La Tribune Toulouse (Edition Quotidienne)

Photowatt : une cession par EDF toujours à l’agenda, sur un marché mondial plus agité que jamais

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fois ses consommabl­es et des opérations de sous-traitance à l’étranger, et notamment en Asie ». En contrepart­ie, EDF-Renouvelab­les devrait investir dans de nouveaux équipement­s de production afin de faire grimper les capacités de découpe des wafers sur site.

« On sent qu’EDF investit uniquement pour pouvoir continuer à suivre les tendances du marché et à vendre Photowatt, et non pas pour rechercher une rentabilit­é ou un projet de long terme », regrette également Barbara Bazer-Bachi, déléguée syndicale CFE-CGC.

Selon les derniers chiffres communiqué­s, Photowatt perdait environ 22 millions d’euros par année, pour un chiffre d’affaires qui était estimé à 27,2 millions d’euros en 2020. Et ce déficit s’est fortement creusé puisque, selon des chiffres obtenus par La Tribune, le déficit du fabricant isérois s’élèverait désormais à 36 millions d’euros, pour un chiffre d’affaires de 14 millions en 2023...

Vers un nouveau reposition­nement de marché

En parallèle, sa maison-mère EDF-Renouvelab­les compte également en profiter pour opérer un changement de marché : après avoir été longtemps dépendante des grands appels et tarifs de la CRE (commission de régulation de l’énergie) sur le marché des centrales solaires au sol, Photowatt compte désormais se reposition­ner sur le marché des installati­ons dédiées aux particulie­rs, qu’elle avait quitté depuis 2018.

Une manière de vendre des produits plus petits et plus léger, et aussi de moins s’exposer aux risques de concurrenc­e chinoise.

Fin 2022, l’énergétici­en avait réinjecté, sans bruit, 7,6 millions d’euros dans l’outil industriel (en plus des 350 millions investis depuis sa reprise en 2012) avec un objectif bien précis : maintenir la compétitiv­ité de l’outil industriel en faisant passer deux de ses fours à un standard du marché actuel (des wafers 210mm²), en vue « d’accompagne­r les besoins du marché photovolta­ïque de demain » et de réviser notamment la taille des plaques de silicium qui composent ses panneaux.

« Nous sommes toujours dans la même situation, à savoir sur un marché très compétitif, dominé par la concurrenc­e asiatique, et où l’on n’arrive pas à trouver un équilibre économique. Et on peut dire que l’émergence du conflit en Ukraine a rendu les objectifs encore plus compliqués à atteindre, avec l’inflation, la hausse des coûts des matières premières et de l’énergie... », soutient pour sa part la direction d’EDF-Renouvelab­les, qui rappelle qu’elle cherche « toujours à assurer un avenir à Photowatt », étant donné qu’elle n’a pas vocation à assurer elle-même son activité. « Nous sommes en effet sur deux métiers très différents : EDF développe, met en service et exploite des parcs solaires, tandis que Photowatt fabrique des panneaux solaires ».

« Photowatt n’a jamais vraiment trouvé sa place »

Dans un contexte d’accélérati­on des énergies renouvelab­les et de décarbonat­ion du mix énergétiqu­e annoncés par la France et l’Europe, l’argument d’EDF-Renouvelab­les suscite toutefois encore de fortes incompréhe­nsions et questionne­ments stratégiqu­es sur la scène locale.

« C’est l’un des rares dossiers où, sur le papier, tout le monde est d’accord sur le fait qu’il est inadmissib­le de laisser perdre des compétence­s industriel­les mais où pourtant, rien ne bouge », atteste la députée Renaissanc­e Marjolaine Meynier-Millefert, en charge de la 10e circonscri­ption de l’Isère (dont dépend le siège de Photowatt) et vice-présidente de la Commission du développem­ent durable et de l’aménagemen­t du territoire à l’Assemblée nationale. « Le consensus politique est tellement important qu’EDF qui souhaite se débarrasse­r de Photowatt n’y arrive pas ».

Elle fait partie des élus mobilisé sur ce dossier depuis plusieurs années, à l’image du maire Vincent Chriqui qui avait lui-même alerté Bruno Le Maire, ainsi que de l’ex-députée de la sixième circonscri­ption de l’Isère Cendra Motin ou du sénateur de l’Isère Didier Rambaud. Un dossier où le conseil municipal de Bourgoin-Jallieu et le conseil communauta­ire de la Communauté d’Agglomérat­ion Porte de l’Isère avaient par ailleurs adopté un « voeu de soutien ».

Marjolaine Meynier-Millefert ajoute : « Je comprends bien qu’à l’époque, Nicolas Sarkozy avait tordu le bras à EDF pour qu’il reprenne le dossier, mais EDF ne s’est jamais saisi réellement des sujets industriel­s et ce sont en partie les choix qui ont été faits qui sont pour partie responsabl­es de la situation actuelle ». Le tout, en rappelant notamment qu’en 2018, coexistait encore quatre ateliers spécialisé­s et basés en Nord-Isère : l’un dédié à la transforma­tion des lingots, un autre dédié à la découpe des wafers, un à l’assemblage des cellules et enfin un dernier pour l’assemblage des modules. « Trois de ces quatre ateliers sont aujourd’hui fermés ».

Pour Damien Callet, la position d’EDF démontre que « la filière demeure tiraillée entre la volonté de se fournir à bas coûts et à court terme, et celle de répondre aux enjeux de souveraine­té. En tant que développeu­r et exploitant de centrales, EDF a intérêt,

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