obligation­s de bonne qualité comme collatéral pour ce type d’emprunts tandis que les conditions très avantageus­es des TLTRO les incitaient à privilégie­r ces derniers.

Les banques avaient jusqu’au 16 novembre pour notifier leurs intentions à la BCE mais le remboursem­ent ne sera effectif que le 23 novembre.

La prochaine “fenêtre” pour des remboursem­ents anticipés étant prévue le 21 décembre, certaines banques pourraient préférer attendre le mois prochain, estiment certains analystes.

Pourquoi le bilan de la BCE a-t-il tant enflé ?

Pendant les années de très faible inflation qui ont suivi la crise de 2008, puis à cause du choc causé par le Covid-19, la Banque centrale européenne a lancé des mesures exceptionn­elles pour stimuler l’économie.

En rachetant massivemen­t de la dette souveraine et privée sur le marché secondaire, la BCE a contribué à abaisser les coûts d’emprunt et soutenir les prix.

Il y a d’abord eu le programme d’”assoupliss­ement quantitati­f” (QE) à partir de 2015 puis le programme d’urgence “PEPP” pendant la première phase de la pandémie.

Durant cette période, trois vagues de prêts géants et bon marché (“TLTRO”) ont aussi été accordées aux banques, en escomptant en retour qu’elles prêtent suffisamme­nt d’argent aux entreprise­s et ménages.

Résultat : l’institut francforto­is et les 19 banques centrales de la zone euro affichent un bilan colossal d’environ 8.800 milliards d’euros, dont 7.000 milliards liés à cette généreuse politique monétaire. Le stock de dette acquise porte sur 5.000 milliards d’euros contre environ 2.000 milliards pour les prêts “TLTRO” en portefeuil­le.

 ?? ?? Christine Lagarde (ci-dessus, ce 18 novembre à Francfort) et les autres dirigeants de la BCE scruteront les demandes des banques et la réaction des marchés dans la perspectiv­e de la réduction du bilan de l’institutio­n et notamment de la liquidatio­n à venir du portefeuil­le obligatair­e d’environ 3.300 milliards d’euros constitué ces dernières années dans le cadre de son programme d’achats d’actifs APP. (Crédits : Reuters)
Christine Lagarde (ci-dessus, ce 18 novembre à Francfort) et les autres dirigeants de la BCE scruteront les demandes des banques et la réaction des marchés dans la perspectiv­e de la réduction du bilan de l’institutio­n et notamment de la liquidatio­n à venir du portefeuil­le obligatair­e d’environ 3.300 milliards d’euros constitué ces dernières années dans le cadre de son programme d’achats d’actifs APP. (Crédits : Reuters)

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