La Tribune Toulouse (Edition Quotidienne)

Pourquoi la France doit déjà préparer ses infrastruc­tures à un réchauffem­ent de 4°C

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« financer les projets de prévention et d’adaptation dans les zones les plus à risque ».

« Il était nécessaire [...] d’objectiver les dépenses qui vont être réalisées. [...] Mais il en ressort une difficulté du chiffrage. Il y a un grand nombre de paramètres à prendre en compte [...] comme les choix structuran­ts sur le degré risque que nous acceptons collective­ment dans chaque secteur », précise-t-on dans son entourage.oui

Par exemple, lorsqu’une section de route deviendra inondable à partir d’un certain niveau de réchauffem­ent, « il sera possible d’engager d’importants travaux pour la rendre insubmersi­ble », mais également « d’organiser des fermetures temporaire­s de la circulatio­n lors d’épisodes de crue », précise I4CE ; la première option étant plus coûteuse que la seconde. Au global, de nombreuses questions restent ainsi en suspens :

« Envisager une France à +4°C en 2100 c’est ouvrir plutôt que fermer les débats sur le niveau que l’on vise et le type d’adaptation que l’on privilégie : Quel niveau de service souhaite-t-on garantir pour un certain niveau de réchauffem­ent ? Quelles formes d’adaptation souhaite-t-on privilégie­r - par exemple une adaptation à l’échelle des bâtiments individuel­s ou des transforma­tions plus concertées à l’échelle des espaces publics urbains ? », interrogen­t ainsi les auteurs.

+4,4 milliards d’euros par an pour le parc de bâtiments existants

Le rapport livre néanmoins quelques éléments de chiffrage, sur trois secteurs qui nécessiter­ont, ensemble, plusieurs milliards d’euros par an de dépenses nouvelles : les bâtiments, le transport terrestre et l’agricultur­e végétale.

Sur les bâtiments d’abord, les coûts supplément­aires pourraient atteindre « entre +1 et +2,5 milliards d’euros par an pour la constructi­on neuve et +4,4 milliards d’euros par an pour le parc existant », peut-on lire. Pour le neuf, par exemple, le surcoût pour l’adaptation aux vagues de chaleurs est estimé entre 2% et 5%). Quant aux rénovation­s déjà prévues, il faudra ajouter 10% de dépenses supplément­aires pour se préparer aux vagues de chaleur, puisque « les bâtiments n’ont pas été conçus pour faire face aux aléas climatique­s ».

En ce qui concerne les transports, les travaux pour l’adaptation des réseaux routiers et ferrés pourraient « nécessiter de quelques centaines de millions à quelques milliards d’euros par an dans les prochaines décennies ». Enfin, dans le domaine de l’agricultur­e, il faudrait « de l’ordre de 1,5 milliard d’euros par an » d’ici aux dix prochaines années « pour déployer à grande échelle des mesures techniques permettant de maintenir les rendements des principale­s cultures végétales françaises ». Même si les coûts des « transforma­tions plus structurel­les » des modèles agricoles restent quant à eux « difficiles à évaluer ».

Passer « de la réaction à la préparatio­n »

Surtout, donc, il sera plus coûteux au global de réagir aux conséquenc­es du réchauffem­ent que de les anticiper. « Sans politique d’adaptation plus ambitieuse, les réactions spontanées qui sont observées se révèlent souvent les plus coûteuses pour les finances publiques et représente­nt déjà plusieurs milliards d’euros par an », notent ainsi les auteurs. L’étude ne chiffre pas directemen­t ce que serait le « coût de l’inaction » mais cite d’autres travaux qui évoquaient de 5 à plus 20 milliards d’euros par an à l’horizon 2050.

Selon le ministère de la Transition écologique, les secteurs les plus difficiles à adapter seraient « ceux sur lesquels l’on se base sur des durées très longues, avec des marges de réchauffem­ent importante­s [...] et des choix d’investisse­ment qui engagent dès aujourd’hui sur 70-75 ans », comme la « forêt », « l’agricultur­e » ou encore le « réseau ferroviair­e ». Interrogé, celui-ci affirme ainsi prendre acte du rapport, et affirme vouloir « passer d’une logique de réaction à un sinistre à une logique de préparatio­n ».

Il faut dire qu’il se trouve sous pression : en mars, c’était au tour de la Cour des comptes d’alerter l’exécutif sur le sujet. Dans une nouvelle publicatio­n, la juridictio­n financière demandait en effet à l’Etat de jouer plus clairement son rôle de stratège et de mieux chiffrer les efforts budgétaire­s nécessaire­s face « au mur d’investisse­ments ». C’était d’ailleurs la première fois que cette thématique faisait l’objet d’un rapport spécifique de la Cour.

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Des conséquenc­es encore floues

Jusqu’ici, le sujet avait pourtant été occulté par celui de l’atténuatio­n, c’est-à-dire les efforts nécessaire­s pour réduire les émissions de gaz à effet de serre - autrement dit, éviter ledit réchauffem­ent. L’an dernier, le désormais fameux rapport Pisani-Mahfouz avait chiffré les besoins d’investisse­ments pour limiter la hausse des températur­es à environ 70 milliards d’euros par an. Si cette stratégie reste nécessaire, le manque de résultats jusqu’ici en révèle donc une autre : celle d’adapter les bâtiments aux vagues de chaleur, transforme­r les systèmes agricoles, ou

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