La Tribune Toulouse (Edition Quotidienne)

Comment la loi SREN entend limiter les pratiques anticoncur­rentielles sur le cloud

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peu qu’il s’agisse d’une grande entreprise hébergeant une vaste quantité de données, ces frais peuvent chiffrer en centaine de milliers, voire en millions d’euros.

Les géants du cloud les justifient en affirmant que de telles opérations s’avèrent très complexes techniquem­ent et donc très coûteuses. L’Autorité de la concurrenc­e française a affirmé l’an dernier que le montant de ces frais étaient, en réalité, déconnecté­s des coûts réels supportés par les fournisseu­rs, et limitaient la concurrenc­e en découragea­nt les clients des ténors du cloud d’aller voir ailleurs. Deux prestatair­es français de cloud, Scaleway et OVHCloud, ont également pointé du doigt ces pratiques. Un avis partagé par la Competitio­n & Markets Administra­tion, le gendarme de la concurrenc­e britanniqu­e, qui a ouvert une enquête contre AWS et Azure pour cette raison, à l’instar de la Federal Trade Commission, son homologue américain.

« Aujourd’hui, pour changer de fournisseu­r cloud, une entreprise doit payer des frais représenta­nt 125% de son coût d’abonnement annuel », commente une personne de l’entourage de Marina Ferrari, secrétaire d’État chargée du Numérique, pour La Tribune.

Désormais, « les frais de transfert devront être facturés dans le respect d’un montant maximal de tarificati­on qui sera fixé par arrêté de la SENUM après propositio­n de l’ARCEP. En cas de non-respect de cette interdicti­on, le fournisseu­r de cloud s’expose à une amende pouvant aller jusqu’à 3% de son CA mondial, et jusqu’à 5% en cas de récidive. »

Une mesure anticipée par les géants du cloud

Cette décision est alignée sur le Data Act, qui prévoit également d’encadrer ses frais de transfert à partir de début 2027, calendrier sur lequel table aussi la loi SREN. Au cours des derniers mois, les trois géants du cloud ont, du reste, commencé à anticiper ces nouvelles règles en supprimant les frais lorsque leurs clients transfèren­t l’intégralit­é de leurs données, ce qui exclut une migration effectuée dans le cadre d’une stratégie cloud hybride ou multi cloud.

Pour être en accord avec la loi française et européenne, ils devront donc, à l’avenir, également limiter les frais dans le cas d’un transfert partiel. En sachant que les frais de transfert ne sont qu’un aspect limitant la concurrenc­e sur le cloud, comme le rappelle... Google.

« Éliminer les frais de transfert en cas de changement de fournisseu­r va permettre aux clients de passer plus facilement d’un prestatair­e cloud à l’autre. Cependant, cela ne résoudra pas un problème fondamenta­l qui empêche de nombreux clients de travailler avec leur fournisseu­r préféré en premier lieu : les pratiques de licence aussi injustes que restrictiv­es. Certains fournisseu­rs traditionn­els s’appuient sur leurs monopoles logiciels sur site pour créer des monopoles dans le cloud, en utilisant des pratiques restrictiv­es en matière de licences qui verrouille­nt les clients et entravent la concurrenc­e », expliquait Amit Zavery, vice-président et responsabl­e des plates-formes chez Google Cloud, qui a été le premier à supprimer les frais de transfert sous certaines conditions.

Une pique adressée à Microsoft et à son offre Microsoft3­65 basée sur Azure, qui suscite également l’intérêt des régulateur­s.

Un plafonneme­nt qui ne va pas faire que des heureux

Toujours dans l’optique d’éviter les entraves à la concurrenc­e en facilitant le passage d’un cloud à l’autre, la loi SREN prévoit d’obliger les acteurs du cloud à garantir l’interopéra­bilité et la portabilit­é des données entre leurs différente­s solutions.

Si les règles spécifique­s encadrant cette obligation devront être établies par l’Arcep, l’étude d’impact réalisée en amont de la loi citait l’absence d’une interface de programmat­ion permettant l’interopéra­bilité comme l’un des principaux obstacles à la migration d’un cloud vers l’autre, il est donc probable que celle-ci fasse partie des futures obligation­s. Là encore, la loi reprend l’une des dispositio­ns prévues par le Data Act.

Elle va, en revanche, plus loin que celui-ci sur un autre point : l’encadremen­t des crédits cloud, ces avoirs commerciau­x que les entreprise­s du secteur utilisent pour fidéliser leur clientèle. Avec la nouvelle loi, ceux-ci seront limités à un an maximum, ce qui est cohérent avec les recommanda­tions de l’Autorité de la concurrenc­e parues l’an passé. « Si une régulation des crédits cloud est retenue, l’Autorité recommande de faire une distinctio­n entre les crédits cloud offerts sous forme de test ou d’essai gratuits limités à une durée de quelques mois et les crédits cloud proposés sous forme de programmes d’accompagne­ment des entreprise­s, qui ont une valeur et une durée substantie­llement plus élevées », avait-elle alors déclaré.

« Les startups, en particulie­r celles dont le potentiel économique et technologi­que est particuliè­rement prometteur, sont la cible prioritair­e des crédits cloud offerts par les fournisseu­rs dominants sur le marché du cloud au travers de programmes d’accompagne­ment.

Ces derniers s’étendant pour la plupart sur une durée d’un an, nous avons choisi cette limitation temporelle, qui permettra

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