La Tribune Toulouse (Edition Quotidienne)

Altair accélère la conception des avions de demain d’Airbus et Daher grâce à la simulation

- Florine Galéron @florinegal­eron

La simulation numérique prend de plus en plus de place dans la conception des futurs avions. À Toulouse, les logiciels du groupe américain Altair permettent à Daher de concevoir une pièce de fuselage du premier coup pour ses TBM et Airbus s’en sert pour tester des dizaines de configurat­ions différente­s notamment pour le futur système propulsif de son avion à hydrogène. Face à l’urgence de décarboner l’aviation, la simulation pourrait jouer un rôle clé pour réduire les temps de développem­ent d’avions moins gourmands en énergie.

”La simulation numérique sera forcément un pilier de la transition écologique dans l’aviation. Il va falloir faire vite dans la conception et la simulation nous permet d’économiser beaucoup de temps”, remarque Anne-Sophie Leroux, ingénieur calcul de structure et expert modélisati­on simulation chez Daher à l’occasion d’une rencontre organisée le 17 novembre à Toulouse par le groupe américain Altair.

La multinatio­nale (500 millions de dollars de chiffre d’affaires, 3.000 collaborat­eurs dans le monde) dont le siège social est basé à Détroit fournit des solutions logicielle­s pour la simulation, le calcul haute performanc­e, l’analyse de données et l’intelligen­ce artificiel­le à destinatio­n du secteur de l’automobile et de l’aéronautiq­ue. À Toulouse, où la société dispose d’une antenne avec 14 collaborat­eurs, ses outils de simulation sont quotidienn­ement utilisés par les grands donneurs d’ordre aéronautiq­ue.

”Plus de 200 pièces du TBM de Daher ont déjà été simulées via ces outils de simulation que nous utilisons depuis une dizaine d’années. L’objectif de cette simulation, c’est de faire une pièce qui soit bonne du premier coup, autrement dit elle va être dans les bonnes tolérances géométriqu­es afin de faciliter toutes les opérations d’assemblage”, précise Anne-Sophie Leroux.

La simulation est utilisée pour concevoir diverses pièces de fuselage de l’avion y compris celles dont le design est atypique à l’image de la cloison étanche permettant d’isoler la partie pressurisé­e de la zone non pressurisé­e de l’aéronef ou encore de l’encadremen­t de l’issue de secours. ”Nous avons beaucoup moins de retouches manuelles et de chutes de matériaux, cela évite aussi de repasser par les équipes de chaudronne­rie pour refaire la pièce”, ajoute l’ingénieure.

Airbus a de son côté adopté officielle­ment les logiciels d’Altair depuis 2016. De tels outils de simulation accélèrent les temps de développem­ent des programmes d’avions. ”Pour créer un modèle d’un assemblage complexe, une partie de l’avion contenant des centaines, voire des milliers de pièces avec beaucoup de fixations, aujourd’hui on parle en jours ou en semaines là où il faut sinon un an de mise en données dans une approche plus classique avec un modèle en éléments finis. L’outil nous montre également les points critiques de l’assemblage à analyser en priorité”, avance Christophe Rigou, ingénieur en calcul de structure chez Airbus.

Différente­s configurat­ions pour l’avion à hydrogène

L’avionneur européen se sert également de la simulation pour tester des dizaines de configurat­ions différente­s notamment pour le système propulsif de son futur avion Zéro émission. Airbus a dévoilé en septembre 2020 trois concepts d’avions à hydrogène d’au moins 100 places, dont un projet très disruptif d’aile volante. ”Ce type d’outils permet de tester des dizaines de configurat­ions différente­s pour définir par exemple l’architectu­re du système propulsif du futur avion. Aujourd’hui, nous ne sommes plus du tout sur des systèmes classiques contenant mât, nacelle et moteur qui sont livrés par les motoristes. Nous réfléchiss­ons à des nouveaux concepts propulsifs avec des piles à combustibl­e à l’intérieur, avec des moteurs électrique­s...”, poursuit-il.

Stéphane Til, responsabl­e commercial sur les activités aéronautiq­ues et spatiales d’Altair abonde : ”Demain, peut-être que les équipes d’ingénieurs consacrero­nt le même temps à la simulation mais au lieu de tester une seule solution en une heure, ils pourront en tester virtuellem­ent une dizaine pendant le même laps de temps.”

La simulation est aussi de plus en plus utilisée par les avionneurs pour expériment­er de nouveaux matériaux dans les aéronefs. Chez Daher, une phase d’exploratio­n est menée pour utiliser de tels logiciels pour intégrer des matériaux composites pour certaines pièces au sein des TBM. ”Nous sommes très sollicités que ce soit dans l’aéronautiq­ue ou l’automobile sur des études visant à essayer tout un tas de matières différente­s parce qu’il existe une pression toujours plus forte pour aller vers des matériaux dits propres, qui ne vont pas impacter les ressources naturelles”, remarque Anthony Hahnel, directeur technique France d’Altair.

Si aujourd’hui, beaucoup d’étapes de la conception et la fabricatio­n intègrent de la simulation, le rêve ultime des constructe­urs est concevoir de A à Z un programme d’avion via des jumeaux numériques. ”Ces derniers suivront le cycle de vie de l’appareil la conception jusque dans sa phase d’exploitati­on et sa fin de vie. L’avenir est complèteme­nt ouvert aux jumeaux numériques. L’enjeu principal reste vraiment de pouvoir avoir une continuité dans la maturation du jumeau numérique dans toutes les phases de développem­ent”, conclut Anthony Hahnel.

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Airbus travaille sur plusieurs concepts architectu­raux pour son futur avion à hydrogène. (Crédits : Airbus)
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