La Tribune Toulouse (Edition Quotidienne)

Notre-Dame-des-Landes : le risque d’un retour de bâton pour l’Etat, Vinci réclame 1,6 milliard d’euros d’indemnités

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Une montant aux antipodes des « quelques dizaines de millions d’euros » évoqués en 2019 par Élisabeth Borne, à l’époque ministre de la transition écologique. Mais aussi des estimation­s des auteurs du rapport gouverneme­ntal sur Notre-Dame-desLandes en 2017, lesquels évoquaient un montant maximal de 350 millions d’euros. Un chiffre considéré fin 2018 par le Conseil d’État comme « déraisonna­ble », au motif que Vinci n’avait en tout investi dans le projet d’aéroport du Grand Ouest « que 9 millions d’euros entre 2011 et 2018 », soit un taux de rentabilit­é interne de 65% à 73% sur sept ans alors que la modélisati­on financière présentée dans le contrat de concession prévoyait 13,42%.

Le jugement ne sera pas rendu « avant deux semaines minimum ».

« Le contrat est béton »a toujours avancé Vinci

Selon Ouest-France, le rapporteur public a préconisé le rejet de la requête, arguant que la décision de l’État était justifiée par un motif d’intérêt général. Pour rappel, l’aéroport à Notre-Damedes-Landes était un projet controvers­é vieux de cinquante ans dont l’abandon a entraîné l’expulsion de la Zone d’aménagemen­t différé (Zad) qui s’était montée illégaleme­nt sur l’emplacemen­t de l’aéroport.

De son côté, Vinci a toujours dit que son « contrat était béton »

« Il y a un temps, qui probableme­nt sera assez long, qui tirera les conclusion­s de cette décision (...) Le contrat est béton », déclarait janvier 2018 le PDG de Vinci, Xavier Huillard.

Nouvel appel d’offres

Plus précisémen­t, l’indemnité couvre la résiliatio­n par l’État du contrat de concession des aéroports de Nantes-Atlantique, de Saint-Nazaire-Montoir qu’exploitaie­nt Vinci à l’époque et de feu Notre-Dame-des-Landes que devait construire le groupe. Pour rappel, signé fin 2010 par l’État et le groupe Vinci, le contrat concession entré en vigueur en 2011 accordait au groupe de

BTP une concession de 55 ans pour la gestion de ces aéroports, sachant que l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes devait, une fois construit, remplacer celui de Nantes-Atlantique situé au coeur de la ville de Nantes.

Le chiffre de Vinci prend en compte les dépenses déjà engagées à l’époque par Vinci dans le cadre du contrat (c’est-à-dire l’ensemble des démarches préparatoi­res au projet de NotreDame-des-Landes, les différente­s études réalisées, les travaux préliminai­res), le produit de l’exploitati­on de Nantes-Atlantique et de Saint-Nazaire-Montoir, et le manque à gagner pour l’exploitati­on future qui n’a pas eu lieu, puisque la concession était censée s’achever en 2022. Soit 44 ans avant la fin de la concession prévue dans le contrat. D’où ce chiffre exorbitant d’1,6 milliard d’euros, qui ressort au moment-même où un nouvel appel d’offres a été lancé en fin d’année dernière pour « la concession des aérodromes de Nantes-Atlantique et Saint-Nazaire Montoir, portant principale­ment sur leur exploitati­on et le réaménagem­ent de l’aéroport Nantes-Atlantique ».

Pour rappel, l’aéroport de Nantes est actuelleme­nt déjà géré par un consortium mené par Vinci. En octobre 2019, après l’abandon de Notre-Dame-des-Landes, un premier appel d’offres avait été lancé puis abandonné pour « insuffisan­ce de concurrenc­e » dans la mesure où Vinci, qui était le concession­naire de l’aéroport Nantes-Atlantique, était le seul candidat en lice.

L’exemple de l’aéroport d’Atatürk à Istanbul

Aussi élevé soit-il, le montant demandé par Vinci colle peu ou prou avec l’indemnité obtenue en Turquie par TAV, une filiale d’ADP, pour le transfert d’activité en avril 2020 de l’aéroport Atatürk d’Istanbul vers un nouvel aéroport, 21 mois avant la fin de la concession. Pour ces 21 mois seulement de manque à gagner, TAV avait été indemnisée par l’Etat turc à hauteur de 389 millions d’euros. Ramenée à la taille de Nantes Atlantique (qui accueillai­t 10 fois moins de passagers qu’Atatürk) et à la durée restante de la concession de Vinci (plus de 40 ans), l’indemnité obtenue par TAV en Turquie équivalait un milliard d’euros environ.

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