La Tribune Toulouse (Edition Quotidienne)
Brevets européens : quelles sont les régions et filières françaises qui tirent l’innovation ?
La technologie informatique et l’IA, des moteurs essentiels
Contrairement à la tendance globale, largement tournée vers la communication numérique (wifi, 5G, etc), les secteurs les plus actifs en termes de dépôts de brevets en France sont : le transport (1.010), les technologies informatiques (871), les technologies médicales (729) et les machines, les appareils et l’énergie électriques (725). Un constat qui s’explique par une histoire industrielle française tournée vers l’automobile et l’aéronautique.
« On observe une stagnation dans le secteur des transports, parce qu’une grande partie de ces brevets sont liés aux voitures thermiques. La R&D a tendance à se redéployer vers le numérique et l’électrique qui ne sont pas dans ce poste de transport. En réalité, nous avons surtout un redéploiement des investissements vers les batteries par exemple, qui constituent une sous-partie du domaine des appareils électriques », développe Yann Ménière.
L’an dernier, les dépôts de brevets dans les batteries ont progressé de 7% en France. Autre tendance notable et réjouissante : la progression de 18,1% des dépôts liés aux technologies informatiques en France.
« Ce n’est pas le point fort traditionnel de la France, concède l’économiste. Mais c’est intéressant, car c’est la transformation numérique de l’industrie, cela ne concerne pas seulement les pure players mais plus généralement toutes les industries qui innovent pour digitaliser leurs produits et leurs procédés. »
L’intelligence artificielle n’est pas en reste sur le sujet. Cette technologie est un facteur important d’innovation qui s’est traduit par le dépôt de plusieurs brevets sur des briques technologiques ou des applications dans divers domaines industriels.
Le développement des technologies informatiques constitue, plus que jamais, un enjeu majeur à l’échelle mondiale. « Nous sommes dans une économie mondiale en concurrence du point de vue de la technologie », reconnaît Yann Ménière, « et l’Union européenne reste un marché incontournable pour commercer des technologies ». Qui rappelle qu’elles tirent les demandes mondiales de brevets et ont permis l’émergence fulgurante de la Chine et la République de Corée dans le top cinq de ce classement mondial. Parmi les sociétés ayant déposé le plus de brevets auprès de l’OEB, on compte d’ailleurs Huawei, Samsung et LG.
L’Ile-de-France, un pôle de classe mondiale
Sur le plan géographique, sans grande surprise, l’Île-de-France, domine pour ne pas dire écrase, le classement des régions les plus actives en termes de dépôts de brevets. Elle compte, en effet, 6.911 dépôts à son actif, contre 1.293 pour la région Auvergne-Rhône-Alpes, en deuxième position et 483 en Occitanie. Trois autres territoires, Provence-Alpes-Côte d’Azur, Grand-Est et Nouvelle-Aquitaine dépassent les 300 demandes de brevets.
La répartition par régions françaises des demandes de brevets européens (crédits : OEB).
« L’Ile-de-France boxe dans la catégorie mondiale », reconnaît le chef économiste de l’OEB. Première région en Europe, 4e au niveau mondial, elle affiche une croissance des demandes de brevets de 2,1% en 2023, une position qu’elle tient grâce à un écosystème extrêmement riche et complet.
« La région parisienne possède des champions dans beaucoup d’industries dans divers domaines, des universités, des centres de recherches, une dynamique dans l’intelligence artificielle et un écosystème de startups, y compris en deeptech, qui se développe rapidement. Tous les ingrédients sont là pour avoir un pôle de classe mondiale ! », poursuit-il.
Faut-il reléguer les régions au second plan ? Non, car on observe la présence de certains pôles majeurs d’innovations en région, notamment en Auvergne Rhône-Alpes.
L’Auvergne-Rhône-Alpes portée par le CEA
« On ne peut pas les comparer à la Californie comme l’Île-de-France, mais elles excellent dans leurs domaines de spécialisation », souligne le chef économiste.
Dans cette logique, il n’est pas surprenant de voir la région Auvergne-Rhône-Alpes prendre la deuxième place du classement.