La Tribune Toulouse (Edition Quotidienne)

En Corse, le rachat de Casino vire au casse-tête

-

« La direction de Codim 2 ne veut rien divulguer, dans la mesure où les discussion­s préalables sont couvertes par une obligation de confidenti­alité, regrette Éric Lunardi, porte-parole du syndicat. Nous n’avons aucune connaissan­ce du contenu des offres dont une serait faite par des acteurs locaux affiliés à une enseigne nationale... ».

Une délégation serait reçue le 27 mars prochain, à Paris ou à Saint-Étienne, par Philippe Palazzi, qui s’apprête à endosser le costume de directeur général du groupe Casino. Que cet ancien patron de Lactalis ait des origines corses ne devrait pas changer la donne sur ses intentions.

De son côté, le STC est intransige­ant sur un point : les emplois et les acquis sociaux ne sont pas négociable­s. Pas question de les remettre en cause, une fois la reprise effective. Or, depuis trente ans, au fil de bras de fer successifs, les salariés corses de Casino ont obtenu des avantages que leurs collègues du continent n’ont pas - en plus de la prime d’insularité accordée pour compenser la vie chère. En outre, ils bénéficien­t d’une convention collective plus protectric­e.

Une équation complexe à résoudre

Après l’angoisse suscitée par la desserte aérienne de service public et la peur de voir Air Corsica perdre le marché, l’Assemblée de Corse a voté le mois dernier une délibérati­on sur le rachat de Casino. Elle y affirme son attachemen­t aux acquis sociaux des salariés. En outre, elle demande qu’aucun démantèlem­ent du groupe Codim 2 n’ait lieu. Dans le même temps, elle souhaite une baisse des prix de l’alimentair­e, plus élevés de 14% par rapport à la moyenne nationale tout en développan­t le flux d’affaires avec les producteur­s locaux.

Élus corses et STC sont sur la même longueur d’onde lorsqu’ils se déclarent hostiles à une vente à la découpe de Codim 2 et à l’instaurati­on d’une situation de monopole par le futur repreneur. En cela, ils sont parfaiteme­nt en phase avec l’Autorité de la Concurrenc­e.

Sauf qu’il est difficile de concilier concomitam­ment les deux voeux : la vente de Codim 2 en un seul morceau et la proscripti­on de toute position dominante dans un marché aussi étroit que celui de la Corse.

Même si on ne connaît pas à ce jour l’identité des quatre candidats-repreneurs, il y a forcément les fleurons de la grande distributi­on. Mais tous ou presque ne peuvent qu’acheter un nombre limité de grandes surfaces, impossible donc de les mettre toutes dans le même chariot : Auchan doit renoncer au Casino d’Ajaccio, car il y est déjà fortement implanté ; tout comme pour Carrefour à Ajaccio et Propriano et pour Système U à Porto-Vecchio ou encore Leclerc qui recense le plus grand nombre de centres commerciau­x, du nord au sud de l’île.

En théorie, seul le groupe Intermarch­é, absent de l’île, pourrait racheter le groupe Codim 2 dans son intégralit­é sans altérer le paysage concurrent­iel. Mais comme les autres, il devra accepter de prendre aussi dans le cabas les avantages acquis des salariés, ce qui n’est pas évident à encaisser. Bref, pour racheter les magasins du groupe Casino de la Corse, il faut avoir un petit côté flambeur...

Newspapers in French

Newspapers from France