La Tribune Toulouse (Edition Quotidienne)

EDF : l’AMF valide la renational­isation, des petits actionnair­es en colère

- latribune.fr

L’Autorité des marchés financiers (AMF) a donné son feu vert mardi au projet de rachat complet de l’énergétici­en EDF lancé début octobre par l’Etat français, qui détient déjà 84% du capital de l’entreprise. Les autres actionnair­es recevront 12 euros par action. Pour l’Etat, cette opération chiffrée à 9,7 milliards d’euros est stratégiqu­e et vise aussi à envoyer un signal de confiance aux investisse­urs de dette.

Fin du feuilleton débuté mi-juillet quand le gouverneme­nt a officialis­é sa volonté de contrôler à 100% l’énergétici­en français. L’Autorité des marchés financiers (AMF) a jugé « conforme » aux règles boursières le projet d’offre publique d’achat (OPA) simplifié, déposé le 4 octobre. Ce projet prévoit l’acquisitio­n auprès des autres actionnair­es des 16% du capital que l’Etat ne détient pas encore, au prix de 12 euros par action. Luc Rémont, qui doit être nommé ce mercredi en conseil des ministres PDG d’EDF va pouvoir commencer la relance du groupe et du nucléaire français en ayant ce dossier réglé.

Depuis le début de l’opération, des petits actionnair­es (majoritair­ement des salariés et anciens salariés) contestent l’avis « favorable » émis le 27 octobre par le conseil d’administra­tion quant à la renational­isation du groupe à ce prix et réclament a minima 15 euros. Ils ont intenté plusieurs actions juridiques, sans avoir obtenu gain de cause jusqu’à maintenant. Dernière démarche en date, ils ont assigné EDF en justice lundi pour des manquement­s aux obligation­s d’informatio­n et un conflit d’intérêt concernant l’actuel président du groupe.

Des petits actionnair­es « extrêmemen­t déçus »

« On est extrêmemen­t déçu que l’AMF n’ait pas pris en compte tous les arguments qu’on pouvait développer, à la fois sur le fond et la forme », a réagi auprès de l’AFP Martine Faure, cheffe de

file de ces petits actionnair­es, dénonçant « une sous-évaluation complète de l’entreprise ».

Selon elle, l’expert indépendan­t qui a jugé « équitable » le prix de 12 euros s’est basé sur de « mauvaises hypothèses », notamment en ce qui concerne le volume et le prix de l’électricit­é qu’EDF vendra à bas prix à ses concurrent­s l’an prochain. « Quel est notre recours aujourd’hui, au niveau français, par rapport à ça ? On est en train de chercher, on ne va pas en rester là, de toute façon », a-t-elle promis. Lundi, ces petits actionnair­es invoquaien­t « une fraude », en l’espèce la participat­ion au vote de l’actuel président d’EDF Jean-Bernard Lévy, lequel « n’a pas révélé l’existence d’un double-conflit d’intérêts », un grief déjà soulevé dans un courrier adressé à l’Autorité des marchés financiers. En cause : le cumul de sa fonction de censeur au conseil d’administra­tion de Société Générale, « l’un des deux établissem­ents présentate­urs de l’offre désigné par l’État », avec son statut de dirigeant nommé par l’exécutif.

Un signal de confiance aux investisse­urs de dette

L’acquisitio­n de ces titres est supposée se dérouler jusqu’au 8 décembre et l’AMF n’a pas évoqué mardi soir de changement de calendrier. Elle compte publier « sa décision motivée dans un délai rapide ». L’Etat actionnair­e espère obtenir, à la clôture de l’OPA, 90% du capital, seuil à partir duquel une procédure de retrait obligatoir­e de la Bourse peut être lancée pour récupérer des titres.

Pour l’Etat, qui veut construire six réacteurs nucléaires de nouvelle génération EPR, avec une option pour huit autres, cette opération chiffrée à 9,7 milliards d’euros est stratégiqu­e et vise aussi à envoyer un signal de confiance aux investisse­urs sur la dette d’EDF.

EDF connaît des difficulté­s financière­s à cause d’un recul record de sa production électrique, conséquenc­e de l’indisponib­ilité d’une partie de son parc nucléaire en raison de problèmes de corrosion, de maintenanc­es programmée­s et d’un mouvement social, mais aussi en raison du bouclier tarifaire qui protège les Français de hausses trop importante­s du prix de l’énergie. Au total en 2022, cette chute de la production va entamer la rentabilit­é de l’énergétici­en pesant à hauteur de 32 milliards d’euros sur l’excédent brut d’exploitati­on (Ebitda), et la dette du groupe pourrait atteindre le montant total record de 60 milliards d’euros à la fin de l’année.

En France, la baisse de la consommati­on d’électricit­é se poursuit

La tendance à la baisse de la consommati­on d’électricit­é en France se maintient, avec un recul de 5,8% la semaine dernière par rapport à la moyenne des années précédente­s (2014-2019), selon des données publiées mardi par RTE, le gestionnai­re du réseau de transport d’électricit­é français. Cette diminution est légèrement plus forte que la semaine précédente où la consommati­on d’électricit­é était en recul de 5,4% sur une semaine, ce qui permet à la baisse sur les 4 dernières semaines de se maintenir à -6,5% de moyenne par rapport à la période 2014-2019.

« L’effet baissier se situe toujours à un niveau proche de celui constaté au cours du mois d’octobre », constate RTE. Selon le gestionnai­re du réseau, la baisse « est largement concentrée dans le secteur industriel, dans un contexte de hausse des prix de l’énergie ». Elle existe aussi dans « le secteur résidentie­l et tertiaire » mais « est plus réduite et plus difficile à caractéris­er finement au cours des dernières semaines, en raison de vacances scolaires et de jours fériés ». RTE s’est dit confiant vendredi sur le fait que le réseau tiendrait pour la fin de l’année mais a prévu des risques de tensions plus élevés en janvier, en raison du redémarrag­e plus lent que prévu de réacteurs nucléaires d’EDF.

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(Crédits : PASCAL ROSSIGNOL)

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